SNCF : des terriers en béton près des rails pour abriter les blaireaux... et éviter les déraillements

La SNCF et la Ligue de protection des oiseaux (LPO) d'Alsace ont procédé à l'installation d'un terrier en béton pour blaireaux, le mercredi 4 novembre. C'est pour empêcher le mammifère de creuser dans le remblai soutenant les rails, ce qui provoque des affaissements sources de danger.

On connaissait les cygnes dans le tramway; voici maintenant les blaireaux dans le train. Ou plutôt en-dessous, dans des terriers creusés au sein du remblai soutenant les rails. Problème : les tunnels creusés par ces animaux "extraordinaires" peuvent causer des affaissements... jusqu'à faire dérailler les trains. La SNCF Réseau est partenaire depuis 2008 du pôle médiation faune sauvage de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) d'Alsace. Le 4 novembre 2020, elles ont édifié un terrier artificiel pour blaireaux.

La construction, juste à côté du remblai, a été chiffrée à 30.000 euros : construction du terrier avec galeries en béton et chambres en bois, et recouvrement de l'ensemble par un gros talus de terre créé ex-nihilo. Cette somme n'est pas aussi coquette qu'on pourrait le penser : la SNCF dépense bien plus depuis des années pour boucher les terriers de blaireaux, et chasser les mammifères malotrus vers d'autres horizons. Sans succès : les blaireaux semblent amoureux de ce remblai, et y reviennent à chaque fois.
 


Outre la SNCF et la LPO, la commune de Sundhoffen (Haut-Rhin) a aussi collaboré, ainsi que deux exploitants agricoles dont le maïs et le foin poussent juste à côté. La parcelle où a été construit ce terrier appartient à la municipalité, qui l'a mise à disposition grâcieusement. Ainsi, le nouveau terrier se trouve très près de l'ancien en étant accolé au remblai. Ce qui maximise les chances que les blaireaux veuillent bien déménager. 

La ligne de chemin de fer concernée relie Colmar à Neuf-Brisach (Haut-Rhin, voir sur la carte ci-dessous). Peu fréquentée, elle sert juste au fret. C'était donc assez aisé de construire ce terrier... et de mener un test. C'est la première fois que la SNCF tente la solution de cohabiter avec le blaireau plutôt que de l'éloigner. Si ça marche, des terriers semblables seront construits partout en France après cette première expérimentation alsacienne.
 
Au sein de la LPO, Laëtitia Duhil est une experte de ce sympathique animal rayé. Il fait l'objet d'une protection spécifique - et unique dans le pays - dans le Bas-Rhin, et ne peut donc pas y être chassé. Elle a répondu aux questions de France 3 Alsace.
 

Pourquoi les blaireaux ne partent pas ?

"Nous avons déjà testé diverses méthodes. Par exemple, un produit répulsif - naturel - car l'odorat des blaireaux est 700 fois supérieur au nôtre. On a aussi posé des sortes de chatières, des trappes anti-retour, qui laissent les blaireaux sortir du terrier, mais pas rentrer. Cette technologie a été développée par le CNRS de Strasbourg [Centre national de la recherche scientifique; ndlr] et la LPO d'Alsace."

"Mais ça ne fonctionne qu'à court terme et les blaireaux reviennent. C'est le signe qu'ils ne trouvent pas d'autre endroit où creuser leur terrier : normal, on est dans la plaine d'Alsace. Et le remblai sous les rails est facile à creuser, il est pentu pour évacuer les eaux de pluie... C'est l'endroit rêvé pour les blaireaux, qui aiment creuser et vivre au sec."

 
 

D'où vient l'idée d'un terrier en béton ?

"La méthode vient des Pays-Bas et date des années 1990. C'est un secteur très plat, où il y a beaucoup de voies ferrées, et surtout de digues... Il ne faut donc surtout pas que le blaireau aille y creuser. Mais c'est une espèce protégée. En 2019, nous sommes donc allés à Utrecht pour nous inspirer de leur retour d'expérience."
 

Ne suffisait-il pas d'appeler un chasseur ?

"Chasser le blaireau dans le Haut-Rhin n'est pas interdit. C'est vrai que la SNCF avait techniquement droit de le faire. Mais nous avons de très bonnes relations avec la SNCF, et nous pensons tous deux que nous n'avons pas le choix de cohabiter avec le blaireau. Toute espèce a son utilité, sa place. Et c'est un animal territorial. Si on le tue, son territoire devient libre, et est à nouveau colonisé l'année suivante. C'est le serpent qui se mord la queue."
 

Le blaireau, un animal populaire sur Internet.


Pour le moment, ce tas de terre est bien nu, et pas très joli. Mais d'ici peu, les plantes viendront le coloniser, et le transformeront en oasis de vie. Rendez-vous au printemps prochain pour découvrir un peu plus de verdure... et qui sait, une famille de blaireaux qui aura décidé d'y habiter.

Laëtitia Duhil passera toutes les deux semaines pour vérifier la concrétisation de ce déménagement, jusqu'au mois de juin. Avec les blaireaux, il faut faire preuve de patience...
 
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