Entre excréments laissés à même le sol, meubles éventrés et loyers impayés, un couple de retraités de Haute-Marne a vu son contrat de location virer au cauchemar. Face à l'ampleur des dégâts, ils demandent réparation.
Dès qu'il approche de l'entrée de la maison, Michel Martinez ne peut s'empêcher de fondre en larmes. C'est ici, à Saucourt-sur-Rognon, près de Joinville en Haute-Marne, qu'il a grandi et que sa mère a vécu toute sa vie. Aujourd'hui, la cour est jonchée de chaises déchirées et rouillées, de gravas en tous genres, d'un vélo, d'un pneu et d'appareils électroménagers abîmés. "Après le décès de ma mère, j'avais tout refait à neuf, le chauffage central, le double vitrage, j'ai refait moi-même tous les papiers peints et les peintures, c'était impeccable... J'avais même refait l'isolation au grenier, j'y ai passé 6 mois à tout refaire. Et maintenant, tout est fichu."
Il suffit de faire quelques pas à l'intérieur avec sa compagne Marie-Josée pour s'en convaincre. Après avoir monté quelques marches, la porte d'entrée mène tout de suite à la cuisine, dans un état déplorable. À droite, un canapé et un matelas posé à même le sol sont éventrés. Au fond, le plan de travail de la cuisine est totalement dégradé et des croquettes pour chien ont été laissées par terre par dizaines. "Et encore, là, ce ne sont que des croquettes pour chien", prévient Marie-Josée.
À l'étage, les chambres dont certaines ont été visiblement occupées par des enfants sont dans le même état. Dans deux d'entre elles, on retrouve, au sol, et même sur le matelas d'un lit, des crottes de chien par dizaines. "Quand nous sommes entrés pour la première fois, on a d'abord été saisi par une odeur épouvantable. Ça sentait les crottes de chien, la pisse... C'était horrible. Il y avait aussi des puces partout, le serrurier quand il est venu pour ouvrir avait été obligé de se déshabiller dehors tellement il y avait des puces. Tout était foutu, les murs, les planchers... On en était malade."
Dans le séjour, des pierres de parement ont été arrachées d'un mur et là encore des excréments et des traces de griffes de chien semblent montrer que des animaux ont été laissés là un long moment.
Cette maison a été louée en janvier 2020 à une femme, ses trois enfants et ses chiens. "On lui avait même permis gratuitement d'emménager mi-décembre pour qu'elle puisse y passer les fêtes de fin d'année en famille", soupire Marie-José Martinez . Mais au fil des mois, la situation se dégrade. "Un jour, les voisins nous ont appelés parce que les chiens n'arrêtaient pas d'aboyer. Elle était partie une semaine en vacances et avait laissé les chiens à l'intérieur. On n'a jamais réussi à la joindre."
Plus de 8 000 euros d'impayés
Bénéficiaires d'allocations sociales, la locataire payait au début du contrat de location un reste à charge de 34 € pour un loyer total de 550 €. L'année 2020 se passe sans encombre, mais en juillet 2021, la Caisse d'Allocations Familiales a cessé de verser ses aides aux propriétaires et la locataire a également arrêté de payer sa part du loyer en septembre 2021. "Il y a eu certainement un problème entre la locataire et la CAF, en tout cas, depuis cette date, nous n'avons pas touché un centime et la dette se chiffre aujourd'hui à 8.288 €".
Après un recours en justice, Michel et Marie-Josée Martinez ont obtenu l'expulsion de leur locataire pour impayés en octobre 2022. C'est à cette date qu'ils ont découvert l'état de leur maison. "S'il n'avait été question que d'impayés, si la locataire avait eu du mal à nous payer mais qu'elle avait montré sa bonne volonté, si elle avait pris soin de la maison, on aurait pu comprendre. Mais là, c'est différent, saccager la maison comme elle l'a fait, c'est pas possible."
Des précautions à prendre pour les propriétaires
Installés aujourd'hui à Bourbonne-les-Bains, Michel et Marie-Josée Martinez ont loué cette maison pendant de longues années sans aucun problème avant d'en arriver à cette situation catastrophique. Pour Jean-Marie Viart, président de la section haut-marnaise de l'UNPI 52, la Chambre syndicale de la propriété immobilière basée à Chaumont, ce genre de cas est très rare. "Dans notre association, nous sommes saisis peut-être quatre ou cinq fois par an par nos adhérents pour des litiges, mais ça prend très rarement une telle ampleur".
La première chose est de prendre une assurance pour loyers impayés
Jean-Marie Viart, président de l'UNPI Haute-Marne, association de propriétaires
Pour lui, des précautions restent cependant offertes aux propriétaires qui voudraient éviter que leur contrat de location ne vire au cauchemar. "La première chose est de prendre une assurance pour loyers impayés. Certaines prévoient même des dédommagements pour les dégâts constatés lors de l'état des lieux. La deuxième chose, c'est quand un locataire commence à ne pas payer, il faut rapidement essayer de trouver un compromis pour qu'il quitte le logement et régler cette situation à l'amiable. Sinon il faudra engager des frais de justice et attendre des délais de plusieurs mois pour qu'une décision d'expulsion puisse être prise."
Jean-Marie Viart reste cependant pessimiste concernant le remboursement de tous les dégâts : "si le locataire n'a pas de ressources, s'il est insolvable, il ne pourra rien rembourser."
Michel et Marie-Josée Martinez espèrent maintenant que la justice interviendra en leur faveur. Leur fils a porté plainte mais aucune réponse ne leur a encore été donnée. Le procureur de la République de Chaumont a missionné une association d'aide aux victimes, mais il évoque une affaire civile et non pénale. Donc il ne peut faire grand chose de plus. Une situation difficile à vivre pour le couple de retraités.
En tous cas, pour Michel et Marie-Josée, une chose est sûre : s'ils arrivent à remettre cette maison en état, ce sera pour la vendre. Plus jamais, ils ne remettront ce bien en location.