Sortie il y a quelques semaines, "Le dia-bête de ma vie" est une bande dessinée écrite par une Alsacienne elle-même diabétique depuis plus de vingt ans. Elle s'est inspirée de son quotidien pour parler d'un sujet complexe. La maladie, le regard des autres, et l'envie malgré tout, de vivre normalement.
Laure Holtz-Kuntz avait 27 ans lorsqu'elle a appris qu'il lui faudrait désormais vivre avec le diabète. Aujourd'hui, elle en a 24 de plus, et lorsqu'elle regarde dans le rétroviseur, elle mesure à quel point cette maladie s'est immiscée dans son quotidien. "Le diabète, c'est un peu comme si on était condamné à supporter un sale gosse qui s'acharne à faire de mauvaises blagues au mauvais moment" raconte-t-elle. Dans la BD, ce sale gosse prend la forme d'un petit personnage hirsute qui change de couleur comme il change d'humeur. Parfois calme, parfois menaçant et violent.
C'est en personnifiant la maladie que l'autrice arrive à faire passer ses messages. Faire comprendre aux autres ce que cela signifie dans la vie de tous les jours. Car les réactions de l'entourage sont parfois maladroites. "Il y a les deux extrêmes, explique-t-elle. Ceux qui vont considérer que ce n'est rien du tout, et qu'il suffirait de faire un petit régime pour régler le problème. Et ceux qui vont dramatiser à outrance. Comme le cas de ce petit garçon à qui l'école a refusé une sortie scolaire, parce qu'ils pensaient que c'était trop risqué ! Or, on peut vivre tout à fait normalement, en respectant certaines règles très simples"
Pour Jean-Charles Cosson, gérant de Perles Editions, cet ouvrage est quasiment d'intérêt public. "Il y a 4 millions de diabétiques en France dit-il, on a tous dans la famille quelqu'un qui est atteint, et cette BD nous fait comprendre beaucoup de choses".
"Le dia-bête de ma vie" est tiré à 3.000 exemplaires pour l'instant, mais l'éditeur lui prédit une longue carrière. "Cela pourrait intéresser l'ARS, ou encore le ministère de l'Éducation nationale pour les CDI dans les collèges ou les lycées, énumère-t-il. D'ailleurs, des profs de SVT nous en ont achetés, parce que l'ouvrage explique le rôle du pancréas"
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Un bon binôme
La BD est préfacée par le professeur Pinget, fondateur du Centre Européen d'Etudes du Diabète à Strasbourg, qui ne cesse d'alerter sur cette maladie sournoise, qui s'installe sans bruit, "la nouvelle pandémie du 21ème siècle", prévient-il.
Mais cette problématique de santé publique est dédramatisée dans la BD, grâce au récit de Laura Holtz-Kuntz et aux illustrations de Yann Sougey-Fils. "Ils ont l'habitude de travailler ensemble, c'est une équipe qui matche bien, un bon binôme dit Jean-Charles Cosson. Yann arrive parfaitement à retranscrire le scénario de Laure."
Et pour la scénariste justement, cet apport est inestimable. "L'entourage comprend mieux de quoi il s'agit, observe-t-elle, et ça enlève une part de la charge mentale. On n'a pas envie que les gens s'apitoient sur notre sort, mais parfois ils ne conçoivent pas quand on est fatigués. Ils nous disent de prendre un sucre, et voilà... Comme si cela allait suffire pour tout régler"
Pour les diabétiques, cette maladie est le compagnon indésirable de tous les instants, exactement comme dans la BD. Pourtant, Laure y voit aussi un aspect positif. "Quand la maladie nous offre du répit, on a conscience de cet état où on se sent bien, où on ne ressent aucune fatigue. Et alors on savoure ces instants." Des petites victoires du quotidien qui permettent de relever tous les défis.
