Survivants du séisme qui a frappé la Turquie, Hulya et Turgay ont pris quelques jours de vacances à Chaumont, en Haute-Marne, auprès de leur famille qui s'est mobilisée. Un an après la catastrophe, le couple profite de cette parenthèse haut-marnaise pour tenter de se changer un peu les idées. Mais il est impossible d'oublier cette nuit du 6 février 2023, quand la terre à tremblé, provoquant la mort de 50 000 personnes.
90 secondes qui ont semblé paraître une éternité. Hulya et Turgay habitent en Turquie, plus précisément à Izkenderun, une petite ville située à l’est d’Antakya. La première a été détruite à 60 %, la seconde à plus 80 %. C'était le 6 février 2023, un tremblement de terre d’une magnitude de 7,9 sur l’échelle de Richter. Le bilan est terrible, plus de 50 000 morts.
Hulya et Turgay, y étaient. Ils ont survécu. L’heure est désormais à la reconstruction. Des mois plus tard après la catastrophe, le couple est venu se ressourcer auprès de proches à Chaumont. Une importante communauté franco-turque est installée dans la cité-préfecture du département de la Haute-Marne. Cette dernière a ainsi été directement touchée lorsque la catastrophe a eu lieu.
En effet, un commerçant du centre-ville Alex Sari a perdu son frère et sa sœur, Hatice et Günay, âgés respectivement de 23 ans et 22 ans, dans le séisme. Émus, les Chaumontais ont fait preuve de solidarité.
Un brutal retour à la réalité
Hulya et Turgay se souviennent parfaitement de cette nuit de 6 février 2023. "A Izkenderun, nous avons ressenti le tremblement vers 4h20 du matin. Les secousses étaient latérales. La terre s’est littéralement soulevée, de véritables soubresauts. Un grondement s’abat sur nous. Des bruits de verres qui se brisent, de pierres qui s’effondrent. Le seul réflexe que nous avons eu a été de s’accroupir et de placer un matelas au-dessus de nous, avant de se demander quand tout cela allait s’arrêter." (Voir Izkenderun sur la carte ci-dessous.)
Leur habitation tient toujours debout. Presque par miracle. Mais le retour à la réalité est d’autant plus brutal. Des décombres sur des kilomètres, pas d’électricité, des gens qui appellent à l’aide en pyjama en plein hiver, des cris, des pleurs, les pieds dans la neige, et surtout dans l’incertitude la plus totale quant à la situation de leurs proches. Ont-ils survécu ?
Pendant trois jours, des gens ont crié à l’aide et personne n’est venu.
Hulya, survivante du séisme
Pendant les trois jours qui ont suivi, Hulya et Turgay, ainsi que tous les Turcs survivants, ont fait "comme on a pu. Pas d’appel pour déblayer les décombres et sauver les gens se trouvant en dessous. Des routes bloquées. Il fallait entre huit et dix heures pour faire 60 kilomètres", se remémore Hulya.
Au bord des larmes, elle ajoute : "Pendant trois jours, des gens ont crié à l’aide et personne n’est venu. Quand la télévision est revenue avec l’électricité, les premières nouvelles des personnes disparues ont commencé à tomber, et on a appris qu'Antakya était presque totalement détruite". Elle avoue même éprouver de la culpabilité d’être sauve, "là où beaucoup d’autres n’ont pas eu cette chance".
Plusieurs membres de la famille n'ont toujours pas été retrouvés, dont une petite cousine de deux ans. Il est donc très difficile de faire le deuil.
Le difficile chemin de la résilience et de la reconstruction
Venir à Chaumont était un excellent moyen de s’éloigner de ce sujet obsessionnel. Où qu’ils aillent, les immeubles et les maisons sont en grande partie écroulés, et les gens ne parlent que de cette journée du 6 février, encore un an après. Encore aujourd'hui, des répliques ont lieu, bien moins fortes certes, mais suffisantes pour nourrir le sentiment de panique.
Désormais, place à la reconstruction. Qu’elle soit mentale ou logistique. Les habitants en sont conscients, il y a un besoin urgent d’un nouveau plan d’urbanisme dans cette zone de la Turquie qui se situe sur la faille est-anatolienne. Les premières constructions d'immeubles pour accueillir les sinistrés ont seulement débuté il y a quelques semaines dans la région.
Des milliers de personnes vivent dans des camps de fortunes constitués de tentes et de contenairs. La communauté turque de Chaumont a pu reccueillir des fonds en Haute-Marne pour en acheter un, et ainsi accueillir des proches d'Hulya et Turgay.
"Il faut des constructions antisismiques. Car il faut aussi être mesure désormais de conserver la richesse démographique, mais aussi culturelle de cette région de Turquie", souligne Turgay. Antakya et ses alentours sont considérés comme l’un des berceaux de l’humanité, avec près de 4 000 ans d’Histoire.