Trois jours après l'attentat islamiste qui a coûté la vie à un professeur de français et fait trois blessés, les écoles rendent hommage à Dominique Bernard. Entre émotion et réflexion, certains syndicats posent l'épineux problème de la sécurité dans les collèges et les Lycées.
Ce lundi 16 octobre 2023, c'est le grand retour à l'école pour les collégiens et lycéens partout en France, trois jours après l'attentat islamiste qui a coûté la vie à un professeur de français, et fait trois blessés à Arras. Dominique Bernard a été assassiné comme Samuel Paty il y a trois ans.
Les cours prévus avant 10 heures ont été annulés pour permettre aux professeurs de se retrouver, avant le retour des élèves. "Le temps en équipe de 8h à 10h était vraiment indispensable", insiste Bruno Henry, secrétaire général académique du SNES-FSU Lorraine, "c'est un temps qui nous avait cruellement manqué, il y a trois ans à l'occasion de l'assassinat de Samuel Paty. Je crois que les personnels avaient besoin de se retrouver. On avait besoin de se parler, de se dire ensemble, quel était le message qu'on allait délivrer aux élèves, d'abord à 10h au moment de leur retour et puis aussi à 14h au moment de la minute de silence qui va être organisé un peu partout".
Peu avant 10h, les élèves arrivent petit à petit. Claire (le prénom a été modifié), élève de seconde à la cité Georges de la Tour à Metz (Moselle) avoue "avoir peur" au micro de France 3 Lorraine, "on va en parler avec nos profs. On se sent un peu en danger, ça fait peur, mais ça ne me traumatise pas. Avec mes amis, on se demande où va le monde ?" Même sentiment de tristesse et d'interrogation pour cet autre élève de seconde : "j'ai préparé des questions pour les profs. On va débattre de ce qui s'est passé pour essayer de comprendre. En tant qu'élève, nous sommes un peu perdus. C'est très grave ce qui s'est passé. Je suis inquiète et je n'ai pas envie que ça recommence."
C'est important de retourner en classe
Une lycéenne
"C'est important de retourner en classe" explique cette lycéenne, "c'est bien d'échanger avec les professeurs, mais aussi avec mes camarades pour savoir comment ils vivent tout ça", dit-elle. "Dans ce monde, il y a beaucoup de danger. Partout.", ajoute une élève de première, "on n'est pas à l'abri, il faut faire attention et être vigilant".
Même sentiment pour Daniel (le prénom a été modifié), élève de terminal au lycée Cormontaigne. "Ça aurait pu arriver à Metz, c'est vrai que ça peut arriver n'importe où", déclare-t-il, "mais personnellement, je pense qu'on n'a pas vraiment de crainte à avoir pour l'avenir. C'est juste inattendu. Il faut avoir ces échanges, il faut parler. Il faut aussi avoir une vigilance accrue. Il faut que tout le monde soit soudé".
Émotion et réflexions
En début d'après midi, élèves et enseignants ont observé une minute de silence dans tous les collèges et lycées de France, en hommage à Dominique Bernard. Cette minute de silence est "en mémoire des victimes des attentats commis contre notre école", avait indiqué le ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, qui avait également prévenu qu'"aucune contestation" ni "aucune provocation" ne seraient "tolérées".
Je crois que la meilleure réponse face à ces attaques, c'est de continuer notre travail
Bruno Henry, secrétaire général académique du SNES-FSU Lorraine
"Nous savons que l'école et les valeurs qu'elle essaie de transmettre sont une cible depuis plusieurs années", poursuit Bruno Henry (SNES-FSU), "qu'est-ce qui est attaqué à travers l'école ? Ce sont des valeurs que nous essayons de transmettre : l'esprit critique, la liberté d'expression. Je crois que la meilleure réponse face à ces attaques, c'est de continuer notre travail".
"On est vraiment sur le temps de l'émotion" analyse le responsable syndical, "il faut absolument que les événements dramatiques d'Arras nous amènent à reconsidérer et à repenser les procédures de sécurité dans les établissements. Il faut tout remettre à plat. Je souhaite que les établissements scolaires restent ce qu'ils sont. Mais il faut qu'on réussisse à trouver un équilibre entre l'impératif de sécurité pour les élèves et les personnels et cet objectif de rester un lieu ouvert sur le monde. Il va falloir trouver des protocoles pour assurer la sécurité, mais sans perdre notre âme. Nous demandons à l'État, mais aussi aux collectivités, à la Région pour les lycées, au Département pour les collèges, de donner aux établissements les moyens de fonctionner correctement. Cela signifie qu'il faut que les collectivités locales se posent la question des procédures de sécurité dans les établissements. Si des aménagements sont nécessaires, qu'ils soient opérés très très rapidement", estime Bruno Henry.
La France a été placée vendredi en alerte "urgence attentat", avec 7 000 soldats déployés sur le territoire. Depuis son arrestation, l'assaillant d'Arras, Mohammed Mogouchkov, qui a crié "Allah Akbar" selon des témoins, "ne s'est pas exprimé", selon une source policière. Huit autres personnes étaient encore en garde à vue dimanche.