Strasbourg : 300 paniers repas distribués chaque jour aux personnes précaires, "l'été est un moment très difficile à passer"

Cet été, les Strasbourgeois en grande précarité peuvent à nouveau bénéficier d'un panier repas quotidien. Cette aide, particulièrement nécessaire durant la période estivale, est initiée par la Ville en partenariat avec une dizaine d'associations, et le soutien financier de la préfecture.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Pour la troisième année consécutive, la Ville de Strasbourg et une dizaine d'associations locales (le Secours populaire, Abribus, les Restos du cœur, Médecins du monde, la Cloche, la Banque Alimentaire, les 7 pains, Tôt ou T'art et Solinum) organisent durant tout l'été une distribution de paniers repas aux personnes précaires, fragilisées ou sans domicile fixe.

Cette année, la distribution a commencé le 13 juillet. Cinq jours par semaine, toute personne qui en éprouve le besoin peut venir chercher un colis avec un repas froid. A midi, du mercredi au dimanche et jusqu'au 21 août, à la Fabrique de théâtre, au 10 rue du Hohwald. Et de 17h à 18h30, du 1er au 26 août, cette fois du lundi au vendredi, à l'association l'Etage, au 19 quai des Bateliers.

"Cette distribution, on l'a mise en place pour répondre à un réel besoin pour des personnes en situation de précarité", explique Camille Vega, secrétaire général du Secours populaire du Bas-Rhin, l'une des associations partenaires. "Contrairement à ce qu'on pourrait penser, l'été est un moment très difficile à passer."

En effet, de nombreuses associations, qui fonctionnent principalement grâce à du bénévolat, sont obligées de réduire la voilure durant la trêve estivale, "ce qui fait que les distributions et les aides diminuent".

Un soutien indispensable durant l'été

Depuis plus d'une semaine, dans l'heure de midi, la file d'attente est longue dans la cour de la Fabrique de théâtre. Des nombreuses personnes sont venues récupérer leur colis, un repas froid – aujourd'hui, une salade de thon – que beaucoup, comme Jérôme, mangent sur place.

"Je viens dès que je peux, je ne suis pas à la rue, j'ai un logement" précise-t-il. "Mais mes fins de mois sont difficiles." L'hiver, il fréquente les Restos du cœur, mais apprécie grandement cette aide estivale, puisque "beaucoup de structures ferment (…) et alors on se retrouve dans le besoin."

"Certains jours, je n'ai rien à manger", confirme Rodolphe, assis un peu plus loin. "Il y a des maraudes citoyennes, mais elles ne se font pas durant l'été. Et ici on reçoit un repas, et de quoi s'hydrater."

En effet, le colis contient également des produits d'hygiène et, si nécessaire, des aliments pour animaux. Mais surtout de l'eau à boire, vitale lorsqu'il fait chaud. Or "à Strasbourg, il n'y a pas suffisamment de fontaines" rappelle Camille Vega. "Ni d'ailleurs de toilettes publiques."

Chacun est accueilli, sans justificatif

Ce temps de solidarité quotidien s'organise pour la troisième année consécutive. Il s'adresse à tout un chacun qui estime en avoir besoin, sans nécessité de présenter de justificatif.

"N'importe qui peut venir", résume Floriane Varieras, adjointe à la maire en charge de la ville inclusive. "L'idée est aussi de permettre à des personnes pas forcément habituées aux distributions alimentaires d'oser franchir le portail. Et ne pas leur poser de questions intrusives leur permet de se sentir plus légitimes de le faire." Et peu importe qu'elles aient besoin d'un soutien ponctuel d'une à deux semaines, ou d'une aide qui s'inscrit dans la durée.

Henri (nom d'emprunt) vient "depuis les deux-trois ans que ça se fait". Pouvoir manger ici lui permet d'économiser de l'argent pour "régler (ses) factures."  Ce qui fait également partie des objectifs des organisateurs : offrir ainsi l'opportunité à certains bénéficiaires d'utiliser les sommes qu'ils auraient consacrées à la nourriture pour payer leur loyer, leur gaz ou leur électricité.

La collaboration des Jardins de la Montagne Verte

Cette année, les fruits et les légumes du colis sont fournis par l'association d'insertion les Jardins de la montagne verte, mandatée par la Ville. Et c'est la cuisine de l'association, avec le chef Baptiste Caperan et son équipe, qui prépare les repas.

"On travaille avec notre équipe de maraîchage", se réjouit ce dernier. "Je m'arrange avec les collègues pour récupérer les légumes qu'ils ne peuvent pas vendre. Ici on les transforme, on les cuit et on les utilise pour les repas solidaires de cet été."

Pas de gaspillage, donc, et pour l'équipe de cuisine, la satisfaction de pouvoir préparer des plats froids équilibrés : "Les repas sains, c'est essentiel, ça nous tient à cœur", assure Baptiste Caperan. "Surtout qu'on s'adresse à un public qui a besoin de manger équilibré."

Une préoccupation largement partagée par la Ville. "Pouvoir garantir, même aux personnes les plus précaires, de manger à leur faim quelque chose de sain et de bon (…) c'est le sens de notre partenariat avec les Jardins de la Montagne verte" renchérit Floriane Varieras.

De plus en plus de Strasbourgeois pauvres

Alors que cette initiative estivale n'en est qu'à ses débuts, les organisateurs pensent déjà à la suite. Ils craignent une situation toujours plus difficile, car dans la capitale alsacienne, la précarité ne cesse d'augmenter. Selon l'adjointe à la maire, les derniers chiffres de l'Insee, remontant à 2018, indiquaient déjà que "26% de la population strasbourgeoise vivait sous le seuil de pauvreté, avec moins de 800 euros pour une personne".

Et de façon manifeste, cette paupérisation n'a fait que croître depuis. D'autant plus que "la hausse des prix des produits de première nécessité, farine, huile, pâtes, a aussi des conséquences lourdes sur le budget des familles".

Selon Floriane Varieras, Strasbourg ferait partie des villes "où le pourcentage de personnes vivant sous le seuil de pauvreté est le plus élevé", un pourcentage "assez proche de celui de Marseille."

Les associations d'entraide locale font un constat analogue sur le terrain. Les membres de l'association Abribus prédisent au moins 600 personnes supplémentaires à la rue, dès la rentrée. Alors que depuis quelques mois, des tentes émergent déjà partout. "La pauvreté explose à Strasbourg", résume Camille Vega. "On est vraiment très inquiets pour ces prochains temps."

Mais tout en se préparant déjà à devoir affronter des situations encore plus dramatiques à l'automne, les acteurs de l'entraide strasbourgeoise se concentrent sur leur objectif estival. Mettre leur énergie en commun pour pouvoir offrir à toutes les personnes qui le souhaitent un point de repère. Où venir chercher un repas, de l'eau, des conseils, des informations, et un peu de chaleur humaine. Vitale, même en période de canicule.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information