Certains piaffaient d'impatience. A Reims, un salon a ouvert ses portes aux premières minutes du déconfinement. Succès assuré. Le carnet de rendez-vous est complet pour trois semaines.
"Bon ben ça y est les amis. C'est reparti. Il est minuit trente, on va commencer une nouvelle ère." C’est par ces mots et le visage paré du masque incontournable que Jérémy Fremaux, qui tient un salon de coiffure Le Salon Par Jérémy, rue Clovis à Reims, commence une vidéo qu’il a postée sur Facebook dans la nuit, avant de commencer un marathon de 21h."Il n’y a pas eu de cohue et chacun a respecté les règles", se réjouit le coiffeur. Lui qui était sur le pied de guerre à minuit précise, ce lundi 11 mai, pour faire entrer à 0h30 les premiers clients. "C’était une drôle d’ambiance", reconnaît l’artisan, tandis qu’il faisait nuit noire à l’extérieur. Pour les clients déjà, pour qui c’était la vraie première sortie.
Tous ceux qui se sont présentés cette nuit étaient sur rendez-vous, "à raison d’un par demi-heure de façon aussi à respecter les règles sanitaires."
Mais alors quels sont ceux qui ont mis leur réveil pour être là dès minuit ? "Des clients habitués" confie le coiffeur rémois. Pas des originaux en recherche d’expériences post-confinement ou à la recherche de la gloire, non rien de tout cela. "Des gens qui travaillent tôt le matin et qui ont enchaîné coupe au salon de coiffure et boulot."
Même pas le temps de manger
D’ailleurs l’ouverture nocturne pour les clients présents dans ce chic salon du centre de Reims baignée par un beau soleil, c’est un peu le sujet de conversation en ce début d’après-midi. A l’intérieur, pas plus de quatre clients à la fois, tous masqués, c’est la règle. On devine des sourires derrière les masques. Il faut savourer ce premier jour de liberté.Adeline, à qui Jérémy fait une couleur, estime que c’est courageux d’avoir ouvert cette nuit, elle qui explique que c’est sa première sortie et que ça fait du bien de venir ici. Le patron, lui, est au beau milieu d'un marathon en ce lundi. "J’ai commencé à minuit et je me prépare à coiffer jusque 21h." Et de répondre en faisant la moue, à la demande de Vincent, un de ses fidèles clients qui s'inquiète de savoir s'il a mangé : " non, je n’ai pas eu le temps".
Jérémy a deux coiffeuses pour travailler à ses côtés dans ce salon qui reçoit les hommes comme les femmes. "Mais à minuit, j’étais seul à coiffer. Les coiffeuses ont pris leur poste à 9h."
Marina, l’une d’elles, raconte d’ailleurs son retour au salon après deux mois d’absence. "Non sans une certaine crainte", reconnaît la jeune coiffeuse, qui travaille ici depuis près de quatre ans, mais qui a très vite été rassurée par le dispositif sanitaire et la bonne attitude des clients.
Contraint de remonter le temps face à la demande
Installé à Reims, rue Clovis, depuis cinq ans et demi, Jérémy Fremaux, lui, n’a donc pas attendu le déconfinement pour organiser la réouverture. "Les clients qui devaient venir avant la fermeture ont reporté leur rendez-vous mais là mon carnet est plein pour trois semaines."Impossible d’ailleurs de répondre à la demande, un répondeur a été mis en place. Quant à l’idée d’ouvrir à minuit ? "Au début, explique-t-il ce devait être 9h." Puis, face à la demande, il a remonté le temps pour décider cette ouverture atypique." Il confie pourtant que cela ne peut être que temporaire ne serait-ce déjà que vis-à-vis du droit du travail. Pour le moment, ses employés sont rétribués selon le système des heures supplémentaires.
La partie cachée du salon, en mode post-confinement, ce n’est pas seulement l’accueil des clients, c’est aussi tout le reste : le côté sanitaire, lavage des instruments, blouse etc. "Tout est nettoyé et désinfecté entre chaque client."
Un employé supplémentaire a d’ailleurs été recruté pour la partie nettoyage. Tout cela a un coût mais pas question de le répercuter sur la clientèle explique Jérémy. "Le nettoyage, la mise à disposition du gel, tout cela représente un investissement de 1000 €."
Quant à la fermeture du salon pendant deux mois, c’est 20.000 € de chiffre d’affaires en moins pour cet artisan qui, en augmentant la plage des horaires d’ouverture dont celle de lundi à minuit, espère limiter la casse. D'ailleurs quelques salons de coiffure rémois postent des vidéos pour rassurer et faire revenir des clients inquiets et tentés de bouder les lieux.
Du côté du Salon Par Jérémy, la journée marathon se poursuit donc. A l’extérieur il reste un tapis rouge comme pour souhaiter la bienvenue aux clients. Le salon ne devrait pas désemplir avant de longues semaines.