Un FabLab numérique est au cœur d’une institution qui a pour vocation l'accueil de jeunes polyhandicapées, autistes et des personnes ayant une déficience intellectuelle . Un projet assez rare et sans doute unique dans le domaine médico-social en France.
C'est dans un lieu tout à fait inattendu, une chapelle au beau milieu du siège historique de la structure J-B Thiery que se trouve un FabLab extraordinaire. Un petit robot Nao, des casques de réalité virtuelle, des casques de réalité augmentée, des imprimantes 3D, des tables magiques. Mais le plus important est ailleurs. Ces outils numériques sont pensés par l'équipe médicale et pédagogique pour ouvrir tout un champ dans la prise en charge de jeunes autistes et de jeunes polyhandicapés.
Nao, le robot par exemple, permet à des jeunes autistes de communiquer. Contrairement aux humains, il n'a pas d'expression involontaire du visage. "Ces outils numériques permettent aux éducateurs de pouvoir travailler les relations sociales avec les enfants autistes", nous explique Armand Manukyan, référent numérique au FabLab "les MacGyver".
"On travaille au développement de la communication par l'imitation des mouvements moteurs, en particulier avec le robot de Nao."
Hypno-distraction et hypnoanalgésie
Sous une serre de jardin, transparente en forme de bulle, un casque de réalité virtuelle sur la tête, se trouve Adrien, un jeune garçon avec un trouble du spectre autistique. Il vient vivre une expérience sensorielle. Ici, on appelle cela l'hypno-distraction. C'est son rendez-vous hebdomadaire pour se défouler. Son truc, ce sont les manèges à sensations fortes comme les montagnes russes. Il adore et en redemande à Tom qui l'accompagne. Tom Scheffmann est assistant numérique. "C'est un moment de bien-être pour Adrien. Certains de nos usagers préfèrent les balades à cheval ou le ski. On a même un jeune qui demande de visiter les musées du monde. Cela leur permet de s'évader. Nous sommes attentifs à leur bien-être et à leur sécurité. Il existe des contre-indications à l'utilisation de la réalité virtuelle, par exemple dans le cas de l'épilepsie non contrôlée."
Il y a trois usages de l'utilisation de ces casques de réalité virtuelle à l'association J-B Thiery : l'hypno-distraction, l'hypnoanalgésie utilisée dans le cadre de thérapies non médicamenteuses pour faire diminuer l'anxiété. Le troisième usage est fait dans le cadre de la qualité de vie au travail pour les professionnels encadrants pour leur permettre, eux aussi, un moment de détente et d'évasion.
Imprimantes 3D pour objets sensoriels
Plusieurs imprimantes 3D et un scanner d'objets se trouvent dans ce lieu atypique. Elles fabriquent des objets sur mesure pour le quotidien : "l'idée est d'être au plus proche des besoins et des objectifs à travailler pour chacun d'entre eux", nous explique Clémence Fontaine, responsable du FabLab.
"On peut fabriquer un manche pour un couvert, qui soit vraiment fait sur mesure, moulé dans le creux de la main. Il est scanné puis imprimé. Pour les professionnels, par exemple pour les psychologues, c'est un moyen de créer des objets sensoriels. On peut aussi utiliser les imprimantes 3D pour réparer des objets en modélisant et en recréant une pièce défaillante."
Les imprimantes 3 D servent aussi à faire des objets utilisés dans la communication pour identifier un besoin. Un des plus gros succès du FabLab, c’est la table magique, la Tovertafel. Ludique et éducative, elle permet de jouer seul ou à plusieurs. Elle est interactive et propose des jeux de mémoire, de reconnaissance visuelle. Ici, tout est jeu, mais tout est aussi un prolongement et une consolidation des compétences acquises en cours.
Inclusion et inclusion inversée
L'association J-B Thiery compte neuf établissements sur toute la Lorraine. Le siège historique est à Maxéville, près de Nancy en Meurthe-et-Moselle. C'est là que se trouve cette curieuse chapelle de la technologie. Le FabLab "les MacGyver" a été inauguré en 2019. Inclusion et inclusion inversée puisque le FabLab accueille régulièrement des personnes valides pour partager les outils utilisés par des jeunes handicapés. L'établissement est précurseur dans le domaine, un des premiers en France à avoir intégré les outils numériques dans une réflexion thérapeutique au cœur d'un établissement dédié à l'accompagnement de jeunes autistes.
Nous travaillons sur des outils à commande oculaire, qui permettront demain de proposer à nos usagers, qui ne maîtrisent pas la parole, de pouvoir piloter des outils avec les yeux
Armand Manukyan, référent numérique au FabLab "les MacGyver"
Les projets pour l’avenir ne manquent pas. Armand Manukyan confirme :"Nous travaillons sur des outils à commande oculaire, qui permettront demain de proposer à nos usagers, qui ne maîtrisent pas la parole, de pouvoir piloter des outils avec les yeux." Pour Clémence Fontaine, "Il n’y a pas de limite. Notre équipement est une force pour développer les aspects pédagogiques et créatifs. C’est une adaptation qui donne un accès supplémentaire au monde des valides à nos usagers."
Le FabLab "les Mac Gyver" est ouvert tous les jours de la semaine, accessible aux jeunes résidents de l'association, aux professionnels qui les encadrent, mais aussi souvent à des professionnels extérieurs, qui en font la demande. Un lieu enthousiasmant, dont il faut découvrir tout le potentiel.