Des plantes saisies par les Douanes exposées au Jardins botanique. C'est une première à Nancy. Une façon de sensibiliser le public au trafic vert de plantes vivantes, rares, menacées et protégées. Un trafic en pleine expansion au niveau mondial.
"Le trafic de mammifères, tout le monde y est réceptif. Les scorpions ou les araignées, un peu moins mais le trafic de plantes, ça passe complètement inaperçu. C'est pourtant une réalité au même titre que le trafic de drogue". Jean-Michel Doremus, responsable des serres botaniques au Muséum national d’histoire naturelle n'avance pas de chiffres, "c'est très variable. Ça varie entre quelques dizaines et quelques centaines de plantes saisies chaque semaine. Ça dépend aussi des variétés. Il y a des petites plantes ou des gros volumes". Une certitude néanmoins : "le nombre de plantes saisies est en très nette augmentation depuis quelques années, surtout depuis 2019". Principalement les plantes vivantes, rares, menacées et protégées.
Il y a un engouement avec des collectionneurs à l'échelle mondiale prêts à débourser plusieurs milliers d'euros pour certaines graines ou plantes
Frédéric Pautz, directeur des Jardins botaniques du Grand Nancy
Les plantes sauvages peuvent donc être braconnées car souvent convoitées par des collectionneurs peu scrupuleux. "Certains peuvent payer des centaines d'euros pour des variétés d'orchidées" explique Frédéric Pautz, directeur des Jardins botaniques du Grand Nancy et de l'Université de Lorraine, au micro de France 3 Lorraine, "il y a aussi des cycas ou des palmiers sur lesquels il y a un engouement avec des collectionneurs à l'échelle mondiale prêts à débourser plusieurs milliers d'euros pour certaines graines ou plantes. Même chose pour les cactus, il y a aussi un business. Il y a une forte attractivité commerciale". Parmi les motivations des collectionneurs : l'aspect ornemental mais aussi les vertus médicinales et psychoactives.
Trafic et saisies en hausse
Le problème, c'est qu'il y a une réglementation : celle de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Cites). "Ces plantes par exemple ont été prélevées illégalement à Madagascar" raconte Katia Blairon, commissaire de l’exposition sur le droit des plantes au jardin botanique, "elles sont inscrites sur des listes de protection du commerce internationale. Ce sont donc des plantes menacées qui ont naturellement été saisies par les Douanes, elles n'avaient pas de documents officiels attestant un prélèvement légal et conforme à la biodiversité".
Qui dit trafic dit saisies, en provenance de Madagascar et du Mexique principalement. Le point de chute : Roissy car la France est principalement identifiée comme un pays de transit pour des marchandises destinées au marché européen ou international. C'est là qu'interviennent les Douanes. N'ayant pas la surface, ni le personnel nécessaire pour entretenir à long terme la quantité énorme de plante saisie, le butin est confié au Muséum national d’histoire naturelle. "Nous n'avons pas vocation à tout conserver" rappelle Jean-Michel Doremus, responsable des serres botaniques au MNHN, "en fonction de leur état et de leur intérêt, nous gardons ou pas. Ces plantes sont parfois en mauvais état, elles ont souvent été arrachées dans leur milieu naturel sans précaution Car le but initial, c'est de les extraire vite et de les vendre aussitôt. Souvent, il n'y a plus de racines. L'objectif est de vite les extraire des magasins des Douanes et passer de Roissy à ici en une semaine".
Des plantes rares saisies par les douanes sont arrivées dans nos serres !
— Jardin botanique Nancy (@JardinBotaNancy) April 29, 2024
Celles-ci seront visibles dans la serre des milieux arides à partir de demain.
Toutes les informations : https://t.co/2v11TEpJlG pic.twitter.com/BDg6jK3QUU
Et si certaines plantes se retrouvent au Jardin botanique de Nancy, c'est grâce à une convention de partenariat. "Il y a un réseau des jardins botaniques. A Paris, le Museum national d'histoire naturelle a la responsabilité scientifique de recevoir et d'expertiser ces plantes liées à des trafics et peut nous les confier. Les montrer ici, c'est aussi une façon de sensibiliser le public à ces plantes qui ont un statut juridique un peu particulier et aux conséquences désastreuses de tels trafics". Bien souvent, le trafic de plantes sauvages menace des écosystèmes déjà fragiles.
"Comprendre et s'interroger sur le droit et les plantes ?", c'est le thème que le Jardin botanique Jean-Marie Pelt porte jusqu'en novembre 2024 avec un programme culturel varié : expositions, animations, spectacles, ateliers et conférences.