Ils sont environ 500 agriculteurs en colère, ce jeudi 13 février, à Reims, venus pour dire leur solidarité avec un agriculteur d'Ambrières en détention provisoire pour avoir tiré sur un voleur de carburant. La justice doit se prononcer aujourd'hui sur son dossier.
Le rendez-vous était donné à 8h30, chaussée Bocquaine à Reims, près du stade Delaune. A l'appel de la FDSEA, 500 agriculteurs veulent faire entendre leur colère. Ils soutiennent Jean-Louis Leroux, un de leur collègues qui s'est fait voler du carburant à Ambrières dans la Marne, le 1er février 2020. Celui-ci avait tiré sur un membre de la communauté des gens du voyage, en train de siphonner un réservoir. Le blessant grièvement.
Depuis, cet agriculteur marnais est en détention provisoire, il a été mis en examen pour tentative de meurtre. Une audience doit statuer son son cas ce jeudi 13 février. Son avocat demande sa libération. Il estime que son client dénonce depuis des mois les vols de carburants sur son exploitation sur laquelle il a installé des systèmes de détection. Selon lui, il a déposé 4 plaintes depuis le début de l’année et se serait fait voler au total 7.000 litres de carburants. Son avocat affirme enfin qu’il n’y avait pas l’intention de donner la mort car il a appelé au préalable les gendarmes. Point important, car cela qualifiera l’acte devant la justice et évaluera la peine car pour le procureur un vol n’autorise personne à sortir une arme et tirer.
C'est une marche de soutien mais aussi une marche de la ruralité. Beaucoup se reconaissent dans le cas de Jean-Louis avec l'insécurité grandissante et les vols à répétition qu'ils subissent.
- Hervé Lapie, président de la FDSEA de la Marne.
Le syndicat FDSEA organise cette marche avec les JA, les jeunes agriculteurs. "Tout le monde a l'impression que ça pourrait aussi lui arriver," explique Hervé Lapie, le président marnais, "on veut interpeller les pouvoirs publics pour retrouver de l'accompagnement. On ressent cette insécurité dans les territoires ruraux. Jean-Louis a subi 40 vols, il a porté plainte à chaque fois il ne s'est rien passé." Hervé Lapie n'a, lui non plus, pas été épargné : "j'ai été victime du vol de mes cochons une quinzaine de fois."
On pénètre dans nos espaces privés, c'est violent, sans parler du préjudice économique. C'est inadmissible !"
- Hervé Lapie, président de la FDSEA de la Marne
Témoignages
Les agriculteurs sont venus de toute la région. Comme Albin Martino. Il est vigneron à Bar-sur-Aube. "Le problème, c'est qu'au bout d'un moment, on est excédé. Les personnes qui cumulent les vols finissent par perdre le contrôle. Je me suis fait voler pour 40.000 euros de matériel. Mon alarme n'avait pas sonné mais je pense que c'est préférable, je ne sais pas ce que j'aurais fait ..." Et les témoignages qui vont dans le mêmes sens sont nombreux dans le cortège. "Non, on n'excuse pas le coup de feu, mais on le comprend," ajoute un autre exploitant.Béatrice Muzy est également dans le cortège. Elle est professeur mais son mari est éleveur de porcs et de bovins à la retraite à Montcornet dans l'Aisne. Eux aussi avaient été victimes de graves incivilités sur leur exploitation. "Nous avons subi un incendie criminel dans notre ferme en l'an 2000. On a mis deux ans à reconstruire," explique-t-elle. Et ce n'est pas fini : "en 2013, des individus se sont introduits dans la ferme de mon fils, il s'est retrouvé face à eux. Il avait un fusil et avec l'adrénaline, un coup est parti. Il n'a pas été poursuivi."
Jean-Louis ne devrait pas être en prison, il devrait y avoir le même traitement par la justice. On aimerait que la police et la justice protègent les citoyens, pas les voyous. On est choqué.
- Béatrice Muzy, épouse d'agriculteur
Alerte
Mercredi 12 février, une cagnotte a été mise en place par la FDSEA de la Marne. Ce syndicat a décidé de soutenir Jean-Louis Leroux, et sa famille avec une cagnotte solidaire. "L’objectif de cette cagnotte est de les aider à financer les frais de sa défense et les autres frais induits par ce contexte. Le monde agricole et rural s’engage très fortement, avec la famille, aux côtés de Jean-Louis, dans un grand mouvement de solidarité", précise le syndicat.Sur leur site internet, Hervé Lapie, président de la FDSEA 51, et Laurent Champenois, secrétaire général de la FDSEA 51, reviennent sur ce "drame qui nous bouleverse tous. Nos pensées vont vers les deux familles concernées et leurs proches qui vivent une situation terrible. Victime d’une cinquantaine de vols depuis 2015, Jean-Louis a toujours déposé plainte et respecté les procédures. Nous le connaissons bien : honnête, fiable et calme. La problématique de l’insécurité dans nos campagnes n’est pas nouvelle dans la Marne, comme partout sur le territoire français". Le syndicat agricole alerte régulièrement les pouvoirs publics et la gendarmerie "pour qu’elles protègent les personnes et les entreprises qui vivent en milieu rural, particulièrement vulnérables de par leur isolement".