24 février 2012. François Hollande, candidat à la présidentielle, juché sur le toit de la camionnette de l’intersyndicale redonnait de l’espoir aux salariés d’ArcelorMittal en lutte contre la fermeture des hauts-fourneaux de Florange. Retour sur une promesse ambigüe
L’image reste gravée dans les mémoires de la population de la vallée de la Fensch et des salariés d’ArcelorMittal rassemblés sur le site sidérurgique de Florange. Ce 24 février 2012, François Hollande, candidat à la présidentielle, grimpe sur le toit de la camionnette de l’intersyndicale et déclare: « Je sais ce que vous espérez, c’est-à-dire que les hauts fourneaux puissent rouvrir et que vous fassiez en sorte d’avoir une industrie sidérurgique moderne et d’avenir. Le premier engagement, c’est de faire en sorte que nous défendions notre filière d’excellence, la filière sidérurgique ! Et je sais […] qu’ici se fabrique le meilleur acier d’Europe […] : d’où l’enjeu de la réouverture. »
La formulation ambigüe provoque dans l’assistance des interprétations différentes. Cela va de l’enthousiasme au scepticisme. Ce qui est certain en revanche c’est le fort espoir des ouvriers en lutte pour la sauvegarde de la filière liquide.
Il y avait une attente incroyable, François Hollande était favori dans les sondages
Lionel Burriello, Secrétaire général CGT ArcelorMittal
Lionel Burriello de la CGT replante le décor: « Les haut-fourneaux étaient déjà à l’arrêt et nous étions en lutte. Face à Mittal, Il fallait agir sur deux leviers : le rapport de force sur le terrain et le levier politique dans la perspective de François Hollande Président »
630 suppressions de postes cela s’appelle un plan social !
Les espoirs seront vite douchés. La fermeture définitive des hauts-fourneaux lorrains intervient en 2013. S’installe alors la conviction que le candidat devenu Président de la République a renié ses promesses.
Pourtant celui-ci affirme les avoir tenues : les hauts-fourneaux sont condamnés mais la vallée de la Fensch reste un site compétitif. Mittal a accepté en contrepartie d’investir 180 millions d’euros et un plan social a été évité, les 630 salariés de la filière liquide ont tous été reclassés.
Pour le responsable CGT Lionel Burriello, un plan social camouflé a bien été engagé : « 630 suppressions de postes cela s’appelle un plan social ! Sans parler des sous-traitants. Il faut compter trois emplois disparus pour un emploi de sidérurgiste »
Seules la CFDT et la CFE-CGC signent l’accord social mettant un terme définitif à la bataille de Florange. Pour Jérôme Baron de la CFDT (majoritaire), le bilan n'est pas totalement négatif. Ce 24 février 2012, personne n'est dupe des propos du candidat Hollande. Il s'exprimait dans une séquence électorale et il ne fallait pas désespérer Florange.
Le cédétiste rappelle qu'avant la signature de l'accord social, ArcelorMittal prévoyait 800 suppressions de postes et zéro investissement : " Nous avons obtenu une deuxième ligne de galvanisation inaugurée en septembre 2021, le train à chaud tourne toujours. En tout, près de 200 millions ont été investis"
Avec le recul, la lutte a donc permis de limiter les dégâts et de renforcer les autres unités de production de la vallée.
L'épisode de la camionnette va coller longtemps aux doigts du Président Hollande comme le sparadrap du capitaine Haddock. Reste aussi de cette histoire « la Loi Florange » plusieurs fois remaniée et édulcorée par rapport à sa version initiale beaucoup plus offensive.. Elle contraint les firmes de plus de 1000 salariés qui se séparent d’une unité de production à la céder à un repreneur. Ainsi que la création de MetaFensch, centre public de recherche et de développement des métaux où 20 millions d’euros ont été injectés.
Quel gâchis !
Un qui ne décolère pas c'est Edouard Martin le leader de la CFDT et figure emblématique de la lutte. ArcelorMittal va investir 1,7 milliards d'euros dans ses hauts-fourneaux de Dunkerque et de Fos pour fabriquer de l'acier décarboné avec de l'hydrogène.
A l'époque il avait défendu bec et ongles l'idée de faire des installations de Florange des unités expérimentales: "Nous aurions pu être un site pilote et démontrer que la vallée de la Fensch pouvait être celle de l'acier vert. Que ce soit la direction, les politiques, les économistes de tout poils, personne ne nous a pris au sérieux. Quel gâchis ! "
Quant aux trois haut-fourneaux, leurs carcasses rouillées dominent encore le paysage mais leurs jours sont comptés. Un budget est alloué pour leur déconstruction prochaine.