Le maire de Nancy, Mathieu Klein (Parti socialiste) et celui de Metz, François Grosdidier (Les républicains) sortent t-ils fragilisés de cette présidentielle après avoir apporté leur soutien à Anne Hidalgo et Valérie Pécresse ? Dans leur ville, le vote pour le Parti socialiste et Les républicains s'effondre.
C'est une soirée qu'ils n'oublieront jamais. Celle du premier tour de l'élection présidentielle 2022. Pour le maire de Nancy, Mathieu Klein (Parti socialiste) et pour le maire de Metz, François Grosdidier (Les Républicains), la proclamation des résultats à 20 heures, dimanche 10 avril 2022, s'est révélée cauchemardesque. Et pas seulement à cause de la qualification d'Emmanuel Macron et de Marine Le Pen pour le second tour, comme en 2017, mais surtout en raison des scores de leurs candidats.
Au niveau national, Anne Hidalgo et Valérie Pécresse obtiennent respectivement 1,75 et 4,78%. La cata. "C'est à la fois la fin d'un cycle mais pas la fin de l'histoire" admet le maire de Nancy, "la campagne a été difficile et nous sentions bien que le message d'Anne Hidalgo ne passait pas le mur du son. Il n'en reste pas que la violence du résultat est un choc."
"C'est un score extrêmement faible, qui est très décevant" reconnait François Grosdidier, "peut-être que Valérie Pécresse n'a pas été suffisamment elle-même, peut-être a t-elle abandonné un électorat de centre-droit pour aller chercher plus à droite, on pourra toujours s'interroger sur les erreurs tactiques."
Pas de miracle à Nancy ou Metz pour le PS et LR
Dans leurs villes, pas de miracle non plus. A Nancy, Anne Hidalgo recueille 2,45% des suffrages soit 950 voix. Une misère. A Metz, Valérie Pécresse est à 4,01%, 1832 voix. C'est mieux mais tellement insuffisant pour ces partis poids-lourds et leurs ténors locaux. Une déroute aux allures de camouflet quand on regarde les score de Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron à Nancy et à Metz. Le candidat de La France insoumise obtient près de 30% des suffrages à Nancy et Metz, talonnant Emmanuel Macron. Loin, très loin devant Hidalgo ou Pécresse.
Même si ces résultats ne font pas office de referendum local, le constat est néanmoins amer pour Mathieu Klein et François Grosdidier.
Lors des régionales de 2021, lorsque le maire de Nancy appelle à voter en faveur d'Eliane Romani, l'électorat de gauche est au rendez-vous et place la candidate de rassemblement PS-Verts en tête au second tour à Nancy (42,56%) devant le futur vainqueur, l'UMP Jean Rottner (35,80%).
A Metz, François Grosdidier réussit à faire grimper Jean Rottner à plus de 40% dans sa ville, dans l'agglomération de Metz et une partie du département de la Moselle. L'engagement paye. Il est récompensé. Mais cette fois, rien n'a fonctionné comme prévu, ni pour l'un, ni pour l'autre.
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Pour Mathieu Klein, cette campagne présidentielle devait s'apparenter à une mise en orbite sur le plan national. Le 12 septembre 2021, il est aux côtés d'Anne Hidalgo à Rouen pour officialiser l'entrée en campagne de la candidate socialiste.
Mathieu Klein intègre même l'équipe de campagne, aux côté de la nouvelle vague PS comme Stéphane Troussel, président de la Seine-Saint-Denis ou la présidente de la région Occitanie, Carole Delga. Il est en charge de la coordination du programme et devient l’un des 14 porte-paroles de la candidate. Créditée de 7 à 9% des voix selon les sondages, Anne Hidalgo va vite s'effondrer. Qui se souvient aujourd'hui des interventions de ses porte-paroles sur son programme ? Personne.
Sept mois plus tard, retour à la case départ pour celui qui a bien du mal à décoller lorsqu'il s'agit de constituer une alliance au plan national. Après Martine Aubry (primaires socialistes en 2011), Manuel Valls (primaire socialiste pour l’élection présidentielle en 2017) et aujourd'hui Anne Hidalgo, Mathieu Klein collectionne les tickets perdants mais il sait aussi qu'il va falloir vite rebondir et ne pas se laisser embarquer dans les soubresauts de la descente aux enfers du parti socialiste. Inutile de s'apitoyer sur ce 10 avril.
Les électeurs n'ont plus envie de voter pour ce PS là, il faut que nous nous réinventions
Mathieu Klein, maire de Nancy (PS)
Enjeu majeur, passer à autre chose et vite faire oublier cette présidentielle 2022. "Le résultat d'hier est une claque, une immense déception, c'est la fin du parti socialiste tel qu'il a existé jusqu'à aujourd'hui" déclare t-il sans fioritures, "les électeurs n'ont plus envie de voter pour ce PS là, il faut que nous nous réinventions. Et pas uniquement sur la base des partis d'hier. Je veux que nous restions fidèles à notre culture de gouvernement car nous sommes là pour agir, pour transformer le réel. Nous devons être celles et ceux qui demain, ouvriront un chemin d'espoir."
Et comme dans sa conquête de la mairie de Nancy en 2020, Mathieu Klein mise sur le vieux principe de l'union de la gauche mais sans la France insoumise en bon social démocrate qu'il est. "Il faut reconstruire et reconstruire, ça veut dire travailler ensemble, au-delà de nos étiquettes comme nous le faisons dans de nombreuses villes, de nombreux département et beaucoup de régions entre socialistes, communistes et écologistes. Les gens qui ont voté pour Jean-Luc Mélenchon, qui est devenu l'instrument du vote utile, ne partagent pas forcément son projet."
Rebondir, mais aussi contre-attaquer cette insolente France insoumise, passe par les législatives qui se profilent à très brève échéance. "Les électeurs de gauche ne s'identifient pas forcément à Jean-Luc Mélenchon. Aux législatives, je crois à l'alliance de ceux qui travaillent déjà dans la réalité, dans cette gauche du réel. Lorsqu'on est unis, les résultats ne sont pas les mêmes. La gauche n'a pas été au rendez-vous hier, elle le sera peut-être demain à condition de se dépasser. Nous savons que c'est sur nos épaules que pèse la gauche de demain. C'est une responsabilité d'imaginer la gauche de demain avec d'autres mais aussi des hommes et des femmes qui ne sont pas engagés en politique." Le problème, c'est la dot. Après cette déroute présidentielle, le PS ou le nouveau PS de Mathieu Klein sont-il encore maîtres du jeu, non seulement à Nancy mais aussi en Meurthe-et-Moselle ? "J'espère que pour les élections législatives, nous saurons nous ressaisir et proposer des candidatures communes."
François Grosdidier
Faire oublier, et vite, ce premier tour, c'est aussi l'enjeu numéro 1 pour François Grosdidier. Et pour cela, pas de fioriture non plus : "Nous, Républicains, nous avons échoué à proposer une alternative."
Nous, Républicains, nous avons échoué à proposer une alternative
François Grosdidier, maire de Metz (LR)
Le maire de Metz est beaucoup moins marqué par la candidature Pécresse même s'il l'a reçue à Metz en meeting. Fragilisé François Grosdidier ? Oui, si on le limite au simple constat de l'effondrement de LR en tant que parti de gouvernement mais au plan local, le maire de Metz n'est absolument pas désavoué par le résultat de ce premier tour de la présidentielle. "C’est l’échec des partis traditionnels, Les républicains comme le Parti socialiste, qui réussissent sur le plan local mais qui ne représentent plus grand-chose sur le plan national" répète t-il, bien décidé à scinder les pratiques parisiennes et messines.
En témoigne sa dernière prise. Raphaël Pitti, élu en 2020 sur la liste de gauche Unis, a rejoint le groupe Energies pour Metz, composante de la majorité municipale de François Grosdidier. Le médecin urgentiste de guerre n’avait siégé que quelques semaines dans l'opposition. Au sein d’Energies pour Metz, Raphaël Pitti rejoint d'anciens macronistes et des ex-élus de gauche comme Béatrice Agammenone, Doan Tran, Amandine Laveau-Zimmerle et Eric Lucas. On est loin de la ligne LR.
Même s'il ne serait pas opposé à composer avec des députés proches de sa ligne, François Grosdidier ne devrait pas courir éperdument après ces législatives, plus que jamais incertaines en Moselle. Ce ne devrait pas être une priorité de calendrier à moins qu'un éclatement précipité de LR vienne tout bouleverser.
Voter Macron et pas Le Pen
"Il faut voter massivement pour Emmanuel Macron au second tour car le premier danger auquel nous sommes confrontés aujourd'hui, c'est la remise en cause de la République car Marine Le Pen, l'amie de Vladimir Poutine est aujourd'hui une femme qui peut devenir présidente et qui peut mettre à mal le pacte républicain" insiste Mathieu Klein, "le Parti socialiste appelle très clairement à voter pour Emmanuel Macron."
Même ligne pour François Grosdidier : "Maintenant, c'est tout sauf l'extrême droite quels que soient les désaccords qu'on peut avoir avec Emmanuel Macron. Il n'y a pas photo."