À la fin de l'année 2022, deux jeunes Strasbourgeois ont lancé Blyynd, une application permettant d'échanger sextos et autres photos à caractère sexuel de manière sécurisée. La démarche se veut éthique et inclusive, le consentement et la communication jouant un rôle central.
En mettant en relation des personnes qui ont des fantasmes en commun, Blyynd veut réinventer la sexualité en ligne. L'application, disponible depuis la fin 2022, permet des échanges érotiques de manière anonyme et surtout sécurisée.
L'idée est née pendant le confinement de 2020. Cyrille Heimburger et Tanguy Fallard, deux Strasbourgeois de 24 et 25 ans qui se sont connus sur les bancs de l'EDHEC de Nice se sont lancés, se rendant compte qu'une application dédiée au sexting n'existait pas : "Pendant le premier confinement, j'avais l'habitude de sexter avec ma copine, se souvient Tanguy Fallard. Puis au deuxième confinement, je n'avais plus de copine, mais toujours l'envie de sexter."
Deux ans plus tard, Blyynd voit le jour après qu'un troisième associé, Guillaume Colas, a rejoint l'aventure. La plateforme veut se démarquer des applications et des sites de rencontres, où basculer dans une conversation sexuelle n'est pas évident : "Sur Tinder ou autres, on trouve des gens qui veulent trouver l'amour, le mariage, un coup d'un soir... Ici, c'est explicite", compare Cyrille Heimburger.
Pas de capture d'écran, la sécurité prime
Ces échanges érotiques se font dans un environnement sécurisé. Impossible de faire une capture d'écran sur Blyynd afin d'éviter toute diffusion malveillante de photos érotiques (les "nudes"), ce qu'on appelle le "revenge porn". À la création de votre compte, on vous demande de créer un pseudonyme. Contrairement aux applis de rencontre, vous ne devez pas ajouter de photo de profil, mais être majeur est obligatoire.
Pour rencontrer du monde, vous indiquez vos fantasmes parmi une liste élaborée avec un sexologue. Si vous "matchez" avec quelqu'un, l'application vous met en relation et la discussion commence.
Les "dick pics" non désirées sont floutées
Les échanges sont totalement cryptés et les contenus modérés. Une intelligence artificielle repère les photos qui n'ont pas lieu d'exister sur l'application : "Si elle voit une photo d'enfant, votre compte sera supprimé. Même chose pour les messages à caractère raciste ou autre. L'idée est vraiment d'avoir un cadre sécurisé", précise Tanguy Fallard.
La notion de consentement est également très importante pour les développeurs. Nombreuses sont les femmes qui reçoivent sur Instagram ou Snapchat des photos de pénis (ou "dick pics") d'inconnus sans les avoir demandées.
Sur Blyynd, un outil appelé "SafeLock" détecte automatiquement ce genre de clichés, et un petit cadenas s'affiche sur la photo, évidemment floutée. Si l'utilisateur ou l'utilisatrice désire voir la photo, c'est à lui ou elle de désactiver la fonctionnalité.
"On veut vraiment remettre la communication et le consentement au centre de la sexualité en ligne", commente Cyrille Heimburger. Ce dernier présente son appli comme "une alternative éthique et humaine à la pornographie", omniprésente sur internet : "Ce sont des vidéos qui ne reflètent pas la réalité, et qui sont surtout faites par des hommes, pour des hommes", résume son associé.
L'application se veut inclusive, mais reste portée par trois jeunes hommes. Un paradoxe dont Tanguy Fallard est bien conscient : "Quand tous les trois, on explique à une femme que cette appli est aussi pensée pour elle, forcément elle s'interroge et c'est normal. Nous recherchons justement une associée pour qu'elle apporte ce regard féminin."
Des échanges avec des potentiels partenaires, les associés ont pu en faire début janvier lors du CES à Las Vegas (États-Unis), le plus grand salon au monde consacré à l'innovation : "C'était incroyable, surtout que l'application était sortie à peine une semaine plus tôt sur l'App Store", sourit Tanguy Fallard, qui ne s'attendait pas à voir autant de demandes du Japon et de Corée du Sud.
On reçoit des centaines de mails par jour.
Tanguy FallardDéveloppeur de Blyynd
En quelques semaines, l'application, pour l'instant gratuite compte déjà 10.000 téléchargements : "Nous sommes toujours en phase de test. Il y a encore des fonctionnalités à essayer, avec les retours qu'on peut avoir des utilisateurs. On reçoit des centaines de mails par jour", explique Cyrille Heimburger. Une version avec abonnement ou avec des fonctionnalités payantes verra ensuite le jour.
Pour l'instant, l'application permet de rechercher au plaisir solitaire à travers des photos, des audios et des messages érotiques. Mais les startuppers voient plus loin : "Nous voulons ensuite y ajouter des vidéos, ainsi que des appels audio et vidéos." A terme, les développeurs espèrent pouvoir connecter l'application à un sextoy pour pouvoir contrôler celui de son ou de sa partenaire à distance. Du plaisir virtuel à la stimulation physique.