Coronavirus : privées de leur chocolaterie, des soeurs se cloîtrent dans le silence, la solitude et la prière

A l'abbaye cistercienne du Val d'Igny, à Arcis-le-Ponsart près de Reims (Marne), on prie et on fait des chocolats. Mais, sans possibilité de les distribuer, les moniales, enfermées dans leur monastère, vivent une Semaine sainte pas tout à fait comme les autres.

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Au monastère cistérien Notre-Dame du Val d'Igny (Marne), les journées s’articulent habituellement autour du travail et des prières. Pour le travail, il faudra attendre la fin du confinement. La chocolaterie qui fait vivre ce lieu est à l'arrêt. "La boutique est fermée, nos portes sont fermées au monde extérieur pour nous protéger du virus, seuls nos repas nous sont livrés", explique mère Isabelle Valez, la première abbesse de la communauté cistercienne qui regroupe 42 moniales (religieuses).

La chocolaterie c’est notre gagne-pain, en particulier avec le fameux Bouchon d’Igny mais la production est arrêtée,une perte de 60.000 euros
- Sœur Madeleine, l’économe du monastère
 

Une histoire d'amour avec le chocolat qui remonte à la fin du XIXe siècle, lorsqu'à l'époque les moines recevaient de la fève de la cacao qu'ils transformaient en chocolat pour en faire des tablettes. Un outil de communication voire d'évangélisation puisqu'une petite image pieuse (une prière, la vie d'un saint etc) était glissée dans chaque tablette. La chocolaterie va s'arrêter entre 1918 et 1961. A cette période, le monastère a été dynamité par l'armée allemande, il sera reconstruit mais la communauté ne pouvant être reprise par des frères, ce sont des moniales venues de Laval qui s'y installeront à partir de 1929. Ce sont elles qui, par tradition, reprendront l'activité, créant ce chocolat en forme de bouchon qui fait aujourd'hui le bonheur des gourmands.

 

"Plus question d’accueillir des personnes désireuses de faire une retraite ici comme c’est possible d’ordinaire, l’hôtellerie est fermée, développe mère Isabelle Valez. Mais beaucoup de gens prennent de nos nouvelles et nous demandent des intentions de prière, ça nous touche, heureusement personne n’est malade. L’église est également fermée au public mais un prêtre résident sert encore la messe pour la communauté. Economiquement, c’est compliqué. La vente de chocolats s’est effondrée et le confinement nous a obligé à mettre en chômage partiel trois employés : un chocolatier, une vendeuse et un agent d’entretien. »

 
 

« Un plongeon en arrière de 50 ans » 

"C’est un temps pour vivre le carême, une grande retraite, comme avant où nous n’avions pas toutes ces activités. C’est contraignant de ne pas sortir mais il faut soutenir la communauté, trouver l’équilibre, se recentrer sur ce pourquoi on est là, renforcer notre foi en Dieu  et c’est bien. Autour de nous, c’est bien plus dur et plus grave avec toutes ces personnes malades ou décédées du covid-19. Nous prions pour elles. Ce temps retrouvé conduit à une liberté intérieure, de prière et de contemplation."

 


Sœur Madeleine est l’économe du monastère. Entre autres choses, elle assure le suivi de la fabrication des chocolats et gère les stocks de la chocolaterie : "C’est un gros manque à gagner, surtout en cette période de Pâques où nous assurons l’essentiel de nos ventes avec Noël. On produit cinq tonnes de chocolat par an, mais la moitié de la production va nous rester sur les bras, une perte d’environ 60.000 euros. Et même s’il est toujours possible de commander sur notre site internet, ce sont des ressources pour la communauté qui s’envolent", explique-t-elle.
 


Car le problème, c'est la distribution de ses gourmandises. "Les gens ne peuvent pas venir à la boutique et notre réseau de vente ATC (Aide au Travail des Cloîtres) a fermé et du coup annulé les commandes. De plus, c’est un peu compliqué de livrer à domicile. Nous faisons appel à La Poste mais qui ne fonctionne que trois jours par semaine ou sinon à un transporteur privé. Heureusement qu’avant le confinement nous avions pu vendre une certaine quantité de chocolats à nos clients fidèles. Et puis, des particuliers passent toujours commande pour nous soutenir même si les chocolats seront livrés bien après Pâques", explique soeur Madeleine.

C’est une vie monastique d’autrefois. Moi ça ne me dérange pas. Il y a plus grave. Il faut relativiser. Dieu reste présent, notre foi est encore plus grande. Cette situation qui nourrit notre réflexion ne va pas durer. Nous restons en communion. 
- Soeur Madeleine, économe du monastère
 


Après le confinement, une quatrième résurrection pour l'abbaye ?

Pâques approche, la fête religieuse la plus importante pour les chrétiens car elle célèbre la résurrection de Jésus-Christ. Une résurrection attendue ici et qui ne fait nul doute : l’abbaye Notre-Dame d’Igny, fondée en 1127 par des moines venus de Clairvaux a déjà connu trois renaissances suite à trois destructions. 
 

 

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