Reims : une cérémonie officielle pour saluer la formidable générosité des couturières bénévoles pendant la crise du Covid

Ce vendredi 22 octobre, une cérémonie officielle en hommage aux couturières qui ont oeuvré pendant la crise sanitaire aura lieu à l'Hôtel de Ville de Reims. L'une d'elles nous a raconté cet élan généreux incroyable.

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Ce vendredi 22 octobre, en fin d'après-midi, Marie-Thérèse Picot va verser des larmes dans la salle des fêtes de l'Hôtel de Ville de Reims. Cette femme de coeur est assistante maternelle, conseillère municipale à Reims et conseillère communautaire du Grand Reims, et elle n'oubliera jamais la crise sanitaire. Cette couturière amateure, est aussi une dame très occupée au service des autres.  Elle l'a prouvé peu après le premier confinement de mars 2020. Lorsqu'il a fallu coudre des masques et des blouses en nombre et rapidement. 

France 3 Champagne-Ardenne a recueilli auprès d'elle la genèse de cette chaîne de solidarité inédite qui a vu le jour quelques semaines après le début du premier confinement. A cette période, les soignants et autres personnels en première ligne face aux malades du Covid manquaient d'équipements de protection. Elle raconte avec émotion, "désolée pour le propos parfois décousu" (un comble pour une couturière ! ). Elle s'arrête parfois de parler, car les larmes ne sont pas loin. Elle a vécu cette chaîne de solidarité aux premières loges, elle n'avait jamais imaginé produire plus de 2 000 blouses et réunir 98 couturières bénévoles en si peu de temps. 

Une blouse, c'est un drap

"Cette opération a commencé en avril 2020, on a tous su qu’il fallait être confiné. Moi, j’habite près de l’hôpital maison blanche à Reims, j’ai commencé à faire des masques pour les distribuer dans la rue, aux amis, aux passants… Je les voyais passer devant moi, certains personnels n’avaient rien pour se protéger du virus. Des amis venaient en chercher, ma voisine et sa famille partaient sans protection. Ils m’ont dit : peux tu nous faire des blouses, car ils en manquent à l'hôpital. Moi je lui dit, je fais des masques, j’en avais fait une centaine, mais je manque de drap. 

Car je prenais des draps, au début je démarrais avec mes propres moyens, mais une blouse, c’est un drap. Alors que dans un drap on fait 40 masques. J’ai demandé à la mairie quelques contacts et j'ai sollicité mes amis sur Facebook. Et là j’ai été submergé, j’ai reçu 200 draps dans la maison. 

C’est vraiment énorme. Incroyable. Je n’avais pas d’autres choix que de faire des blouses, mais je ne pouvais pas le faire seule. Alors je me suis dit on va voir, j’ai lancé l’appel à la mairie et demandé de l’aide pour communiquer, j’avais demandé aux drive des supermarchés du secteur si ils voulaient qu’on puisse déposer du tissu chez eux. Après il fallait des couturières.  

2 800 blouses livrées

J’ai demandé au maire de Reims de mettre la communication de la mairie à la disposition de ce projet fou. On a fait une affiche dans la journée, le 9 avril, il a dit OK. Le 10 avril, les drive me disent OK. Tout a été affiché. 28 couturières se sont manifestées, 4 jours plus tard, 55 couturières, 6 jours plus tard 80 couturières, le 25 avril, 1 000 blouses de cousues et livrées et le 7 mai on avait livré 2 000 blouses et 98 couturières, on arrêté fin mai. On a livré en tout en 2 800 blouses. 

Certaines machines à coudre ont pris feu ! Quand on coup une dizaine de blouses, c'est normal, ça chauffe.

Marie-Thérèse Picot

On en a donné à l’hôpital dans le service Covid, car les soignants devaient changer de blouses à chaque entrée dans la chambre d'un patient. Soit 50 blouses par jour par personne soignante. Tout a servi à l’hôpital. Sur les 2 800, 447 blouses ont été livrées en Ehpad dans la Marne, et de Rethel à Châlons. Les crèches nous en ont demandé. Et les dentistes aussi, médecins ou ostéopathes, Ils avaient besoin de blouses. Il s’est créé quelque chose d’extraordinaire. Une machine s’est mise en route, une chaîne de solidarité. Personne n'a compté ses heures, on a cassé des aiguilles. Par dizaine, des ateliers de réparation ont rouvert. Ils ont réparé des machines qui ont pris feu ! Quand on coup une dizaine de blouses c'est normal, ça chauffe. 

Le patron des blouses on l’avait eu par le préfet de la Marne. On avait un patron mal fichu, les infirmières ne pouvaient pas l’utiliser, je transmettais les cotes aux couturières, par mail ou à domicile, en même temps que les draps. Des élus de la mairie avaient découpé Reims en quatre secteurs, pour la collecte des draps, la livraison du tissu aux couturières et aller chercher les masques ou les blouses. Parfois on livrait sur les parkings de Reims. 

Des blouses aux motifs Walt Disney

On a été jusqu'à sélectionné les couleurs des draps. Des draps aux motifs Walt Disney on faisait des blouses pour l’hôpital américain. Les enfants étaient soignés avec des personnels qui portaient des motifs de Bécassine, reine des neiges et Charlotte aux fraises. Certaine blouses sont encore utilisées aujourd'hui, les enfants malades sont ainsi rassurés. 

Ce que je retiens de tout ça, c’est plus que la solidarité. On a formé un groupe, des mille blouses. On n'avait pas une linute pour nous. C’était de l’inconscience du danger. On voulait se battre. On va pleurer demain pendant la cérémonie. Ça nous a sauvé, car on a été utile. On était tellement dans l’engouement, qu’on a bien supporté le premier confinement. Mais lors du 2e, on est tombé. 

On garde des liens avec les dames qui ont participé, mais la plupart je ne les connais pas. On s’est appelé, beaucoup, mais on ne s’est jamais vu. Donc là le 22 octobre, ça va être émouvant. Tout le monde a mis la main à la pâte. C’était fort, très fort". 

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