Kameli Imeri s'est réfugiée en France en juin 2017, avec son mari, après avoir fui l'Albanie où règne, selon elle, un climat homophobe. Pour son adhésion au mouvement LGBT, Kamela Imeri affirme avoir été victime de discriminations, de harcèlement et même de menaces de mort.
Kamela Imeri a 18 ans, en 2016, quand elle commence ses études d'économie agricole à l'université de Tirana. Tout semble aller pour le mieux sur la route qu'elle s'est tracée. Jusqu'au jour où elle croisera celle de Xheni Karaj. Les deux filles se lient d'amitié, Kamela l'invite à partager son appartement. Xheni Karaj, sa colocataire, est une figure emblématique albanaise du mouvement LGBT. Son amie lui raconte la vie, difficile, que mènent les homosexuel(le)s en Albanie.
Touchée par l'histoire de sa colocataire, Kamela Imeri rejoint l'association LGBT albanaise pour aider, soutenir la cause des homosexuels en Albanie. Elle participe régulièrement aux manifestations, distribue des tracts.
Autour d'elle, à l'université, dans la rue, parmi ses amis, c'est l'incompréhension. "Les gens ont pensé que j'étais lesbienne et se sont moqués de moi." Kamela est l'objet de harcèlement et subit des discriminations, même de la part de certains professeurs.Les gens sont un peu fermés, ils ne comprennent pas ce que veut dire gay et lesbienne. Ils disent juste non, ils n'acceptent pas la différence.
- Kamela Imeri, réfugiée -
Un peu plus tard elle fait la connaissance de Kreshnik, son futur mari. Il vient d'un village où les traditions sont restées très fortes. "Ici, la parole paternelle est plus forte que tout, plus forte que la loi." Le père de Kreshnik n'accepte pas la relation de son fils avec Kamela, il lui dit de "trouver une autre qui est mieux".
Et le père ne veut pas de cette relation qui déshonore le clan familial. Quand, plus tard, en 2017, Kamela tombe enceinte, le père devient menaçant: "Il faut avorter l'enfant. Si tu veux rester mon fils, tu dois faire ce que je dis". Mais Kreshnik brave l'autorité paternelle en continuant de soutenir sa femme. Les menaces paternelles sont allées jusqu'aux menaces de mort, affirme Kamela.Il y a une tradition en Albanie que si tu veux faire quelque chose que le père ne veut pas, tu ne la fais pas.
- Kamela Imeri -
En juin 2017, le couple quitte l'Albanie et son lot de menaces pour tenter de retrouver une vie normale, ailleurs, dans un pays européen. C'est un peu par hasard qu'ils arrivent à Mulhouse, où un Kosovar possède un appartement qu'il leur loue, moyennant 200 euros. En novembre 2017, peu de temps après la naissance de leur fille, le couple fait une demande d'asile. La demande est rejetée le 21 décembre 2018. Ils sont alors obligés de quitter l'appartement mis à disposition par le Cada (Centre d’accueil pour demandeurs d'asile).
Kamela, fidèle à elle-même, malgré ses difficultés, n'a, pour autant, pas cessé son combat contre l'homophobie. A Mulhouse, elle a trouvé une oreille attentive auprès de l'association l'Hêtre qui vient en aide aux personnes homosexuelles et transidentitaires. Mais, dans une situation plus que précaire, le couple risque de se retrouver à la rue si personne ne leur vient en aide. En attendant, Kamela ne perd pas espoir et reconstitue un dossier pour déposer une deuxième demande d'asile auprès de l'Ofpra.
VIDEO: le témoignage de Kamela Imeri
L'Albanie a décriminalisé l'homosexualité en 1995 mais selon un sondage publié en décembre 2017 dans un rapport du Programme des Nations Unies pour le développement (Pnud), 76% de personnes de la communauté LGBT ont répondu avoir été victimes de harcèlement. Selon ce même sondage, 92% des Albanais déclarent ne pas vouloir avoir de relations avec des personnes de la communauté LGBT et 48% des Albanais considérent l’homosexulalité comme une maladie.