Confinement et école à la maison : des clés de l'Académie de Reims pour accompagner de la maternelle au lycée

Pour surmonter le nouveau confinement, avec l'école à distance pour les enfants et le télétravail pour les parents, deux conseillers pédagogiques de l'Académie de Reims, Christine Leroy pour les maternelles-primaires, et Francis Charligny pour les collèges - lycées vous proposent des solutions.

Christine Leroy est conseillère pédagogique départementale pour les maternelles, rattachée à l'Académie de Reims. Pour ce confinement d'avril 2021qui rappelle celui de l'année dernière, la première chose est de s'inspirer de ce qui s'est passé.
L'état des lieux du confinement de mars 2020 permet de poursuivre cette prochaine continuité pédagogique plus sereinement.

"Chaque partie, que ce soient parents ou enseignants en croyant bien faire, a surévalué les capacités des enfants" explique Christine Leroy. "Les enseignants fournissant parfois trop de travail par méconnaissance de cette situation inédite, les parents de leur côté en voulant trop bien faire se sont épuisés" précise-t-elle. "Ces situations ont alors engendré du stress, du mal-être et parfois de la violence verbale ou physique" regrette-t-elle. "Les situations de télétravail combinées à la continuité pédagogique ont rendu le travail des parents impossible et le bien-être des enfants  difficile" conclut-elle.

Autre faiblesse remontée, le manque de communication visuelle, téléphonique et même physique a laissé certains enfants dans une grande détresse affective. Cela s'est soldé parfois par des écarts qui se sont creusés, et ce, malgré les efforts de chacun, les contextes sociaux étant parfois difficiles.

Il faut créer un cadre de travail : respecter les horaires de l'école en adaptant son propre télétravail.

Christine Leroy, conseillère pédagogique

Fort de ce constat, voici quelques conseils pour les parents afin d'aborder au mieux cette semaine d'école à la maison :
"Déjà, surtout ne pas se dire, comme il n'y a que trois jours d'école, ce n'est pas grave si notre enfant ne suit pas" alerte Christine Leroy. "Les bonnes habitudes sont à prendre dès le début, pour permettre à l'enfant de poursuivre sa scolarité" explique -t-elle. "Mais, il ne faut pas se mettre une pression car l'enfant va le ressentir."

Se rendre disponible et aller dehors

"Si je devais donner quelques conseils aux parents, je leur dirais qu’un enfant dont on s’est occupé pendant une heure en étant entièrement disponible sera plus facilement en capacité de vous laisser travailler tranquillement durant 2 heures. En revanche, laisser un enfant sans attention ou accompagnement particulier durant trois heures, ce n’est pas possible pour lui, en tout cas pour les enfants de maternelle" explique la pédagogue.

"Durant cette heure où on se consacre à son ou ses enfants, il faut privilégier la nature pour les petits. Des enfants en maternelle ont besoin de bouger, de se dépenser et ne comprendront pas de voir ses deux parents télétravailler sans s'occuper de lui." Le risque est que l'enfant se retrouve encore plus qu'à l'habitude devant les portables, télévisions et autres tablettes. "Les écrans engendreront des difficultés de concentration, mais aussi des troubles d'apprentissages ou encore du sommeil" alerte Christine Leroy.

Quelques pistes pour apprendre en s'amusant dehors. "Sortez dans le parc, dans le jardin, en bas de votre immeuble ou au pied d’un arbre. Sortez pour que la nature puisse donner aux enfants le calme et la sérénité dont ils auront besoin à l’intérieur,  sortez pour qu’ils se dépensent, sortez pour prendre du plaisir avec eux" conseille-t-elle.

Apprendre dehors, c'est possible. Comment ? "En sortant tous avec un livre, enfants et adultes pour 15 minutes de lecture, partagée ou non. Les enseignants vous conseilleront de leur lire ou de leur faire lire une histoire tous les jours, discutez-en ensemble sous un arbre, quel bonheur ! Soyez à l’écoute de votre enfant durant cette heure" rajoute-t-elle.
Autres activités possibles. "Sortez pour une balade avant le travail, un grand bol d’air où l’on en profitera pour observer les petites bêtes, où l’on écoutera les oiseaux, où on l’on récitera poèmes et chansons que l’on connaît, où l’on écrira son prénom ou l’alphabet en petits cailloux, en pâquerettes trouvées dans l’herbe."


Créer en famille

" La créativité en famille pourra se traduire par de jolis mandalas naturels faits de bâtons, de cailloux et de feuilles. Bouger, marcher, c'est très important. Ne pas hésiter à prendre un ballon ou les vélos." Ces activités peuvent se faire avec toute la fratrie, ce n'est pas uniquement pour les maternelles.

Autres pistes pour des activités en intérieur. "S'il pleut, les enseignants vous fourniront aussi des activités à partager en famille, toutes les situations de la vie quotidienne" rassure la conseillère pédagogique. "La cuisine en famille, permet d'apprendre beaucoup de choses. Par exemple, faire avec ses parents ou ses grands-parents un gâteau, en portant un regard particulier pour nommer les ingrédients, les ustensiles et utiliser les mesures. On peut en profiter pour revoir les conversions pour les plus grands." Ce sont toujours des moments de plaisir partagé, des moments de langage riches d’interactions. "Utiliser des situations de vie pour continuer à apprendre : comme mettre la table, compléter la table, établir et écrire la liste des courses… Tout cela permet aux enfants de compléter leurs apprentissages et leur sera utile dans la vie", explique-t-elle.

 

Surtout ne pas insister, remettre à plus tard, laisser du temps de jeu libre, et parsemer les activités proposées selon l'emploi du temps et le télétravail

Christine Leroy, conseillère pédagogique

 

 


Faire confiance aux enseignants 

"Du côté des enseignants, le plan de travail doit essayer de tenir compte de la situation difficile liée au télétravail des parents" admet Christine Leroy. "C'est pourquoi il serait bon de privilégier, le réinvestissement et l’entraînement sur des tâches connues, pour les plus grands afin qu'ils puissent travailler en toute autonomie. Pour ces trois jours à distance, il vaudrait mieux proposer un programme modeste, que les parents pourraient investir à leur guise sur le temps qui les arrange, et que les élèves pourront rendre à leur rythme. Ainsi, ils auront trois jours plutôt que des activités programmées par jour, qui sont bien plus contraignantes pour l’enfant et pour le parent."


Pour les enseignants, il existe un parcours pour le département de la Marne. "Un travail formidable a été effectué l’année dernière autour des défis dans l’académie" rappelle Christine Leroy. "Tout ceci a été précieusement conservé comme un trésor dans un parcours magistère pour les enseignants « Assurer la continuité pédagogique ». C'est un parcours riche pour tous les cycles et dans tous les domaines qui est pour le moment largement suffisant pour y trouver les matériaux pédagogiques nécessaires sans en réinventer d’autres ". À consulter sans modération recommande la conseillère pédagogique.

Conseils pour les collégiens et les lycéens 

Francis Charligny est délégué académique à la pédagogie et il est également inspecteur pédagogique. "J'exerce une responsabilité académique sur le second degré, notamment concernant des sujets pédagogiques transversaux et interdisciplinaires comme par exemple, les 'Devoirs faits au collège', le 'Grand oral du baccalauréat 2021' ou encore la continuité pédagogique. Outre la fonction de conseiller du recteur, je suis amené à coordonner l'action de mes collègues inspecteurs disciplinaires et cette crise sanitaire nous préoccupe beaucoup et nous mettons tout en oeuvre pour accompagner nos élèves, les parents mais aussi nos enseignants" précise Francis Charligny.

Quels conseils donnez-vous aux parents, d'autant qu'ils vont télétravailler également ?

Lorsque tous les membres de la famille vont cohabiter sous le même toît du matin au soir, il est nécessaire que chacun puisse s’isoler pour travailler et que les enfants se sentent bien là où ils pourront le faire. La communauté éducative est bien consciente que les situations sont diverses et plus compliquées pour certains jeunes. De façon générale, cela pourra conduire à organiser en commun la journée en fonction des contraintes de chacun. Si les enfants ont besoin de l’aide de leurs parents pour réaliser leur travail scolaire, des temps peuvent être définis. Cela obligera les enfants à différer l’obtention de cette aide, mais cette capacité à le faire est aussi une qualité importante pour leur futur.

Faut-il garder le même rythme et respecter l'emploi du temps des élèves ?

La situation exceptionnelle conduit naturellement à imaginer un rythme et un emploi du temps adaptés. Le travail scolaire demandé par les professeurs sera pensé en prenant en compte les contraintes de la scolarité à la maison. Un courrier de leurs inspecteurs pédagogiques a été adressé aux professeurs des collèges et des lycées pour leur transmettre des préconisations. Il indique que les professeurs d’une même classe doivent définir un emploi du temps adapté à l’enseignement à distance, en limitant le nombre de matières à travailler chaque jour et en quantifiant le temps à consacrer à chacune d’elles.

 

L'autonomie n'est pas la même pour un élève de 6e et un élève en terminale, alors comment les accompagner ?

Effectivement, l’autonomie est essentielle pour qu’un enseignement à distance s’opère de façon satisfaisante. Les professeurs ont l’habitude de prendre en compte l’âge de leurs élèves pour leur proposer un travail scolaire adapté. Si des ajustements sont nécessaires, comme cela a été le cas au printemps 2020, les professeurs les apporteront car ils seront quotidiennement à l’écoute de leurs élèves. Si nécessaire, ils ajusteront leurs consignes et leurs pratiques. Les élèves ne doivent pas hésiter à indiquer à leurs professeurs les difficultés qu’ils rencontrent.

 

Doit-on faire confiance aux enfants pour qu'ils travaillent en toute en autonomie ? Autrement dit, ne pas être sur leur dos?

La confiance est toujours le meilleur choix et elle est essentielle à la construction de chaque individu. Pendant la période de continuité pédagogique à distance du printemps 2020, cette autonomie a conduit des élèves à trouver des solutions qui leur étaient particulièrement adaptées. Certaines ont été retenues par les professeurs pour tous leurs élèves. Là encore, le dialogue entre les professeurs et les élèves est essentiel.

Entre week-end de Pâques et les vacances avancées qui arrivent, les parents comme les enfants ne risquent pas de décrocher sur ces 4 jours ?

Un principe important est de bien dissocier les temps scolaires où l’enseignement sera dispensé à distance et dont l’objectif principal pour les élèves est d’apprendre, des deux semaines de vacances de printemps où l’objectif est de se reposer et de se divertir. Ce principe est celui de toute année scolaire. Il peut judicieusement être rappelé aux jeunes. La semaine prochaine comme la semaine qui suivra les vacances de printemps sont de vraies semaines d’École.

 

Faut-il garder le rythme, car après les vacances le télé-enseignement reprend et ce n’est pas dit que cela n'aille pas au-delà ?

Quel que puisse être l’éventuel prolongement de la période d’enseignement à distance, il est important que la semaine prochaine trouve une organisation qui pourrait perdurer. C’est une condition pour obtenir un meilleur apprentissage. Pour ce qui est de cette organisation, quelques principes peuvent être avancés : mettre en place des rituels quotidiens comme se lever chaque matin à heures fixes ; organiser la journée en prévoyant des créneaux pour travailler et quelle matière travailler dans chaque créneau, le matin et l’après-midi, et d’autres pour se détendre ou faire ce qu’on souhaite…
Pour un élève, dans une journée de travail scolaire à distance, il est essentiel de « se donner des rendez-vous pour travailler ». Si on ne parvient pas à réaliser un travail et qu’on ne peut pas être aidé à la maison, il est préférable de changer de matière et de revenir plus tard sur l’exercice qui nous a posé des difficultés. Les professeurs ont été invités à proposer à leurs élèves un plan de travail quotidien où les durées à consacrer à chaque matière sont quantifiées.

 

Comment éviter que les enfants restent trop longtemps devant les écrans ?

L’enseignement à distance ne signifie pas réaliser l’intégralité de son travail scolaire devant son écran. Pour la grande majorité des collégiens et des lycéens, les professeurs communiqueront avec eux via l’espace numérique de travail (ENT) où à l’occasion de classes virtuelles. Les enseignants ont cependant été invités à intégrer au travail sur écran des exercices sur papier. Ils peuvent représenter un temps de travail relativement important dans une journée d’enseignement à distance. Pour rendre à son professeur un travail de ce type et qu’il puisse en donner une appréciation, l’élève peut par exemple prendre en photo sa copie et ainsi le transmettre.


Comment rassurer, accompagner et éviter un décrochage ?

Garder le contact avec l’école pendant ces périodes d’enseignement à distance est une préoccupation première des équipes pédagogiques et des chefs d’établissement. Jeudi 1 er avril, lorsqu’il s’est adressé aux chefs d’établissement, le recteur Brandouy a demandé qu’un contact quotidien soit établi avec chaque élève, soit à l’occasion de classes virtuelles, mais aussi par d’autres moyens comme un appel téléphonique. Ces contacts sont essentiels pour prendre le point de vue des élèves sur leur scolarité à distance, mais aussi pour entendre leurs difficultés personnelles et ainsi maintenir leur persévérance scolaire.

Est-ce que le troisième trimestre est compromis pour certains ?

Sans entrer dans des explications qui ne seraient compréhensibles que par des experts, l’apprentissage n’est pas une accumulation linéaire de connaissances. Les contraintes de l’enseignement à distance font aussi émerger des pratiques pédagogiques très pertinentes qui permettent aux élèves de bien apprendre. Par exemple, le travail à distance peut aussi être l’occasion d’organiser des coopérations entre élèves facilitées par les outils numériques. On peut aussi noter que davantage de professeurs ont demandé à leurs élèves des enregistrements oraux pour rendre compte de leur travail scolaire à la maison.

 

Ne craignez-vous pas que les connexions rament et qu'il existe toujours cette fracture numérique dans certains foyers ? Allez-vous vous y remédier ?

La fracture numérique est un vrai problème. Contrairement au printemps 2020, des solutions seront possibles comme, pour les parents ou pour l’élève, de se rendre au collège pour venir chercher des documents. D’autres solutions seront proposées aux élèves concernés afin de trouver la solution la plus adaptée à chacun.

 

Le 1er confinement a apporté des leçons ? Lesquels et qu'est-ce que les enseignants proposent pour y remédier d'autant qu'eux-mêmes ont la charge de leur propre enfant ?

En effet, nous avons appris du premier confinement. Une meilleure prise en compte du point de vue des élèves, que certains professeurs avaient réalisée avec leurs propres enfants lors du 1 er confinement, est essentielle. Les professeurs ont aussi mieux pris conscience de la nécessité d’harmoniser certaines de leurs pratiques, notamment pour communiquer avec leurs élèves via les outils numériques. À titre individuel, des professeurs ont développé leur maîtrise de ces outils et sont beaucoup mieux armés qu’il y a un an. La solidarité entre professeurs pour que ceux qui ont le plus de contraintes personnelles puissent être aidés par leurs collègues doit aussi être remarquée.

 

Craignez-vous comme les enseignants que les retards accumulés par le 1er confinement se creusent encore plus ou qu'il n'est jamais trop tard pour combler des lacunes et/ou récupérer un élève décrocheur?

Les circonstances sont ce qu’elles sont. Ce qui est certain, c’est que la communauté éducative reste mobilisée pour que chaque élève progresse au mieux. Comme l’indique la question, il n’est jamais trop tard pour « combler ses lacunes ». La priorité est d’éviter le décrochage qui rendrait les choses plus compliquées et qu’il n’y ait pas de temps perdu. Les contraintes actuelles peuvent aussi être la source de nouvelles perspectives. Les jeunes doivent être convaincus que les adultes sont mobilisés pour leur construire un avenir leur permettra de réaliser leurs projets.

A compter du mardi 6 avril, France Télévisions mobilise ses médias dédiés à la jeunesse et à l'éducation pour soutenir l'effort de continuité pédagogique auprès des élèves, des enseignants et des familles. France 4, chaîne jeunesse, bouleverse sa programmation; des cours filmés pour les primaires et les collégiens en journée pour l'école à la maison et des vacances apprenantes lors de la pause de printemps. Le site éducatif de l'audiovisuel public, Lumni.fr, renforce quant à lui son offre de contenus pour aider les élèves de tous niveaux. Les élèves de troisième et les lycéens se voient proposer une offre dédiée aux révisions des examens de fin d'année scolaire. Tous ces programmes sont identifiables à l'antenne grâce au label  « Nation Apprenante » du ministère de l’Education nationale et de la Jeunesse et des Sports, afin d'accompagner les élèves, enseignants et familles dans le cadre de la continuité pédagogique.

 

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