Internet à la campagne : une école de patience

Malgré tous les plans nationaux ou locaux pour réduire la "fracture numérique", la demande en mégabits progresse plus vite que l'offre. Résultat : quand on est loin des autoroutes de l'info, ça coince dans les tuyaux. Exemple dans une PME du Lunévillois.

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Comme tous les jours, le geek de la boîte a pris la température. "On est à 511, ce matin". Un demi-méga, qu'il faut se partager entre le bureau d'études, les commerciaux, les secrétaires. Et Jocelyne, la patronne, qui a fondé Plaisance Equipement ici, à Montigny, il y a quarante ans avec son mari. Une fois tout ce petit monde connecté, Internet ne répond plus.
L'informatique, ce n'est pas la spécialité maison. Ici on fait du lourd : des engins forestiers (broyage, dépardage, déneigement) qu'on vend à l'ONF mais aussi aux bûcherons canadiens ou russes. Un tiers des affaires se font à l'export. Régulièrement, le patron part au bout du monde pour signer un contrat... ou réparer une machine. Mais au quotidien, les échanges en ligne sont indispensables, aussi bien pour les ingénieurs que pour le commercial ou l'administratif.

Voir le reportage :

Plaisance Equipement, PME de 50 salariés installée à Montigny (54), doit se débrouiller avec un réseau numérique défaillant. ©France 3 Lorraine
Pour tenter de sécuriser leur accès internet, les époux Plaisance ont souscrit chez deux fournisseurs : Ozone, prestataire pour le Département (30 € par mois) et Orange (abonnement pro : 600 € par mois). Mais Montigny, 140 habitants, fait partie de ces zones rurales où les opérateurs privés ne sont pas pressés d'investir dans le haut débit... pas assez rentable.

Zones blanches

Reste donc l'internet "public". Pour pallier le désintérêt du privé, le Département a installé depuis huit ans des émetteurs WiFiMax dans les "zones blanches". A l'époque, c'était le Graal. 
Mais la consommation de données augmente beaucoup plus vite (jusqu'à + 70% par an !) que les investissements. Entreprises, agriculteurs, particuliers, sont toujours plus gourmands et l'émetteur qui arrose Montigny est déjà insuffisant.
Le Conseil Départemental est donc en train d'installer une nouvelle technologie (le WiFi MIMO) qui, en principe, garantit un débit de 20 Mb, et de façon plus stable. Ça coûte de l'argent, ça prend du temps... mais il devrait arriver à Montigny mi-novembre selon André Corzani, l'élu "numérique" du Département. De plus, l'entreprise aura son propre émetteur et n'aura plus à partager avec les habitants du village...

Fibre à l'horizon

Dans le même temps, le Département a installé une "autoroute de l'information" : 850 kilomètres de fibre optique à travers la Meurthe-et-Moselle. La solution ultime.  Elle passe à Badonviller, à quelques encâblures de Montigny. Mais comme pour l'électricité, ce sont les derniers kilomètres qui coûtent le plus cher. Un raccordement, c'est au moins 100 000 €. Selon l'élu, il faudra patienter sept ans avant que cette "dorsale" irrigue tous le territoire.
Sur la fibre, la Région Grand Est prend, en ce moment, le relais des départements. Avec plus de moyens... et le concours de l'Etat via le plan France Très Haut Débit, qui vise la couverture intégrale du pays d'ici à 2022. C'est loin... mais le très haut débit (30 méga minimum) changera la vie de Jocelyne Plaisance et de son entreprise, avec leurs pauvres 500 kilos du matin.


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