Pour les infirmiers et les aides-soignantes, la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 a engendré beaucoup de stress et de fatigue. Un an après le début de la pandémie, ils sont nombreux à avoir arrêté leur métier. "Le moral est au plus bas, à cause de la fatigue accumulée".
C'est au début de la deuxième vague de l’épidémie de Covid-19, au mois de novembre 2020, que la liste du personnel soignant qui souhaite quitter l’hôpital public a commencé à s'allonger. Chez une partie d'entre eux, le ras le bol n’est jamais retombé depuis la découverte du virus. "En fait, on a oublié la fatigue tellement on est sous pression", explique un infirmier. "Moi par exemple, j'étais au bloc opératoire et du jour au lendemain, sans formation, je me suis retrouvé en réanimation. Même si ce métier est une vocation, l'amertume est là. Depuis un an, la vie de famille est très affectée par les changements : pas de repos, pas de récupération, moins de congés... Dans mon entourage, j'ai des collègues qui parlent régulièrement de démissionner".
Nous sommes dans le pic de la vague et tout le monde a le moral à zéro
On le savait, la situation était déjà compliquée mais la crise sanitaire a été un véritable révélateur des difficultés du monde hospitalier. "Après la crise sanitaire, on va essuyer une crise sociale à l'hôpital", dit un médecin du CHRU de Nancy. "Ce qui est certain, c'est que l'hôpital public se prépare à une période très difficile".
Demande de disponibilité, démission, retraite
Ces départs constituent, selon les représentants syndicaux, un phénomène qui va en s’aggravant. "Depuis la situation sociale due au coronavirus, on reçoit énormément d'appels, plus que d'habitude pour des procédures de démissions ou de mise en disponibilité", explique Sophie Perrin-Phan Dinh, infirmière et représentante CGT au CHRU de Nancy. "Ce sont surtout des infirmières. Et aujourd'hui, elles sont nombreuses à menacer de quitter leur poste".
On ne forme pas assez d'infirmières
De son côté, Stéphane Maire, délégué CFDT au CHRU de Nancy, raconte : "J'ai par exemple le dossier d'une infirmière qui veut partir maintenant et à qui on refuse la rupture conventionnelle. On ne veut pas les laisser partir par manque de monde bien sûr, mais aussi parce qu'on ne forme pas assez de personnels soignants".
Pourquoi elles démissionnent ?
Avec le Covid-19, plus le rythme s'accélère, plus la crise empire. "Cela s'est accéléré avec la troisième vague et donc un ras le bol lié à l'épuisement. Les plannings change tout le temps", raconte une infirmière. Même son de cloche chez les médecins.
Pour la première fois au mois de février, des infirmières ont posé des arrêts maladies d'épuisement
Un phénomène que l'on retrouve partout en France et également dans les hôpitaux de Paris. Jean-Michel Constantin est chef du service anesthésie-réanimation à l'Hôpital Pitié-Salpêtrière. Il raconte : "c'est très possible que l’on affronte une série de démissions en cascade car on continue à tirer sur la fatigue avec tous les problèmes financiers qui s'ajoutent. Et puis ce n'est pas fini. Au moment où le Covid va baisser, on va être obligé d'accélérer toutes les opérations déprogrammées, avec un hôpital qui sera à genoux".
Selon le Syndicat CGT du CHRU de Nancy, le service des ressources humaines local estime qu'en 2019, il y a eu 80 départs, autant qu'en 2020. Pour l'instant, il n'évoque pas une recrudescence des démissions.
Les hôpitaux français pourraient bientôt manquer cruellement de personnel soignant. Une récente enquête de la Fédération hospitalière de France menée auprès de 300 établissements recensait plus de 10.000 départs, démissions, retraites, fins de contrat, d’infirmiers et d’aides-soignants.