Pourrait-il y avoir un troisième procès pour Eric Mosser ? Ce chauffagiste d'Illfurth avait été condamné en 2018 à 20 ans de réclusion pour le meurtre de son épouse Isabelle Brand. Ce dernier a pourtant toujours clamé son innocence. Une requête en révision vient d'être déposée par son nouvel avocat.
Il y a une constante dans ce dossier : Eric Mosser a toujours clamé son innocence et aujourd’hui, du fond de sa prison de Saint-Mihiel (Meuse), il espère obtenir la révision de sa condamnation. En 2017, l’ancien chauffagiste, aujourd’hui âgé de 55 ans, a été condamné à 20 ans de prison pour le meurtre de son épouse Isabelle Brand. Une peine confirmée en appel un an plus tard.
Le drame s’est joué le 12 septembre 2013 au domicile du couple à Illfurth (Haut-Rhin). Isabelle Brand est retrouvée morte, tuée de huit coups de couteau. C’est son mari qui donne l’alerte. Une première hypothèse évoque un cambriolage qui a mal tourné, mais très vite, les enquêteurs pointent de nombreuses incohérences. "À l’audience, on a constaté que ce prétendu cambriolage était en réalité une mise en scène, un simulacre", se rappelle Me Thierry Moser, alors avocat de la famille de la victime.
Dans ce dossier, pas de preuve matérielle ni de témoignage, mais un faisceau de présomptions qui a conduit à deux reprises la justice à condamner l’accusé. Eric Mosser est le dernier à avoir vu sa femme vivante, ce matin-là. Selon son témoignage, ils ont pris leur petit-déjeuner avant qu'il ne parte travailler. Mais il est arrivé à son premier rendez-vous professionnel avec 30 minutes de retard sans pouvoir l’expliquer. Et puis, aucune trace d’ADN d’une tierce personne n’a été retrouvée sur le corps d'Isabelle Brand.
Une star du barreau pour la défense
Surtout, un mobile s’est rapidement dessiné. Le mari avait de nombreuses maîtresses. L’une d’entre elles l’avait quitté la veille du meurtre, lui reprochant de ne pas vouloir divorcer. "Il tenait à cette maîtresse, on peut supposer qu’étant animé de colère et de ressentiment, il a donné la mort à son conjoint" explique Me Thierry Moser. Et de rappeler le portrait psychologique dressé par les experts à l’audience : un homme "intolérant à la frustration, apte à passer à l’action violente".
"Dès lors que l’on assemblait les différents éléments du puzzle, on voyait se dessiner, selon moi, l’image de la culpabilité indiscutable de Monsieur Eric Mosser "explique Me Thierry Moser. Un puzzle visiblement convaincant, même le ténor du barreau Eric Dupont-Morreti, alors avocat d’Eric Mosser, n’avait pas réussi à instiller le doute dans l’esprit des jurés.
Aujourd’hui, Eric Mosser compte sur son nouvel avocat parisien, Me Claude Llorente. Spécialisé dans les erreurs judiciaires, il fait partie de l’association Action Justice et s’est longuement plongé dans le dossier.
L'heure du crime
"J’étais révulsé de voir qu'un homme avait été condamné sur la base de suppositions. Le doute doit profiter à l’accusé", affirme-t-il. Me Claude Llorente dit avoir relevé de nouveaux éléments de nature à faire naître un doute sur la culpabilité de son client. En premier lieu, l'heure du crime.
Selon l’accusation, Eric Mosser a tué sa femme entre 7 h 45 et 8 h 15, car la victime a été vue par sa sœur à 7 h 45 et un témoin a reconnu Eric Mosser dans sa voiture à 8 h 15. Or, selon le nouvel avocat, le rapport d'autopsie d’Isabelle Brand révèle que son client n’a pas pu être l'auteur du meurtre. "D’après l’autopsie, son estomac ne contenait aucune particule alimentaire. Sa digestion était donc terminée quand elle a été tuée. Une digestion de petit-déjeuner prend 2 ou 3 heures. Elle n’a pas pu être tuée avant 10 heures. À cette heure-là, Eric Mosser était en rendez-vous professionnel ».
L’avocat aurait d’autres atouts dans son jeu et a introduit en avril une requête devant la Cour de révision. "Ça m’inspire une certaine amertume, j’espérais pour la paix et la sérénité des parties civiles qu’Eric Mosser s’en tiendrait là", commente Me Thierry Moser. "Il a bénéficié de deux procès, la justice a consacré plusieurs journées à l’examen très minutieux de ce dossier, donc je suis relativement optimiste".
La commission d’instruction de la cour de révision devrait statuer d'ici à un an. Un délai rallongé si elle demande, comme elle le fait souvent, un supplément d'investigations.