Les travaux de sécurisation du stockage des déchets toxiques ont démarré le mardi 10 mai dans les galeries de Stocamine à Wittelsheim (Haut-Rhin). Pour la première fois, une équipe de France 3 a pu accéder à l'intérieur du site pour voir comment se déroulaient les travaux.
Les bétonnières sont entrées en action sur le site de Stocamine, à Wittolsheim dans le Haut-Rhin. Des milliers de mètres cube de béton vont être acheminés dans les galeries souterraines des anciennes mines de potasse, situées à 550 mètres sous terre. Douze barrages imperméables seront réalisés autour des déchets toxiques, le but étant de protéger la nappe phréatique d'un risque de pollution à long terme.
Les travaux qui viennent de débuter vont concerner 6 des 12 accès à la zone de stockage et devrait s'étaler jusque juillet 2023. Six barrages vont donc être construits dans les mois à venir pour freiner le plus possible l'eau qui devrait ennoyer les galeries d'ici quelques centaines d'années. Une équipe de France 3 a eu l'autorisation de pénétrer sur le site pour voir comment se passait cette première phase du chantier.
Un chantier unique au monde
A situation unique, technique de fabrication unique : les barrages sont construits dans un béton à la formulation bien particulière. "C'est un béton saturé en sel, c'est à dire gâché avec de l'eau saumurée. Cela lui donne une meilleure compatibilité avec le sel gemme, dans lequel il servira de barrage et où il sera coulé. L’objectif est d’éviter tout risque de dissolution pour améliorer le contact béton-sel", explique le directeur de chantier, Philippe Gillet.
Chaque barrage sera constitué de plusieurs segments en béton et en sel, remplissant toute la largeur de la galerie à fermer et totalisant une longueur d’un peu plus de cinquante mètres.
Autre particularité : la très faible imperméabilité du béton. " On recherche une perméabilité très faible, celle du sel est de 10-18 [10 puissance -18], on a comme objectif de garantir à minima ce seuil mais dans la fabrication on vise plutôt à 10-20 [10 puissance -20]", détaille le chef de chantier. Autrement dit, le béton est aussi imperméable, sinon plus, que la couche de sel dans laquelle il s'insère.
Le contexte minier ancien implique par ailleurs des conditions de travail pas toujours évidentes. Le béton est acheminé 500 mètres plus bas par conduite ou par bennes. Problème : les cages d'ascenseur datent du début du siècle dernier et ne peuvent contenir que de petits volumes de 1,5 m³ maximum. "Il a donc fallu aménager des bennes spéciales et faire un grand écart par rapport aux nouvelles exigences sécuritaires", confie Philippe Gillet.
Réversibilité des travaux
Ces travaux préparatoires à un enfouissement définitif doivent toutefois garantir la possibilité éventuelle d’un déstockage des déchets. Des procédures judiciaires et administratives sont, en effet, en cours, dont une enquête sur la nature exacte des déchets.
La directrice des MDPA, l'exploitant du site, justifie la décision de débuter le chantier par le caractère urgent et nécessaire des travaux à entreprendre, et ce quelle que soit la décision qui sera prise : "Si on devait encore déstocker il faudra confiner et nous sommes pressés par les terrains pour engager les opérations de confinement. Tout reste accessible et c'est ce qui nous a été prescrit par le préfet au mois de janvier. On commence les travaux à condition de laisser l'ensemble des déchets accessibles".
Des propos et une décision qui ne semblent pas remporter l'adhésion de tous. Le mardi 10 mai, premier jour du chantier, la Collectivité Européenne d'Alsace a déposé un référé suspension afin de stopper ces travaux et de continuer de négocier le déstockage total avec le gouvernement. Cette procédure n’interrompt toutefois pas le chantier en cours.