Le théâtre de la Choucrouterie à Strasbourg parie sur l'impro. Des spectacles uniques, souvent hauts en couleur, désormais organisés chaque mois, en français et en alsacien. Un moyen pour le célèbre cabaret de se diversifier et d'attirer un autre public, plus jeune.
En 40 ans, elle s'est fait un nom bien au-delà de Strasbourg. La Choucrouterie fait se déplacer les amateurs de théâtre en tout genre. Pour sa fameuse revue notamment, lancée en 1994 et dont le succès ne se dément pas d'année en année. Mais la force de la Chouc', c'est également depuis toujours sa programmation éclectique. Se réinventer, surprendre, se mettre au défi... Elle propose désormais des spectacles d'improvisation en français et en alsacien.
Un espace de tous les possibles pour les comédiens. Pas de texte à apprendre, et surtout la liberté de laisser parler son imagination pour construire en direct, sur scène, des petits sketchs à partir d'un mot ou d'un thème, imposé par le maître du jeu ou le public. "Faire de l'impro, c'est comme tomber d'un arbre, décrit Jean-Pierre Schlagg avant de monter sur les planches. Tu t'accroches à une branche, puis quand elle craque, tu en attrapes une autre. Et quand celle-ci lâche aussi, tu en agrippes une troisième. Et ainsi de suite... Jusqu'à arriver à peu près indemne au sol".
L'astuce pour réussir selon lui : ne pas se projeter. Il compare l'impro à une pelote de laine : "Un bout de fil dépasse, il faut le tirer. Si tu réfléchis en amont à la longueur du fil, c'est fichu, il casse."
La règle d'or, ne jamais dire non
Au théâtre de la Choucrouterie, les comédiens se connaissent par cœur. Un atout de poids, car l'objectif est bien de se porter les uns les autres pour créer un petit bijou, ensemble, pas de se piéger. Un ping-pong qui transcende et débride, au point parfois de surprendre les artistes eux-mêmes lorsque certaines limites sont franchies.
"La règle d'or : ne jamais dire non, confie l'expérimenté Guy Riss. Toujours oui. Si un partenaire t'invite à boire un coup sur scène, tu ne refuses pas. Tu acceptes, parce que tu sais qu'il a déjà une idée derrière la tête. Tu ne dis pas non, et ensuite tout se joue là-haut".
Une véritable performance, physique et mentale. Car les comédiens peuvent en quelques secondes passer de la peau d'un marathonien à celle d'un ours avant de devoir interpréter un rugbyman ou un dentiste. De quoi se faire des nœuds au cerveau et des courbatures aux muscles.
Une forme moderne, qui plaît aux jeunes
L'improvisation attire le public, ravi d'être invité à participer depuis son siège à un spectacle unique, qui s'écrit devant lui. Un autre théâtre, pour séduire plus large.
"On montre qu'on sait faire autre chose que du théâtre alsacien. En l'occurrence, la forme est plus moderne, et l'impro plaît aux jeunes. Alors si on a davantage de jeunes autour de l'alsacien, c'est super", estime Arthur Gander.
Certains spectateurs, qui ont découvert l'impro à La Chouc', ont d'ailleurs monté leur propre troupe dans des villes et villages alsaciens.