Jeudi 17 ou vendredi 18 mars, un homme atteint d'une hémorragie digestive est décédé aux urgences faute de prise en charge assez rapide selon Sébastien Harscoat, médecin urgentiste au Nouvel Hôpital Civil.
Mercredi 16 mars d'après les urgentistes (jeudi 17 d'après la Direction de l'hôpital), vers 23 heures, un homme atteint d'hémorragie digestive est admis aux urgences du Nouvel Hôpital Civil de Strasbourg (Bas-Rhin). Il va attendre plus de 12 heures avant d'être pris en charge. Délai beaucoup trop long pour tenter de le soigner. Il décède, jeudi 17 mars (ou vendredi 18 selon la Direction), en début d'après-midi comme le révèlent nos confrères de Rue 89 Strasbourg.
"Je travaillais ce jour-là " raconte Sébastien Harscoat, médecin urgentiste au sein de l'établissement à l'origine de la divulgation de l'information. "Tout était réuni pour que cela se passe mal". Le patient serait resté plus de 12 heures sur un brancard dans la zone 4, lieu de passage dédié à la répartition des patients dans lequel aucun soin n'est prodigué.
Dès son arrivée, le patient aurait dû être transfusé et bénéficier d'un traitement médicamenteux adéquat. Cela n'a pas été le cas, l'homme a été retrouvé en arrêt cardiaque. Si l'enquête interne doit, à présent, définir les causes exactes du décès, il est évident pour Sébastien Harscoat qu'il est lié aux manques de moyens croissants au sein des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg.
La Direction de l'hôpital indique ce jeudi soir que "les premiers éléments confirment la prise en charge médicale du patient aux urgences dans la nuit du 17 au 18 mars et une disponibilité de lits en médecine, soins critiques et chirurgie" . La Direction ajoute que "conformément à la procédure applicable, le décès a été déclaré à l’Agence régionale de santé sur le portail national des événements indésirables graves et qu'une enquête est diligentée par le Directeur général".
30 droits d'alerte en 3 ans et demi
Manque de soignants, manque de lits et une direction qui fait la politique de l'autruche, la situation est dramatique. "Cela fait trois ans que nous travaillons dans ces conditions" nous dit Christian Prudhomme, secrétaire général FO aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg.
"Mardi dernier (22 mars) les urgences étaient à 200% de leur capacité d'accueil avec 10 véhicules d'urgence bloqués devant" poursuit-il, "nous avons déposé deux nouveaux droits d'alerte", mais la direction ne réagit pas.
Accouchement au bord de la route faute de place, détresse respiratoire faute de prise en charge, les cas se multiplient et les soignants se retrouvent face à un mur. "Vous savez nos professionnels de santé rattrapent pleins de cas sans que cela se sachent".
Sébastien Harscoat, lui, évoque un autre cas. En 2020, un jeune homme a fait un arrêt cardiaque dans l'ambulance, "faute de prise en charge il est mort" selon lui.
Ne plus être complice de cette situation
Le médecin urgentiste a décidé de parler car les soignants n'en peuvent plus et que les propositions faites à la direction ne sont pas suivies d'actes. "Ils n'assument rien".
Cela fait des mois que médecins, infirmiers et syndicats proposent des solutions. Gestionnaires de flux pour trouver les lits nécessaires et aider au désengorgement des urgences, réorganisation des services, service tampon avec une réserve de soignants volontaires sont autant de propositions. Elles n'ont pas réellement trouvé écho auprès de la direction pour le moment.
La famille du patient n'a pas porté plainte pour l'instant.