Le gouvernement doit tenter de trouver des solutions permettant de satisfaire les revendications du monde de la pomme de terre, au cours d'une visite ministérielle prévue le jeudi 27 octobre. Vincent Bournaison a détaillé auprès de France 3 Champagne-Ardenne les difficultés rencontrées dans ce secteur stratégique.
La filière de la pomme de la terre n'a pas la patate, loin s'en faut. Et l'actuelle crise énergétique ne vient rien arranger.
Les exploitantes et exploitants agricoles attendent un soutien du gouvernement Borne, lequel a envoyé au front le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau (Modem). Sa visite est prévue dans l'après-midi du jeudi 27 octobre 2022.
Le département de la Marne a été choisi en raison de l'emplacement stratégique de l'usine McCain (la plus grosse du monde), à Matougues, qui achète les tubercules des exploitations du secteur. Avant le géant de la frite, le ministre est attendu chez Vincent Bournaison, un agriculteur de Livry-Louvercy.
Sécheresse et hausse du prix de l'énergie, une fâcheuse combinaison
Ce dernier a été contacté par France 3 Champagne-Ardenne pour qu'il détaille les difficultés rencontrées par le secteur. "Ce sont nos coûts de production qui explosent avec le contexte actuel, et une forte concurrence avec d'autres cultures, plus simples à cultiver et qui demandent moins de temps et d'eau."
"La sécheresse de cette année a conduit à un affaiblissement du rendement. De l'ordre de 10% dans la région, 15 à 20% au niveau national. Car on a pas mal d'irrigation dans la région. Mais ça nous a coûté très cher avec le prix de l'énergie."
Ça nous coûte cinq fois plus cher que ce qui était prévu dans le contrat qu'on a signé il y a un an.
Vincent Bournaison, cultivateur de pommes de terre
"Un autre souci, c'est qu'on doit beaucoup stocker les pommes de terre en frigos. Avec la hausse des prix de l'électricité, ça nous coûte cinq fois plus cher que ce qui était prévu dans le contrat qu'on a signé il y a un an."
Le problème réside dans ce fameux contrat. Produire et stocker de la patate coûte aujourd'hui plus cher, mais le contrat, annuel, empêcher de l'indexer sur le prix de vente. "On n'imaginait pas ça il y a un an. Là, on est en train de renégocier les contrats... pour l'an prochain."
Une culture particulière
Cultiver la pomme de terre ne revient pas à ne planter que des tubercules sur des centaines d'hectares chaque année. En réalité, cela ne représente que 10% des cultures présentes sur les parcelles de Vincent Bournaison.
"On est obligé d'avoir des rotations assez longues. Il faut au moins cinq ans entre deux plants de pommes de terre", le temps que les sols se renouvellent. Il ne peut pas non plus planter partout puisque tous les champs ne sont pas forcément irrigables.
Il explique que sa ferme cultive 50 hectares de champs de pommes de terre, chaque hectare lui rapportant 43 tonnes de tubercules. Ceux-ci sont vendus à 180 euros la tonne. "Mais ça c'était cette année. L'année prochaine, il va falloir les vendre plus cher." Dépassant 200 euros la tonne à peu près (voir la carte ci-dessous).
Les solutions qui sont souhaitées par la profession comprennent "un bouclier tarifaire pour le prix de l'énergie : aujourd'hui, ce n'est pas le cas. On aimerait aussi une meilleure application de la loi Égalim."
Il faudrait aussi "prendre en compte qu'avec ces charges supplémentaires, on risque de perdre des marchés car les consommateurs n'auront pas les moyens. Ou risquent de se tourner vers d'autres marchés, comme les États-Unis, car le problème énergétique est surtout européen. Les autres pays sont plus compétitifs que nous."
Le ministre est donc attendu de pied ferme.