Au lendemain des résultats des élections européennes et de l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale, les réactions sont nombreuses. Inquiétude, consternation ou au contraire résignation, qu’en pensent les Nancéiens ? Sont-ils prêts à retourner voter ? On leur a posé la question.
Pas surpris, consternés ou inquiets, au lendemain des résultats des élections européennes et de l'annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, les Nancéiens émergent lentement ce lundi 10 juin 2024. La ville se démarque du reste de la région. À Nancy, c’est le Parti socialiste, mené par Raphaël Glucksmann qui est arrivé en tête à près de 20% des voix (contre 16% pour le RN). En revanche, dans le Grand Est la liste du Rassemblement National est arrivée largement en tête du scrutin avec un score de plus de 38%.
La plupart des jeunes qui ont voté pour le RN l’ont fait juste parce qu’ils ont vu Bardella sur TikTok
Célina
Un résultat historique qui laisse pantois certains Nancéiens, rencontrés sur la place Stanislas. Célina fait partie de ceux-là : “J’ai trouvé ça aberrant de voir un tel score pour le RN. Après, je n'ai pas été pas choquée de voir la montée de l'extrême droite. Je me dis que la plupart des jeunes qui ont voté pour le RN l’ont fait juste parce qu’ils ont vu Bardella sur Tik Tok, c’est le danger, je pense”, déclare-t-elle.
C’est avant tout la classe politique actuelle qui est responsable de ce qu’il se passe
Jean-Charles
Elle n’est pas la seule à être tourmentée par la percée de l’extrême droite. “C’est assez inquiétant de voir qu’une grande partie de la population française se dirige vers des gens qui ont des idées plutôt néfastes pour l’évolution de la société, avec l’exclusion de la notion de partage, et l’idée de se recentrer sur soi-même. Je ne pense pas que cela soit la solution. C’est quelque chose de latent depuis de nombreuses années. Je pense que c’est avant tout la classe politique actuelle qui est responsable de ce qu’il se passe”, témoigne Jean-Charles, enseignant chercheur à l’université.
Le Rassemblement National a quand même des idées qui sont valables et les Français y sont sensibles
Nicole
Pour Nicole, en balade avec une amie dans les rues du centre-ville, de tels résultats étaient prévisibles : “Je m’y attendais parce que le Rassemblement National a quand même des idées qui sont valables et les Français y sont sensibles. C’est une mouvance qui progresse, incontestablement. Nous y sommes, on verra bien après”, déclare-t-elle.
Si les scores du scrutin européen ne semblent pas surprendre, il y a cependant un événement auquel ces Nancéiens ne s’attendaient pas : l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale par le président Emmanuel Macron. “Il a certainement tenté un coup de poker en se disant qu’il fallait mettre les Français devant la réalité des choses, devant leurs convictions”, estime Jean-Charles.
Quelques mètres plus loin, Guillaume, qui travaille dans le domaine de l’agroalimentaire, dresse le même constat : “On se demande ce que va faire le président, est-ce qu’il veut s’arranger pour qu’une partie du RN soit élue ? Peut-être veut-il montrer que le RN, n’est pas à la hauteur avant les prochaines élections présidentielles ?”, s’interroge le jeune homme.
La perspective d’un “coup de poker” du président est plus que jamais évoquée. Un avis que le directeur de Science Po Nancy, François Laval, invité sur notre plateau, remet en perspective : “On a toujours dit qu’Emmanuel Macron s’est beaucoup inspiré de François Mitterrand. C’est ce qu’a fait François Mitterrand en 1986, ce qui lui a permis de battre Jacques Chirac en 1988. En tout cas, la frayeur d’Emmanuel Macron c’est qu’en mai 2027, pour l’Histoire, il soit celui qui remet les clefs de l’Elysée à Marine Le Pen”.
Retour aux urnes
Toutes les personnes interrogées déclarent avoir voté et comptent y retourner pour les législatives. Pourtant, près de 48,5% des électeurs se sont abstenus de voter ce dimanche 9 juin 2024. Plus édifiant encore, lors du second tour des élections législatives en 2022, le taux d'abstention s'élevait à 53,77%. “La situation devient inquiétante, je pense qu’on devrait encore plus pousser les gens à voter car l'abstention, c'est le danger”, conclut Célina, une jeune nancéienne.
Pour François Laval, la question de l’abstention pour les prochaines élections législatives concerne surtout les opposants au Rassemblement National : “Une partie de la population est un petit peu déboussolée. Ce que l’on sait c’est que l'électorat qui adhère au programme du RN et de Reconquête est dans une dynamique positive et ira voter. La question c’est de savoir si les opposants à cette dynamique vont réussir à se mobiliser”.
Depuis l’annonce du président, les partis politiques s’organisent pour performer lors des élections législatives anticipées qui auront lieu le 30 juin et le 7 juillet 2024. Ce lundi 10 juin 2024, les principaux partis de gauche ont d’ailleurs annoncé la constitution d’un “nouveau front populaire” pour tenter de contrer l’extrême droite.