Coronavirus : le témoignage de deux étudiants infirmiers mobilisés

Réquisitionnés pendant la crise sanitaire, les étudiants infirmiers ont vécu la crise de l'intérieur. Une crise qui était pour certains leur première expérience du terrain. Témoignages de deux étudiants à l'Institut de formation en soins infirmiers de Reims.

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Pour beaucoup d’étudiants en IFSI (Instituts de Formation en Soins Infirmiers), l’épidémie de covid19 est un test grandeur nature. Ils sont confrontés, certains depuis le 15 mars, à une situation à caractère exceptionnel. L’alternance étant un des piliers de leur formation, ils ont pour la plupart accepté d'aller sur le terrain, dans le cadre du plan blanc, pour valider leur temps de stage. Au sein d'une unité covid, dans les services de réanimation, en Ehpad, aux urgences, les étudiants en soins infirmiers sont affectés ou réaffectés en fonction des besoins.

Elsa, 21 ans,  est en deuxième année à l’IFSI de Reims. Elle vient d’achever un mois de garde de nuit.  Appelée le 18 avril dernier, elle été affectée dans un EHPAD du centre de Reims, pour renforcer les équipes. "Onze heures de garde la nuit, pendant un mois, c'est long. La nuit, on fait surtout du nursing. J’ai eu la chance, d’être dans des équipes compréhensives et qui m’ont soutenue."

En Ehpad, les infirmier(ères) ne travaillent pas la nuit. Elsa n’a donc pas eu la possibilité de toucher à l’aspect technique de son métier: les suivis thérapeutiques, les pansements, les traitements, le travail en collaboration avec les soignants, le kinésithérapeute, le psychologue, ou encore l’ergothérapeute. "Tout cela sera possible quand je travaillerai de jour."
 

Une crise qui a conforté Elsa dans son choix

Il n’empêche. Un mois de gardes de nuit lui ont permis de développer l’autre facette du métier d’infirmière: le rapport à l’humain. "Cela été possible grâce à ces rituels qui ponctuent les nuits en Ehpad. L’accompagnement au coucher; veiller à ce que les résidents soient confortablement installés. Avec certains d’entre eux, c’était l’occasion d’échanger autour d’une collation, de les rassurer aussi. Car la nuit peut être anxiogène, en particulier pour ceux qui présentent des troubles cognitifs."

Les moments les plus difficiles sont ceux qu’il a fallu gérer pour remonter un moral en berne chez certains résidents. Privés de visites, éloigné de leurs amis, certains ont parfois développé un syndrome de glissement : en d’autres termes, ils se laissent aller. L’urgence a donc été de rétablir ces contacts par des appels téléphoniques, ou vidéo. Mais c’est d’autant plus dur quand la situation s’installe dans la durée.

D’ordinaire, tous ces gestes, ce rôle d’accompagnant, ce sont les aides-soignants qui les accomplissent. Mais tout étudiant de deuxième ou de troisième année, en a la qualification. Ce moment de crise sanitaire a conforté Elsa dans son choix. Elle ira jusqu’au bout, jusqu’au diplôme.

Quentin Checchi, lui, est étudiant en troisième année de soins infirmiers. Lorsque l’état d’urgence sanitaire a été décrété, il achevait un stage de quatre semaines aux urgences psychiatriques du CHU de Reims. Son rôle, évaluer et s'occuper des patients pour une éventuelle hospitalisation. Le 22 mars, son stage terminé, Quentin a d’abord été prié de rester chez lui, "pour m'éviter de prendre des risques sur le terrain. La situation, à ce moment-là, était très floue. On discutait beaucoup, à l’IFSI, d’une éventuelle réquisition des étudiants infirmiers."
 
 

"J’ai senti qu’on avait besoin de moi"

Deux semaines de confinement, puis retour sur le terrain pour un stage avancé dans un service d’urgence , dans les Ardennes. "Tout y a été réorganisé pour recevoir une partie entièrement dédiée au covid. Je faisais partie intégrante du service. J’ai senti qu’on avait besoin de moi. Et puis l’équipe était assez encadrante pour me laisser faire des actes. J’ai compris qu’être infirmier, c’est devoir s’adapter et faire le travail, quelqu’il soit."

Le département, quoique préparé à l'éventualité, n’a pas connu le flot ininterrompu des hospitalisations comme en Alsace, ou même dans la Marne voisine. Quentin n’a pas été au-delà des 35 heures de travail hebdomadaire. "Durant cette période, un peu particulière, j'ai appris à me canaliser; à rester maître de moi-même. J’ai eu la chance de travailler."
 

"La fin est quand même brutale"

En pleine épidémie, employés comme des soignants à part entière, les étudiants en soins infirmiers du Grand Est, montent au créneau. A travail égal, horaires similaires, ils réclament un traitement équitable. Ils obtiennent, finalement, de la Région, d’être indemnisés à hauteur des heures effectuées. "Pour nous, c’est fait. Mais dans certains départements, ils n’ont toujours pas obtenu gain de cause." 

Entre le 5 juin prochain, date de la fin de son stage et le 23 juillet, date officielle de la remise des diplômes, Quentin ne retournera pas sur les bancs de l’institut. Les conditions sanitaires ne le permettent pas pour l’instant. Mais il a du pain sur la planche. Un mémoire à achever. "On est pour l’instant dans le flou pour l’après 5 juin. Ils ont essayé des choses pour les cours virtuels, mais rien n’est arrêté. Le dernier mois sera un peu léger mais la fin est quand même brutale."
 
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