Aucune officine ne devrait être ouverte en France ce jeudi 30 mai en raison d'une grève des pharmaciens. Parmi les revendications, l'importante pénurie de médicaments qui touche le pays. Témoignages dans la Marne.
Même les officines des petites communes seront fermées ce jeudi 30 mai. À Bétheniville (Marne), comme partout en France, les pharmaciens seront en grève pour protester, entre autres, contre la pénurie de médicaments sur le territoire national. Seules les pharmacies de garde seront ouvertes à partir de 20 heures.
"Cela fait plusieurs années déjà qu'on est en difficulté pour s'approvisionner, et en bout de chaîne, ce sont les patients qui en pâtissent. Il y a un vrai risque", alarme Gonzague Bouvart, pharmacien à Bétheniville. "Il y a de nombreux traitements que les patients ne trouvent plus, allant jusqu'à l'insuline, cela devient problématique et même dangereux pour certaines personnes", ajoute-t-il.
Une pénurie explicable
Comment l'expliquer ? "En France, les médicaments sont vendus moins cher ailleurs, donc on n'est plus prioritaires aux yeux des laboratoires, qui préfèrent vendre plus cher aux autres pays. On passe dix à douze heures par semaine, juste pour gérer les pénuries, à appeler les laboratoires, les grossistes et les médecins pour trouver des versions génériques des traitements manquants", synthétise-t-il.
"En France, on n'est pas en maîtrise de la matière première, qui vient surtout de Chine, d'Inde et des Etats-Unis. On n'a plus d'usines non plus", complète Pierre Kreit, président de la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France (FSPF), dans la Marne.
Un mouvement social à travers tout le pays
Alors, pour marquer le coup, le mouvement social est généralisé. "Ce n'est pas dans nos habitudes, on ne manifeste pas tous les jours. Si on le fait, c'est dans l'intérêt général et dans celui des patients. On parle d'une rupture de plus de 3 500 produits. En 40 ans de pharmacie, je n'ai jamais vu ça", précise le président de la FSPF. "Il y a 10 ans on avait déjà fait grève car le monopole de notre exercice était en danger. On a eu gain de cause, les ventes de médicaments dans les grandes surfaces n'ont pas pu se faire."
Au-delà de cette pénurie, d'autres revendications sont au cœur de ce mouvement social. Parmi elles, l'arrêt des fermetures de pharmacies, qui surchargent de travail celles encore ouvertes. "On est asphyxiés. L'année dernière, on a eu l'équivalent d'une officine fermée tous les trois jours", se désole Gonzague Bouvart. "Il n'y a pas d'argent pour les pharmaciens", souffle de son côté Pierre Kreit.
En plus de cette journée morte, diverses actions seront alors mises en place à travers le pays. "Nous allons participer à un sit-in à partir de 10 heures devant la préfecture de Châlons-en-Champagne (Marne). Il y aura des pharmaciens de la Marne, des Ardennes et de l'Aube. Les étudiants en pharmacie de Reims seront aussi présents, car il est important de se former à la pharmacie de demain : ce n'est pas le même exercice", indique Pierre Kreit. En cas d'urgence, les pharmacies de garde assureront tout de même leurs services à partir de 20 heures.