Dans son combat pour chasser les voitures du centre-ville, la municipalité de Strasbourg dévoile sa nouvelle cible : le stationnement résidentiel. Une hausse significative des tarifs est envisagée, pour inciter les automobilistes à laisser leurs véhicules dans les parkings plutôt que dans la rue.
Après son plan piéton et son programme de développement des pistes cyclables, la municipalité écologiste strasbourgeoise continue sa reconquête de l’espace public urbain. Dans son collimateur, le stationnement résidentiel. « Six voitures de résidents sur dix ne bougent quasiment jamais », constate l’adjoint en charge des espaces publics, Pierre Ozenne. Il faut dire que le tarif résident est attractif : 15 euros par mois. Bien loin des 100 à 120 euros mensuels qu’il faut compter pour la location d’un box dans le centre-ville. De quoi donc être tenté de laisser sa voiture dormir dehors.
Des voitures qui encombrent l'agglomération strasbourgeoise où de nombreuses rues, dans le centre comme dans les quartiers périphériques, sont étroites, parfois sans trottoirs, donc difficilement praticables par les personnes en fauteuil roulant ou les poussettes. « Libérer l’espace occupé par ces véhicules offrirait une meilleure circulation, et permettrait aussi de faire des pistes cyclables et de végétaliser l’espace urbain", propose l'adjoint strasbourgeois. Solution radicale en réflexion pour y parvenir : augmenter de manière "significative" le tarif résidentiel. La ville ne précise toutefois pas à ce stade le montant de cette hausse ni sa date d'entrée en vigueur.
Où mettre les véhicules ?
Que faire de tous ces véhicules qui, selon la mairie, encombrent les rues ? « Soit leurs propriétaires ont la possibilité d’avoir un box ou un garage, soit ils vont devoir aller vers les parkings ouvrages de la ville et les parkings relais-tram », suggère Pierre Ozenne. Sauf que là, les tarifs ne sont plus du tout les mêmes. Une place en parking coûte en moyenne deux euros de l’heure. Un abonnement en parking-relais s’élève à 53.50 euros par mois. Pas sûr que cette proposition soit donc très incitative. Mais Pierre Ozenne a d’autres arguments : « nous avons conscience des efforts que cela pourrait demander aux automobilistes concernés. Donc nous réfléchissons à l’instauration de tarifs préférentiels. On peut aussi proposer des services complémentaires, comme un abonnement aux transports en commun ». Et de suggérer également la possibilité pour ces résidents de bénéficier d’une heure gratuite de stationnement en ville quand ils doivent par exemple décharger leurs courses.
A ce stade de la réflexion, Pierre Ozenne n'indique pas si les places de stationnement ainsi récupérées seront supprimées de la voirie, ni dans quelles proportions la municipalité souhaite les réduire.
« Le concours Lépine de la meilleure idée pour compliquer la vie des gens »
On pressent que cette réforme du stationnement résidentiel ne manquera pas de susciter de vifs débats. L’opposition municipale agite déjà le chiffon rouge. « C’est la mauvaise surprise de la rentrée. Alors qu’on voit que beaucoup de villes de France font tout pour faciliter la vie des gens face à la crise, ici c’est le concours Lépine de la meilleure idée pour compliquer la vie des gens », juge Pierre Jakubowicz, élu municipal du parti Agir. Comme la majorité, il constate également cette présence de véhicules dormant dans les rues de la capitale alsacienne : « c’est la conséquence d’une mauvaise gestion de l’urbanisme à Strasbourg depuis de nombreuses années. On a surconstruit dans la ville, surbétonné dans certains quartiers, mais sans créer assez de places pour tous les occupants de ces nouveaux logements. Il faut donc construire une offre de stationnement correspondant à la densification de la ville".
Constat partagé par la majorité qui annonce réfléchir à la création de trois nouveaux parkings, dans des espaces actuellement insuffisamment dotés. D’ici là, cette réforme du stationnement résidentiel fera l’objet d’une délibération lors du prochain conseil municipal du 20 septembre. Puis s’ouvrira un trimestre de discussion et de réflexion avec les usagers - particuliers, professionnels et artisans - concernés par cette mesure avant sa possible entrée en vigueur en 2022.