Marne : le député Charles De Courson fait-il un cadeau fiscal au fabricant de cigarettes Philip Morris ?

Le fabricant de cigarettes Philip Morris a-t-il bénéficié d'un cadeau fiscal ? Le député centriste de la 5e circonscription de la Marne, Charles De Courson, a déposé un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il serait taillé sur mesure pour l’entreprise américaine selon une association anti-tabac. Le député s’en défend.

"Il est temps que les pouvoirs publics et le gouvernement prennent leurs responsabilités en matière de lutte contre le tabagisme". Les mots du Comité national contre le tabagisme sont durs. Un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) a été déposé à la dernière minute par plusieurs députés, dont le centriste Charles De Courson, dans la cinquième circonscription de la Marne. Cet amendement limite les taxes sur le tabac à chauffer, que seul Philip Morris commercialise en France, avec sa marque Heets.

Moins nocif donc moins taxé ?

Le tabac à chauffer, commercialisé depuis 2014, se présente sous la forme de mini-cigarettes, à insérer dans un dispositif chauffant qui libère un aérosol contenant de la nicotine.

Selon un rapport de la Commission européenne, ses ventes ont explosé en Europe, et surtout en France (+406% entre 2018 et 2020). Un succès dû notamment à un argument commercial de poids des fabricants de cigarettes : le tabac à chauffer serait moins toxique que la cigarette classique. Ils parlent d’une « cigarette légère ».

C’est cet argument qui a conduit Charles De Courson, député centriste de la cinquième circonscription de la Marne, à déposer son amendement, pour alléger les taxes sur le tabac à chauffer.

Comme le disent beaucoup de médecins, le tabac à chauffer est un moindre mal, par rapport à la cigarette classique. Si c’est un moindre mal, il faut moins taxer, pour inciter les fumeurs à basculer de la consommation de tabac classique vers le tabac à chauffer.

Charles De Courson, député centriste de la 5e circonscription de la Marne

Une justification qui ne tient pas, selon le Comité national contre le tabagisme. L'association dit s'appuyer sur plusieurs études scientifiques indépendantes, qui montrent que le tabac à chauffer serait tout aussi dangereux pour la santé que la cigarette classique. En 2017, des chercheurs de Lausanne (Suisse) y ont noté la présence de plusieurs composés toxiques. La concentration en acénaphtène (substance irritante majeure de la fumée de tabac) dépasserait même de 175% celle de la cigarette classique.

Un cadeau fiscal ?

Jusqu'ici, le tabac à chauffer était dans "un fourre-tout fiscal" selon Charles De Courson. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2023 devait créer une catégorie claire et définie. 

Cet amendement prévoit notamment une taxation en fonction du poids. Une hérésie selon le Comité national contre le tabagisme : "pour réduire la pression fiscale sur son produit, il suffira à Philip Morris de revoir à la baisse le grammage des sticks", écrit l'association dans un communiqué. 

Selon ses calculs, l'Etat ne percevrait plus que 4,64 euros sur un paquet de Heets (marque de tabac à chauffer du fabricant Philip Morris), contre 6,3 euros dans la première version du projet de loi.

Charles De Courson se défend de tout cadeau fiscal pour l'entreprise américaine Philip Morris. Taxer au poids permettrait juste de répondre au modèle économique de la marque Heets, qui fonctionne avec un système de recharge.

Comme tous les lobbies à l'Assemblée Nationale, Philip Morris écrit aux parlementaires, soulève des questions et propose des solutions. C'est le jeu des lobbies, ça n'a rien de nouveau. Ce débat ne consiste toutefois pas à défendre les intérêts des cigarettiers, mais bien ceux de la santé publique.

Charles De Courson, député centriste de la cinquième circonscription de la Marne

Mercredi, le gouvernement d'Elisabeth Borne a de nouveau dégainé l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, pour adopter directement le texte de loi sans vote. Sur les 244 amendements adoptés lors des 55 heures consacrées à l’examen du PLF, 117 ont été conservés par l’exécutif, dont selon de Charles De Courson.

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