Dans le pire des scénarios envisagés par le gouvernement, la France risque des coupures d’électricité cet hiver. Comme en Lorraine, une simulation nationale sera réalisée ce vendredi 9 décembre 2022.
La France risquerait des coupures de courant cet hiver, en particulier en raison d'un niveau de production d'électricité nucléaire au plus bas. Un exercice de préparation piloté par Enedis sera réalisé au niveau national ce vendredi 9 décembre 2022. "C’est pour éviter un black-out qu’on envisage des délestages, des coupures maîtrisées. C’est pour çà qu’on se prépare au maximum", nous répond ce mardi 6 décembre, le service de presse RTE dans le Grand Est et en Bourgogne-Franche-Comté.
"Pour l’instant il n’y a pas de perspectives de coupures annoncées, au moins pour le mois de décembre", indique Catherine Ploquin, la directrice régionale d’Enedis Lorraine qui tient à rassurer : "l’exercice du 9 décembre est une simulation. Le mot test qui a beaucoup circulé dans les médias a pu faire peur à beaucoup, mais c’est en fait un exercice interne comme on en pratique régulièrement tout au long de l’année. Il n’aura aucun impact sur les clients".
Si Enedis est le pilote de cette simulation, les décisions de possibles délestages reviennent à RTE, le réseau chargé de garantir l’équilibre entre l’offre et la demande : la production et la consommation d’électricité en France. "Un délestage n’aura lieu qu’après que RTE est épuisé toutes les autres solutions", assure le gestionnaire.
Parmi ces solutions, l’appel à la mobilisation des citoyens, des collectivités et des entreprises, pour les inciter à réduire leurs consommations électriques (écogestes). L'importation de l’énergie depuis d’autres pays (interconnexion avec les pays européens). Ou encore, la mise à contribution des grands clients industriels de RTE : "nous avons des contrats avec une dizaine de sites en France, très consommateurs d'électricité, à qui nous pouvons envoyer l'ordre d’interrompre très rapidement leurs consommations". Dernier "moyen de sauvegarde", la diminution de la tension sur le réseau de distribution. "Chez un particulier par exemple, la lumière va éclairer un tout petit moins. Ça nous fait gagner des marges", explique l’employée du service communication.
Si en dépit de tous ces moyens, le manque d’électricité reste important sur le territoire, le recours au délestage deviendrait alors inévitable.
"Où va t-on et comment va-t-on faire ?"
Comme d'autres communes de Meurthe-et-Moselle, la maire de Azerailles a reçu vendredi 2 décembre un courrier de la préfecture. "Je perçois l'inquiétude autour de moi. Moi aussi quand j'ai lu la circulaire du préfet je me suis demandée où va t-on et comment va-t-on faire ?", confie Rose Marie Falque.
Selon cette correspondance, "la liste départementale des usagers prioritaires ne subiront pas de coupures d'électricité organisées (...) les hôpitaux, les services d'urgences, certains sites des forces de sécurité intérieures, les services départementaux d'incendies et de secours, les centres pénitentiaires, des sites industriels à risque ou présentant un intérêt pour La Défense nationale". Une lettre dans laquelle il est demandé aux maires des communes de se préparer "aux répercussions d'éventuels délestages électriques", notamment en portant une attention particulière au service public de l'eau. Mme Falque explique que dans son village "on a justement un forage dont la pompe ne peut fonctionner que si elle est alimentée électriquement bien evidemment".
Autre demande des autorités, procéder à l'inscription des personnes vulnérables sur les registres des personnes fragiles et organiser un dispositif de suivi de ces personnes en cas de délestage électrique.
À Azerailles, 62 habitants nécessitent une attention particulière. "Nous sommes déjà tenus de faire un plan communal de sauvegarde car nous sommes sous la menace de la rupture du barrage de Pierre-Percée. Dans le cadre de ce plan, obligatoire pour environ 150 communes du département, on a déjà établi une liste des personnes vulnérables qui nous a d'ailleurs servi pour le covid ou la canicule. En cas de délestage donc, c'est cette même liste qui nous servira encore. On va s'adapter comme on a toujours su faire", développe l'élue, également présidente de l’association des maires et des présidents d'intercommunalités de Meurthe-et-Moselle.
N'ayant jamais eu à subir une telle situation, elle se questionne encore sur les moyens d'actions qu'elle pourrait mettre en place dans sa commune : "Je pense communiquer auprès de mes habitants. On peut imaginer une solution de repli à la salle communale, où l'on rassemblerait nos personnes fragiles et où on pourrait s'assurer que l'électricité produite par un groupe électrogène permette au chauffage de fonctionner".
Porte-à-porte chez les personnes de plus de 65 ans, mobilisation des conseillers municipaux, distribution d'eau... la maire d'Azerailles n'exclut pas d'activer également "une liste de bénévoles auxquels on sait aussi faire appel". Elle nous fait part de ces questionnements : "Je vous avoue humblement que par exemple je n'ai pas une provision de 20 ou 30 couvertures que je pourrais apporter à mes habitants au cas où il y aurait des coupures électriques de longues durées".
Les "coupures ne dureront que 2h"
Si le problème de production électrique se confirme et si la consommation ne baisse pas en période de froid, les coupures deviendraient indispensables. C’est pourquoi les professionnels se préparent à scruter avec attention les prévisions météorologiques du mois de janvier. "Etant donné l’automne et le début d’hiver très chaud auxquels on a eu le droit, on ne voit pas de risque jusqu’à fin décembre. En revanche, si on a une vague de froid un peu sévère en janvier, là ça sera beaucoup plus compliqué", avance le service de presse RTE Grand Est.
En fonction du volume d’électricité manquant, un plan de délestage sera élaboré. "On informera la population du risque de coupure trois jours avant, via le site et l’application Ecowatt », détaille l’interlocutrice. "Ça fonctionne comme une météo de l’électricité. Il y a 3 signaux. Le vert quand tout va bien, l’orange quand la situation est tendue avec très peu de marge et rouge quand on n’a plus de marge du tout. Si tout le monde ne fait pas un effort pour baisser sa consommation, on est obligés de recourir au délestage en l’annonçant 72h avant".
Des coupures localisées et non généralisées à tout le territoire qui interviendraient au moment des pics de consommation, entre 8 h et 13h, et entre 18 h et 20 h. "La veille des coupures, aux alentours de 15h, une première carte publiée sur le site d’Ecowatt indiquera les zones susceptibles d’êtres délestées. Vers 17H30, un lien permettra de rechercher si sa commune et sa rue sont concernées et à quelle heure le délestage aura lieu, car ces coupures localisées ne dureront que 2h".