Le projet de restructuration du palais des ducs de Lorraine, présenté par Mathieu Klein en Conseil municipal lundi 12 avril, reprend les grandes lignes de celui de l'équipe Hénart. Mais la "barre de verre" qui faisait polémique a été supprimée. Le budget de l'opération reste inchangé : 43 millions.
C'est à la fois un musée riche de plus de 155.000 oeuvres et un monument central dans le patrimoine du vieux Nancy. Le Musée Lorrain - Palais des Ducs de Lorraine est un sujet hypersensible depuis le lancement, en 2012, d'un projet de modernisation que tout le monde s'accordait à juger nécessaire.
Le projet retenu en 2013, celui du cabinet d'architectes Dubois & Associés, prévoyait notamment la construction d'une longue barre vitrée en fond de jardin... L'équivalent nancéien de la pyramide du Louvre. De quoi faire hurler les gardiens du patrimoine du Vieux Nancy, entre le palais Renaissance et l'ensemble XVIIIe hérité du roi Stanislas. Même revu à la baisse à l'issue d'une consultation, le bâtiment hérissait toujours.
On comprend donc que la fameuse barre soit la première victime de l'ardeur novatrice de la nouvelle équipe municipale. Dans l'avant-projet présenté ce lundi 12 avril 2021 en Conseil municipal - et voté à la majorité -, elle est remplacée par un préau, beaucoup moins haut, qui abrite escaliers, monte-charge... Et promeneurs, tout en ménageant les perspectives.
Mais l'enlisement du projet depuis huit ans (Le musée devait initialement rouvrir... En 2020) n'était pas dû qu'à des considérations esthétiques. La somme des travaux envisagés dépassait visiblement l'enveloppe financière (31 millions d'euros hors taxes). L'appel d'offres ouvert en 2018, et relancé trois fois, n'a pas rencontré de candidats-bâtisseurs.
Le coup de grâce est venu, en décembre 2020, du tribunal administratif qui annulait l'autorisation de travaux à la demande de l'Association pour le Patrimoine et le Rayonnement de Nancy. Laquelle faisait valoir que le projet impliquait la démolition de bâtiments classés.
Ouverture sur la ville
Le nouveau projet vise donc à rentrer dans les clous, juridiquement et financièrement.
Outre la fameuse barre, l'équipe Klein renonce à une salle de conférences de 330 m² en sous-sol. Techniquement complexe en raison de la proximité des fondations du palais, sa suppression génère une économie bienvenue. Bertrand Masson, l'adjoint à la Culture, fait valoir qu'il y a "suffisamment d'espaces de conférences aux alentours", entre le Palais du Gouvernement, le Musée des Beaux-Arts et... L'Hôtel de ville.
Enfin, la municipalité met en avant une plus grande ouverture du musée sur la ville, en ménageant notamment un accès supplémentaire vers les jardins du Gouvernement. La cour du palais sera accessible aux simples promeneurs.
Ces modifications suffiront-elles à éteindre les polémiques autour du palais ducal ? Rien n'est moins sûr. Françoise Hervé, la pasionaria du patrimoine nancéien, attend d'avoir étudié l'avant-projet avant d'énoncer son verdict. Bertrand Masson l'admet : le projet se veut "apaisé" mais vu la charge symbolique du lieu, il serait étonnant que le débat s'arrête là.
"Aller vite"
Politiquement, malgré tout, l'apaisement est de mise.
Mathieu Klein a mis de l'eau dans son vin. En mai 2020, en pleine campagne municipale, il parlait "d'annuler le projet" au profit des travaux d'isolation des écoles. Finalement, il reprend à son compte le parcours muséal choisi - "un travail remarquable" - et conserve le budget auquel participent, rappelons-le, le département, la région et l'Etat.
Laurent Hénart, de son côté, semble s'être résigné à la perte du "signe architectural fort" qui devait marquer son passage à l'Hôtel de Ville. L'ancien maire réclame cependant une nouvelle consultation pour amender cet avant-projet, qui n'est, selon lui, "encore qu'une esquisse". Mais il y a peu de chance que son successeur donne suite : Mathieu Klein veut désormais "aller vite", il l'a précisé à l'occasion de ce conseil municipal.
L'instruction du dossier par les Monuments Historiques, la passation des marchés et l'inévitable campagne de fouilles préventives seront suivies par au moins quatre ans de chantier. Ce qui amènerait l'ouverture, au plus tôt, à l'année 2027. Près de dix ans après le passage des derniers visiteurs au Musée Lorrain.