Le scrutin s’annonçait périlleux pour la majorité sortante de gauche. Elle ne disposait que d’une majorité de trois sièges et pouvait être mise en difficulté par la droite dans plusieurs cantons, sur fond de montée du Rassemblement national, et d’une participation très faible.
Depuis 1998, et la victoire de Michel Dinet (PS) face à Jacques Baudot (UDF), l’alliance des socialistes et des communistes, associés aux écologistes, a permis de conserver la prise de guerre, dans un département sociologiquement hétérogène. Au nord le Pays-Haut, citadelle rouge encore bercée par les souvenirs de l’industrie, et au sud des cantons plus ruraux, qui oscillent entre le centre-droit et la droite traditionnelle. Nancy, bastion du radicalisme, fait bande à part.
Trois sièges
En 2015, le département s’est doté d’une majorité de conseillers de gauche à trois sièges près. La mort de Michel Dinet a précipité un an plus tôt l’élection de son dauphin, Mathieu Klein, qui cède à son tour son fauteuil en 2020, lorsqu’il est élu maire de Nancy à la tête d’une liste d’union de la gauche. Valérie Beausert-Leick récupère le fauteuil, qu’elle remet en jeu dans une position inconfortable.
A nouveau candidate dans le canton de Laxou avec comme binôme Pierre Baumann, elle affronte le duo Nathalie Engel/Laurent Garcia. Ce dernier, député-maire Modem de Laxou, pouvait bousculer la présidente sortante. Elle sort du premier tour en ballotage favorable avec 44,16% des voix, mais elle compte moins d'une centaine de voix d'avance sur le duo Laurent Garcia/Nathalie Engel.
A la loupe
Les interrogations du même type concernaient quatre autres cantons, que la gauche pouvait/pourrait perdre. A Nancy 3, la socialiste Nicole Creusot ne se représentait pas, pas plus que son binôme Frédéric Maguin. Personnalité politique de premier plan de la scène nancéienne, la vice-présidente chargée de la culture au conseil départemental sortant laissait une tâche difficile à Silvana Silvani et Lionel Adam, l’actuel adjoint à la sécurité du maire de Nancy.
Dans le canton de Toul un autre poids-lourd départemental ne se représentait pas. Le maire socialiste Alde Harmand laissait son binôme Michèle Pilot faire équipe avec un inconnu, Emilien Martin-Triffandier. Le tandem réalise un bon score, avec 45,52% des voix, il est en ballotage très favorable face aux RN Anthony Boulogne/Muriel Di Rezze. La droite est éliminée. Un caillou en moins dans la chaussure de la gauche en Meurthe-et-Moselle.
A Longwy, forteresse de la gauche, Christian Ariès ne se représentait pas. Le vice-président du conseil départemental a laissé la place au premier adjoint de la ville Vincent Hamen qui pouvait d’un déficit de notoriété face au maire d’Hersérange, Gérard Didelot. Avec une abstention qui crève le plafond à 80,43%, Sophie Balon et Vincent Hamen virent tout de même en tête avec 40,61% des suffrages, contre 33,18% à Muriel Ferraro/Gérard Didelot. Ballotage favorable, le RN est battu.
Dans le dixième canton, Meine au Saintois, les sortants socialistes Gauthier Brunner et Agnès Marchand ne repartaient pas pour un tour. L’Union de la gauche et des écologistes comptait donc sur Denis Kieffer et Barbara Thirion qui sont en tête au soir du premier tour avec 41,59%. Ballotage favorable face à la droite Cinthya Henon/Jérôme Klein.
Au total, ce sont donc cinq cantons que l’union de la gauche pouvait perdre, elle est en mesure de les conserver dimanche prochain, et même d'en gagner d'autres.
A prendre
Le canton de Pont-à-Mousson pourrait basculer à gauche. Bernard Bertelle le maire de Blénod-les-Pont-à-Mousson est bien placer pour l’emporter. Très bien implanté localement, fin connaisseur des dossiers du canton, il pourrait déloger le sortant divers-droite Stéphane Pizelle au deuxième tour puisqu'il obtient plus de 40% des voix ce soir.
Dans le Grand Couronné, l’union de la droite et du centre passe devant pour le premier tour avec 39,01% mais Jean-Pierre Dessein et Catherine Krier sont talonnés par Marie-Christine Bastien/Zyede Ben Ismail qui ne comptent que 300 voix de retard.
Bastions rouge
La gauche rouge tient ses bastions au soir du premier tour. André Corzani, maire de Joeuf et longtemps communiste, est en ballotage très favorable avec 63,71% des voix. L’abstention de 76,70% l’empêche de l’emporter au premier tour face au duo du Rassemblement National Rémy Halftermeyer/Anaïs Mangeon.
Dans le canton de Villerupt, Annie Silvestri qui se représente sans Alain Casoni l’ancien maire PCF de la ville, obtient la majorité des voix avec 52,22% mais devra passer par un second tour face au binôme d’extrême-droite Marie Crunchant/Jonathan Meyer.
A Jarny, la députée LFI Caroline Fiat associée au maire communiste Jacky Zanardo sont largement en tête avec 48,97%. Abstention massive là aussi, avec 76,57% mais ils apparaissent favoris face aux RN Anne Friquegnon/Luigi Mucci. La droite est battue.
La droite en retrait
Le leader de la droite départementale, Luc Binsinger, sort en tête au premier tour dans son canton de Jarville la Malgrange avec 44,63 %. Il affrontera la gauche sereinement dans son canton. Le maire de Saint-Nicolas-de-Port compte ses troupes, qui n’apparaissent pas en mesure de renverser la table dimanche prochain, puisqu’ils sont éliminés dès le premier tour comme à Toul ou Val de Lorraine Sud. En tête dans seulement six cantons sur vingt-trois, la droite est renvoyée à ses études. Le Rassemblement National est en net recul, avec seulement six binômes présents au second tour contre huit en 2015. Il ne parait en mesure de l'emporter dans aucun canton.
Abstention
Contrairement à l'Ecole des fans, toutes les formations politiques ont perdu hier soir. Le taux de participation de 29,74% constitue un revers cinglant pour tous les candidats engagés en Meurthe-et-Moselle. A Longwy, citadelle rouge, l'abstention dépasse les 80%. Le RN devait "crever le plafond de verre", ce sont finalement les abstentionnistes obstinés qui ont volé la vedette à toute la classe politique traditionnelle. Qui les écoutera ?