Bien connues des adolescents et des jeunes adultes, les cigarettes électroniques jetables devraient être interdites à la vente suite à l'adoption d'un projet de loi par les députés le lundi 4 décembre. Une mesure qui a pour but de protéger les mineurs et l'environnement, mais dont l'efficacité ne convainc ni buralistes, ni consommateurs, ni médecins.
C’est un phénomène de mode qui pourrait partir en fumée. Ce lundi 4 décembre, l'Assemblée nationale a adopté à l’unanimité un projet de loi visant à interdire la vente de cigarettes électroniques jetables, à l’image des Puffs, vapoteuses jetables aux designs colorés très en vogue chez les adolescents et jeunes adultes. Une interdiction qui pourrait ne pas changer grand-chose selon les consommateurs, buralistes et médecins.
"Le jeune qui veut vraiment fumer, il va acheter des cigarettes devant son lycée, à des amis, aux frontières ou sous le manteau sur des marchés parallèles. C'est malheureux, mais c'est comme ça", avance un buraliste proche du quartier Europe à Reims (Marne) qui tient à rester anonyme.
Derrière ce projet de loi, deux motifs majeurs d'interdiction : l'aspect écologique, du fait de la pollution engendrée par ces objets non recyclables, et le fait que ces produits peuvent constituer une entrée vers le tabagisme pour de nombreux jeunes.
"Je suis favorable à la protection des mineurs, mais le débat n'est pas là"
"Je suis toujours favorable à la protection des mineurs, même chose pour l'écologie. Mais le vrai débat n'est pas là", poursuit le buraliste, qui rappelle que les puffs, même sans nicotine, étaient déjà interdites à la vente aux mineurs.
"Il ne faut pas oublier que les vapoteuses sont une alternative intéressante au tabac dans une période de sevrage. Moi, j'ai beaucoup de jeunes adultes qui venaient en acheter pour éviter de fumer du tabac en soirée", tempère-t-il.
Le problème, c'est que pour beaucoup, à travers un phénomène de mode, "la puff peut constituer une entrée vers le tabagisme, là où les cigarettes électroniques ont pour but d'être une alternative pour justement en sortir", synthétise le tabacologue Rémi Vannobel.
Pas sûr pour autant qu'une interdiction à la vente ait un impact sur les consommateurs, selon le médecin "cela fait plus de 60 ans que l'industrie trouve des moyens de détourner les lois. Là, on parle des cigarettes électroniques non rechargeables. Il suffirait de faire des puffs rechargeables pour contourner cette interdiction".
"Il y aura toujours un dérivé"
Aux alentours du lycée Clémenceau à Reims, c'est pourtant un des points qui rendait le produit attirant : "on n'a pas à recharger, à changer de liquide ou je ne sais pas quoi. On choisit le goût et c'est tout", relate Léna, élève de terminale. Que fera-t-elle si les puffs deviennent introuvables ? "Il y aura toujours un dérivé qui rentre dans les clous, enfin j'espère. Au pire, on passera à la cigarette électronique classique. Tant pis pour le côté pratique et pas cher", s'amuse la lycéenne, qui les achète "pour à peu près un mois" à 8,90 euros.
Benoît, consommateur de 19 ans, est loin d'être attristé par la nouvelle : "je n'en prenais qu'en soirée, pour fumer moins de cigarettes quand je bois. Mais je pense qu'on pourra toujours en trouver ou que des versions non jetables arriveront. Il n'y a qu'à prendre l'exemple du cannabis. Même strictement illégal, ce n'est pas très compliqué d'en trouver".
Alors, pour éviter la création de marchés parallèles, de nombreux buralistes prônent "une uniformisation de la fiscalité sur l'industrie du tabac à l'échelle européenne". Mitigé comme beaucoup sur la question, le buraliste proche du quartier Europe conclut : "La protection des mineurs et de l'environnement, nous serons toujours pour. Mais le vrai débat est plus haut. Les choses ne se régleront pas avec l'interdiction à la vente d'un produit".