À Reims, la maison de Champagne Castelnau met aux enchères plus de 50 lots de millésimes à long vieillissement précieusement conservés au profit de l'association France Lyme, ce 23 octobre. Une vente prestigieuse qui réjouit l'association et les patients atteints par cette maladie.
Pour Armelle Greffet, présidente de l'association France Lyme, c'est une aubaine et un appui extraordinaire, que d'avoir la maison Castelnau comme soutien. Depuis 1916, Champagne Castelnau, à Reims, élabore des cuvées d'exception.
"C'est un soutien financier, c'est certain, mais c'est surtout une écoute attentive et un accompagnement pour notre cause qui reste sourde auprès des pouvoirs publics" explique la présidente.
La maladie de Lyme reste encore méconnue et pourtant elle est en forte croissance, prévient-elle. Egalement appelée borréliose de Lyme, elle est transmise lors d’une piqûre de tique infectée par une bactérie de la famille des spirochètes. Toutes les tiques ne sont pas infectées et l’infection est souvent sans symptôme. Néanmoins, elle peut provoquer une maladie parfois invalidante (douleurs articulaires durables, paralysie partielle des membres…). "Avec le réchauffement climatique, les tiques, qui causent cette maladie, prolifèrent de plus en plus. Cela va devenir dans quelques années, un vrai problème de santé publique", alerte Armelle Greffet.
La transmission de la maladie de Lyme à l’homme se fait uniquement par piqûre de tique. Des tiques répandues partout en France, surtout en dessous de 1.500 m d’altitude. Elles vivent dans des zones boisées et humides, les herbes hautes des prairies, les jardins et les parcs forestiers ou urbains. Les contaminations humaines sont plus fréquentes à la période d’activité maximale des tiques soit, en France entre le début du printemps et la fin de l’automne. Une fois sur le corps de l'hôte, une tique recherche les zones chaudes et humides comme les plis du corps : chez l'homme, creux du coude ou du genou, aisselle, aine... Elle peut passer sous les vêtements et atteindre la peau où elle se fixe pour faire son repas sanguin.
Un long chemin de croix
"Cette maladie est sournoise et silencieuse", raconte François. Âgé de 55 ans, installé à Villenauxe-La-Grande, dans l'Aube, ce grand gaillard de 1 mètre 92 pour 110 kilos, a vu sa vie bouleversé, il y a quelques années. Ces premiers symptômes apparaissent en 2003, une grosse fatigue s'abat sur lui. Cet ancien bûcheron travaille, à ce moment-là, à la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine. Son médecin traitant lui dit qu'il travaille trop et que c'est une grosse fatigue. Seulement après la fatigue, des douleurs articulaires apparaissent partout dans ses membres, aussi bien les bras que les jambes. Commence alors pour lui un long chemin de croix, semé de diagnostics différents.Il verra des neurologues, des rhumatologues, se déplacera à Reims, à l'hôpital Saint-Antoine et à la Salpêtrière à Paris. Les spécialistes finissent par lui dire qu'il est atteint de fibromyalgie, une maladie, qui semble réunir les douleurs décrites par François. Les différents traitements ne fonctionnent pas. Le moral de François en prend un coup, on lui donnera des anti-depresseurs pour remonter la pente. François ne se reconnaît plus et son entourage le voit dépérir.
"C'est cela Lyme, raconte Armelle Greffet, le patient a des symptômes qu'on retrouve dans d'autres maladies et aucun médecin ne veut penser à une piqûre de tique. Le tique peut vous avoir piqué il y a plusieurs années et ne rien donner comme symptômes immédiatement, du coup fatalement, lorsque le patient dit, "j'ai été dans la forêt, il y a plusieurs années et j'ai été piqué ou je crois l'avoir été", la plupart du temps, le médecin met de côté cette maladie."
"Je ne peux pas me réjouir de ce qu'il se passe, en ce moment, pour la communauté scientifique avec la Covid-19, mais tous les symptômes que la maladie dénombre, plongent les médecins dans un flou total pour soigner. C'est comme avec la maladie de Lyme, la quantité de symptômes égare souvent le médecin traitant", conclut Armelle. "Parfois, on ne sait pas qu'on a été piqué, car si c'est dans le cuir chevelu, on ne s'en rend pas compte."
François, lui s'est fait piqué à plusieurs reprises par des tiques, quand il était bûcheron. Il se les retirait lui-même. La maladie bien installée mais pas identifiée, il n'en supportait plus les douleurs, disant à son médecin "j'ai l'impression d'être crucifié de douleurs, qu'on me plante des clous partout dans mon corps. Je suis comme un cochon dinde de la science, autrement-dit un cobaye sur pattes, car aucun médicament ne me soulage". Mais François tombe un jour sur un article qui parle de la maladie de Lyme, notamment un passage qui l'alerte.
"Si la personne ne reçoit pas de traitement antibiotique, des signes neurologiques ou des atteintes des articulations ou plus rarement d’autres organes peuvent apparaître quelques semaines ou quelques mois après la piqûre. Des mois à des années après l’infection peuvent apparaître des manifestations tertiaires, de type articulaire, cutané, neurologique, musculaire, ou cardiaque."
François est convaincu que c'est cette maladie, d'autant que des piqûres de tiques, il en a eu. Il retourne voir son médecin avec cet article et demande à passer des tests plus avancés.
Pour la présidente de France Lyme, cette maladie n'est pas bien maîtrisée par les médecins. Elle a vécu cela car son fils âgé de 4 ans a contracté la maladie. "Nous habitons en pleine campagne et notre jardin donne sur des bois, notre enfant a dû être piqué par une tique". Son garçon sera pris en charge, des années, par un néphrologue pédiatrique, car l'enfant souffre d'une insuffisance rénale. Armelle ne croit pas au diagnostic et demande à un laboratoire allemand de faire le test. Celui-ci reviendra positif.
Armelle Greffet a pu rencontrer le professeur Christian Perronne, spécialisé dans le domaine des pathologies tropicales et des maladies infectieuses émergentes. Le médecin et professeur des universités-praticien hospitalier français, prend en charge le fils d'Armelle. Aujourd'hui, son enfant a 13 ans et il est en rémission après un traitement antifongique et antiparasitaire. Armelle sait qu'elle a eu beaucoup de chance, car les délais pour rencontrer ce professeur sont très longs. Plus d'un an.
Communiquer sur la maladie
"Nous avons besoin de moyen pour communiquer sur cette maladie et une vente aux enchères pourra nous permettre de lever des fonds pour organiser des événements et, peut-être pouvoir rémunérer une personne à temps partiel pour s'occuper de la communication, car nous sommes tous des bénévoles et nous ne maîtrisons pas toujours ces métiers", énonce Armelle Greffet. "Si nous pouvons aider et apporter un sursaut d'énergie aux bénévoles, c'est une très bonne chose et une motivation pour tous les salariés de Castelnau", se réjouit de son côté le directeur général, Pascal Prudhomme.
Polémiques autour des tests
Pourtant, il existe des tests pour savoir si on a la maladie de Lyme. Ces tests sérologiques se font en deux temps. D'abord, c'est le test Elisa. L’idée est de vérifier si le patient est ou a été infecté par une Borrelia, bactérie responsable de la maladie de Lyme. Ensuite, s'il est positif, ce test doit être confirmé par le Western Blot. Si ce dernier est aussi positif, alors le patient est considéré comme atteint de la maladie de Lyme.La polémique autour de ces tests tient au fait que de nombreux malades ont des tests négatifs alors qu'ils se plaignent de symptômes qui pourraient rentrer dans le tableau clinique de la maladie de Lyme. D'où les suspicions sur leur fiabilité décrit une méta-analyse menée à l’Imperial College London, parue en 2016 dans la revue International Journal of General Medicine.
La sensibilité de ces tests n’excède pas en moyenne les 60%. Ainsi, 40% des personnes malades ne seraient pas détectées. "Les patients font appel à des laboratoires étrangers et transfrontaliers pour pouvoir réaliser le test Elisa, car, en France, ce n'est pas un test qui est prescrit systématiquement à cause de la difficulté à diagnostiquer la maladie", souligne Armelle Greffet.
C'est ce qui s'est passé pour Philippe, dans la Marne. Piqué en 2012 par une tique, le jour de ses 60 ans, il se rend chez son médecin. Celui-ci lui prescrit des antibiotiques mais sur un délai très court. La maladie n'est pas vaincue. "J'ai été sous dosé, le traitement avec des antibiotiques aurait dû excéder 10 jours, du coup le traitement n'a pas pris", explique Philippe. Comme François et le fils d'Armelle, Philippe va vivre l'errance des diagnostics et va consulter dans les hôpitaux de la Marne et les hôpitaux parisiens, les mêmes que François. Il fait ensuite appel à l'association France Lyme qui l'oriente vers un médecin qui accepte de lui faire les tests. Elisa et Western Blot seront positifs.
Aujourd'hui, il ne peut plus travailler, lui qui adorait son métier d'expert agricole. Il a décidé d'arrêter de prendre des médicaments, car cela n'améliore pas son état et le diminue plus qu'autre chose. Il s'est rendu dans l'Ain, où un thérapeute le soulage avec des méthodes naturelles.
De son côté, François finira par faire le test après avoir insisté à plusieurs reprise auprès des médecins. Le test Elisa arrivera négatif mais François n'en démord pas. Il contacte un laboratoire allemand qu'il lui fera un test similaire à celui de Western Blot. Un test qui sera non seulement positif, mais qui révélera aussi d'autres co-infections que la maladie peut déclancher, comme la toxoplasmose. François est en invalidité à cause de la maladie. Il est aujourd'hui sous un traitement qui allie médicaments et médecines naturelles. Avec son médecin, il alterne une cure de 30 jours avec des antibiotiques, des antiparasitaires et des antifongiques, s'arrête pendant 30 jours et se soigne à base de plantes pendant un mois, pour reprendre son traitement précédent ensuite. Une vie à être traité.
L'avantage, nous dit-il, c'est qu'il n'a pas peur de la Covid-19. Le traitement tant décrié du professeur Didier Raoult, la chloroquine (utilisé depuis longtemps pour traiter le paludisme) associé à un antibiotique, François le prend depuis presqu'un an. "Je peux sortir, je suis immunisé avec tout ce que je prends", plaisante-t-il.
"Les malades se sentent incompris, explique Armelle Greffet. Nous, les associatifs, nous devons sensibiliser pour dire que cette maladie ne cesse d'augmenter."
Philippe, dans la Marne, a décidé de moins voir ses amis, car il se rend bien compte qu'on ne le comprend pas. "Personne ne peut comprendre nos douleurs", confie-t-il.
La surveillance de la maladie de Lyme pour l’année 2018, réalisée par Santé publique France et le Réseau Sentinelles, a montré une augmentation significative du nombre de nouveaux cas de maladie de Lyme diagnostiqués en médecine générale en France entre 2017 et 2018 (104 cas pour 100.000 habitants contre 69 pour 100.000 en 2017).
"La rareté n'a pas de prix, surtout pour une bonne cause"
Quand, la présidente discute avec Fabrice Sommier, directeur général du Groupe Georges Blanc, l'homme est touché par la cause et le désarroi de la présidente qui cherche à attirer l'attention du grand public sur cette maladie. Il lui apprend qu'il est ambassadeur pour la maison Castelnau. C'est ainsi que la rencontre a pu se faire.La maladie de Lyme est malheureusement en forte croissance. À l'occasion d'une vente aux enchères de prestige, Champagne Castelnau tient à soutenir l'association France Lyme qui exprime une énergie et une empathie généreuse. L'information et la communication sont les clés pour prévenir de cette maladie. Pour cela, il faut des moyens et c'est pour cela que la marque tient à apporter sa contribution explique Pascal Prudhomme, directeur général.
"J'ai eu l'occasion, d'échanger avec nos vignerons qui sont très fiers de pouvoir aider cette association, d'autant que les tiques sont très présentes durant la période des vendanges."
Pour notre maison, c'est un grand événement et une première aussi. "Nous allons aussi permettre à notre filiale, de pouvoir à nouveau accueillir, car avec la période sanitaire, beaucoup de nos événements ont dû être annulés et reportés" rappelle Pascal Prudhomme. Ce sont plus de 50 lots de vieux millésimes précieusement conservés au sein de l’Œnothèque Castelnau, qui seront mis aux enchères ce vendredi 23 octobre, à 15h.
Chaque millésime a été soigneusement sélectionné par la cheffe de cave Elisabeth Sarcelet et Fabrice Sommier, directeur général du Groupe Georges Blanc, également sommelier et Président de l'UDSF. Les lots proposés comprendront des magnums de 1976 à 2003 : un voyage de 27 ans et une cuvée " Hors Catégorie Signé + Maillot Tour de France 150 cl". " On attend tout le monde et parmi ce monde, il y aura des initiés, des collectionneurs et on espère des acheteurs étrangers, car nous serons en ligne directement" précise Pascal Prudhomme. Le prix de départ, pour ces millésimes s'affiche à une centaine d'euros.
C'est une aventure pour toute la maison Castelnau. En champagne, il a des millésimes qui peuvent atteindre aux enchères plusieurs milliers d'euros. " La rareté n'a pas de prix", reconnaît le directeur général. Surtout pour une belle cause", enchaîne-t-il. Nous voulions privilégier, une association qui n'a pas de gros moyens de communication et lorsque Fabrice Sommier m'a parlé de France Lyme, nous avons tous adhéré, précise Pascal Prudhomme.
Des étiquettes et coffrets sont spécialement créés pour cette vente, ce qui rend chaque bouteille unique. "L'acheteur pourra, s'il le souhaite, voir inscrire son nom sur l'étiquette et le coffret", souligne Pascal Prudhomme. La vente aux enchères a lieu le vendredi 23 octobre à 15 h dans la salle de conférence de Castelnau et sera gérée par le commissaire-priseur Gillet de Reims.
La totalité des gains de cette vente sera reversée à l’Association France Lyme afin de soutenir les actions pour la prévention, la lutte contre cette maladie transmise par les tiques et la prise en charge des malades.