Rebondissement au procès en appel de la rixe mortelle du nouvel an à Strasbourg : l'avocat général demande la requalification des faits

La question était cruciale, et l'avocat général a décidé lors de son réquisitoire, ce jeudi 3 octobre, devant la cour d'assises du Haut-Rhin statuant en appel, de demander la requalification des faits de meurtre reprochés à Jonay Hoffert et Christian Haas, en violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, en 2021. Ils avaient été condamnés en première instance à 20 ans de réclusion.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

C'est un mini coup de théâtre qui s'est produit ce 3 octobre au matin devant la cour d'assises du Haut-Rhin statuant en appel. Dans l'affaire de la rixe mortelle qui a conduit le 1ᵉʳ janvier 2021 à la mort de Josué Gorreta, 38 ans, dans le quartier de l'aéropostale de Strasbourg, l'avocat général a demandé, lors ses réquisitions, la requalification des faits. 

Il a demandé aux jurés que Jonay Hoffert et Christian Haas, reconnus coupables de meurtre en première instance et condamnés à 20 ans de réclusion, soient reconnus cette fois coupables de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner avec la circonstance aggravante d'avoir agi en réunion. 

Et de requérir de fait des peines moins lourdes, 16 ans pour Jonay Hoffert, qui a montré des regrets et n'avait jamais été condamné, et 18 ans pour Christian Haas, déjà six fois condamnés. Plus question de meurtre donc, l'avocat général s'en explique. 

Je pense que l'intention de tuer n'est pas présente dans ce dossier

L'avocat général

"Point important, relève-t-il lors de son réquisitoire, c'est la question de l'intention de donner la mort, les accusés voulaient-ils tuer ? L'emplacement des coups, la profondeur des plaies et l'arme utilisée comptent dans l'analyse. Je pense que l'intention de tuer n'est pas présente dans ce dossier. Il y a bien 18 plaies, mais 10 dans les jambes et 8 dans le tronc et une seule dans une zone considérée comme létale. Et la plupart ne sont pas profondes." 

Même si, pour lui, la culpabilité des deux accusés, en revanche, ne fait aucun doute, malgré la faiblesse des preuves directes."Par exemple, il n'y a aucune image de vidéosurveillance et la téléphonie ne donne pas grand-chose. Beaucoup de dossiers sont solutionnés par l'ADN, mais là, il n'y a pas grand-chose en termes d’ADN ni sur les armes, ni sur les objets et vêtements retrouvés. Tout repose sur les témoignages, et il y en a des centaines, classés en trois catégories, ceux qui relaient les rumeurs du quartier, les témoignages indirects et enfin les témoignages directs sur lesquels on doit se concentrer. Or, il faut bien dire que ceux-là ne sont pas toujours fiables, pas toujours sincères. L'omerta règne dans ce quartier, on ne dénonce jamais un autre manouche et si on parle on s'expose à des représailles." 

"Mais il y a la jurisprudence de la scène unique de violence, qui dit que s'il y a plusieurs agresseurs et qu'on ne sait pas trop qui a fait quoi, tout le monde est responsable des conséquences". Et de rappeler les témoignages concordants existants et qui désignent Jonay Hoffert et Christian Haas. "Ces deux personnes font partie de ceux qui ont agressé Josué Gorreta, donc il n'y a pas de doute raisonnable sur leur culpabilité".

Coupable aussi, Gérard Haas, condamné en première instance à cinq ans de prison, pour avoir blessé par balles deux personnes, au cours de cette même rixe. L'avocat général réclame donc la même peine avec mandat de dépôt.

"Josué Gorreta a été lynché !"

Pour les parties civiles, qui se sont exprimées en premier, il n'y a en revanche, pas de doutes sur l'intention de tuer. "Josué Gorreta a été lynché, personne n'a eu le temps d'intervenir !", clame Thomas Steinmetz, avocat des parties civiles dans sa plaidoirie du matin. Et de marteler, comme les autres défenseurs de la famille de Josué Gorreta, que le corps de la victime compte 18 plaies à l'arme blanche et aucune plaie de défense.

C'est un homicide, les accusés ont eu deux procès, ils ont bénéficié du droit

Thomas Steinmetz, avocat des parties civiles

"C'est un homicide, les accusés ont eu deux procès, ils ont bénéficié du droit, rappelle Thomas Steinmetz aux jurés qui vont devoir statuer. Et de rappeler lui aussi la thèse de la scène unique de violence. Christian Haas et Jonay Hoffert, condamnés devant les assises du Bas-Rhin fin 2023 à 20 ans de réclusion, étaient bien présents et ils ont décidé "oui, on fonce tous ensemble !"

Scène finale d'une soirée de Nouvel An qui a mal tourné entre deux communautés, les manouches alsaciens et les gitans espagnols auxquels appartenait Josué Gorreta, pilier de cette communauté et père de trois filles. "Le temps n'apaise pas toujours les souffrances, précise maître Laura Mourey, avocate de la famille de la victime. Mais le processus judiciaire aide considérablement, et la vérité judiciaire, c'est à vous de la donner", interpelle-t-elle les jurés.

Les avocats de la défense de reconnaître qu'il subsiste des zones d'ombre, liées aux témoignages contradictoires des uns et des autres. "Il manque en effet des prévenus dans le box, convient Laura Moutey. Mais ce n'est pas parce qu'il en manque, que les accusés présents n'ont pas écopé d'une peine appropriée en première instance".

Et donc de demander la confirmation de la peine prononcée à l'issue du procès d'assises. Les jurés se retireront pour délibérer ce vendredi 4 octobre après avoir entendu les plaidoiries de la défense.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité