Les boutiques éphémères, une solution pour booster son commerce à Noël et pour après

La vacance commerciale touche de nombreuses villes moyennes. À Chaumont (Haute-Marne), la municipalité lutte contre les locaux vides. Pour dynamiser son centre-ville pendant la période des fêtes, elle accueille des boutiques éphémères, attirant de petits commerçants. Cette solution permet de tester des concepts commerciaux tout en revitalisant l'espace urbain, avec l'espoir de pérenniser ces initiatives à long terme.

Rares sont les villes moyennes à échapper à ce problème : la vacance commerciale. Conséquence des centres commerciaux qui se multiplient en périphérie, et l’explosion du e-commerce, les centres-villes se vident. Il est difficile pour les petits commerçants indépendants d’exister. En Moselle, la ville de Forbach est la ville de moins de 100 000 habitants qui affiche le taux de vacance commerciale le plus élevé de France : 25,8 %, bien au-dessus de la moyenne nationale à 13,4 %.

La dynamique commerciale est particulièrement touchée. Cela se ressent sur tout le long de l’année. Mais, pour la période des fêtes, certaines communes réfléchissent à diverses actions pour relancer l’offre de son commerce.

Propriétaires en quête de défiscalisation

Chaumont, en Haute-Marne, affiche un taux de vacance commerciale, légèrement inférieur à la moyenne nationale. "Petite" ville moyenne comptabilisant 21 699 habitants en 2024 (une ville dite moyenne possède une population comprise entre 20 000 et 100 000 habitants), Chaumont lutte depuis plusieurs années contre cette vacance et a su éviter le pire.

Camaïeu, Casa, Sergent Major, autant de grandes enseignes présentent en centre-ville, dans la même rue, qui, après leur dépôt de bilan, ont dû quitter leurs locaux, laissant à la vue de tous, de grandes cellules vides. Dans une ville comme Chaumont, cela se voit tout de suite, et difficile de trouver un successeur.

"Une grande partie de ces locaux appartient à des SCI (sociétés civiles immobilières) parisiennes. [...] Ces propriétaires appliquent des tarifs similaires au marché parisien."

Emilie Poë, manager Coeur de Ville de Chaumont

En effet, "une grande partie de ces locaux appartient à des SCI (sociétés civiles immobilières) parisiennes", explique Émilie Poë, manageur Cœur de Ville de Chaumont. Ces foncières sont propriétaires de ses bâtiments, achetés davantage comme moyen de défiscalisation avant d’être mis en location. De plus, "ces propriétaires appliquent des tarifs similaires au marché parisien. Il est impossible pour de petits commerçants indépendants de louer des locaux entre 3 000 et 5 000 euros chaque mois", poursuit Émilie Poë. Seules de grandes enseignes nationales ont les moyens. Encore que, cela devient de plus en plus compliqué pour elles aussi.

La ville de Chaumont n’a aucun moyen de pression pour forcer ces propriétaires à baisser leur prix. Il n’y a que la négociation. Alors que faire ? Surtout en cette période de fin d’année, où le commerce doit être dynamique, où le consommateur doit avoir l’offre et le choix dans son centre-ville, sinon il se tournera vers les centres commerciaux des grandes villes ou internet. Une solution à court terme fonctionne : les boutiques éphémères.

Boutique éphémère = combo gagnant !

Depuis 2017, une taxe sur les locaux vacants s’applique à tout local inexploité depuis moins de deux ans. La première année, elle s’élève à 10 %, 20 % pour la deuxième et 30 % pour la troisième. Elle saute dès lors que le propriétaire justifie que son bien a été loué au moins pendant un mois. La boutique éphémère intéresse alors.

Chaumont a très vite compris les bienfaits de ces boutiques temporaires. Elle négocie, tout en étant soutenue par la chambre de commerce et d'industrie, des prix avantageux pour y installer temporairement un commerçant désireux de développer son activité.

Dès le 1^er décembre, comme depuis plusieurs années maintenant, les boutiques éphémères ouvrent à l’approche des fêtes. Et chaque entité s’y retrouve. Chaumont dynamise son commerce, il y a une présence dans ces cellules vides, le commerçant se fait connaître, le consommateur constate une nouvelle offre : combo gagnant !

Un test viable pour le commerçant

Cette année, quatre boutiques éphémères ont ouvert à Chaumont. L’une regroupe 14 artisans de la chambre des métiers et de l’artisanat, une autre met en avant une vingtaine de producteurs de l’association pour la diversification des métiers de l’agriculture. L’Apajh (association pour adultes et jeunes handicapés) et l’Esat de Froncles proposent des meubles en bois issus de leur recyclerie. Enfin, une couturière s’est également installée.

Nelly Georgemel, présidente de l'union des commerçants locale, s’est installée après avoir tenté l’expérience de la boutique éphémère au moment de la Covid-19. Cette commerçante spécialisée dans la coutellerie était avant une adepte des foires et des marchés de Noël. "Sous mon chalet, je ne m’apercevais pas que beaucoup de clients ne prêtaient pas attention à mon activité. Ce n’est qu’une fois installée que je m’en suis rendue compte", explique-t-elle. "Le fait d’avoir une boutique, c’est un signe de confiance pour le client. Ma première année en tant que boutique éphémère, c’est simple, j’ai fait 2,5 fois mon chiffre de Noël."

Le concept de la boutique éphémère lui a ainsi permis de savoir si son activité est viable, de toucher une autre clientèle, tout en s’assurant de la pérennité de son commerce sur le long terme. Aujourd’hui, Nelly Georgemel est installée depuis trois ans.

À Émilie Poë d’ajouter : "Le concept est une excellente alternative pour les petits budgets. Les commerçants profitent ainsi du dynamisme des fêtes pour faire connaître leur marchandise. Et pour la Ville, c’est un moyen de faire découvrir les cellules commerciales disponibles qui pourraient susciter chez eux un intérêt pour leur avenir de commerçant."

Objectif final : chasser peu à peu l’éphémère pour que les commerçants s’installent définitivement.