La majorité des huiles végétales que nous utilisons quotidiennement contient des résidus d’hexane. Un solvant issu de la pétrochimie que les industriels utilisent dans le processus de fabrication. En Lorraine les producteurs d’huiles bio de tournesol sont en pleine récolte. Ce lundi 28 octobres 2024, Ils nous expliquent leur méthode de production, sans chimie.
Savez-vous qu’à chaque fois quand vous utilisez de l’huile végétale pour vos plats et vos salades, il est fort probable que vous ingérez du pétrole ? Certes en microquantités mais pendant toute une vie les conséquences sur la santé peuvent être non négligeables. Cela est dû à un solvant utilisé depuis des décennies dans l’agroalimentaire, l’hexane. Il permet aux industriels d’extraire un maximum d’huile à partir de graines de tournesol, de colza, de lin, de sésames, etc. En revanche cette molécule n'est pas autorisée en agriculture biologique. Voici quelques bonnes raisons de consommer des huiles végétales bio !
"On démarre dans le champ et on finit dans la bouteille"
À Landroff en Moselle, Etienne et François Guillaume sont la dixième génération d’agriculteurs dans la famille. Dans les champs en ce mois d’octobre 2024, c’est le ramassage des derniers tournesols. Et même si "le rendement est faible cette année, toute cette récolte ira à la fabrication d’huile de tournesol bio", explique François Guillaume, agriculteur à la ferme de BelAir.
Sur l’exploitation cinq sortes d’huiles végétales bio sont produites depuis 15 ans maintenant. À l’arrière-boutique, une machine presse les graines et extrait le précieux liquide.
"On est tout petit. On produit 30 000 litres par an. C’est l’équivalent d’une journée de production dans une huilerie industrielle française", précise Etienne Guillaume, producteur associé à la ferme biologique.
Ici aucun entrant et aucun engrais chimique ne sont utilisés dans les champs. Pour obtenir l’huile, la méthode est mécanique par simple pressage des graines. Ce jour-là ce sont des graines de cameline.
"C’est l’ancêtre du colza et du lin. C’est une plante qui fournit une huile très riche en oméga trois", explique le producteur. "C’est une petite presse à huile, mais l’avantage c’est qu’elle travaille en continu. La graine va tomber et vous avez une vis… Elle va séparer la partie solide de la graine des huiles", explique le producteur. Cette huile sera ensuite filtrée et mise en bouteille. Une pression à froid qui garde toutes les qualités gustatives de la graine.
Pour une production artisanale la méthode s’arrête ici. En revanche pour un industriel la fabrication continue avec l’ajout de molécules comme l’hexane pour extraire un maximum de quantité d’huile.
Un solvant qui affecte le système nerveux
Après la première pression, le tourteau, "le gâteau de pression, contient encore de 16 et 24 % de matières grasses", selon le journal scientifique OCL Journal.
Ces quantités de matière grasse dans l’industrie sont extraites par plusieurs étapes : monter en température, broyage des graines et ajout de solvants. Le but étant "d’assurer un rendement d’extraction de l’ordre de 97 %". Un procédé utilisé depuis des décennies qui pourtant pose le problème de résidus de molécules chimiques depuis les années 80. "En effet, une exposition à long terme à l’hexane est susceptible de causer une atteinte du système nerveux central et des troubles de la fertilité", selon OCL Journal.
L'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a également tiré la sonnette d’alarme en septembre 2024 par rapport à l’utilisation de l’hexane.
Le député Richard Ramos (MoDem) a déposé un amendement pour taxer les producteurs d’hexane, vendredi 25 octobre 2024, comme le groupe Total ou Shell.
Ce lundi, les Ecologistes du Grand Est expriment leur accord avec cette démarche. "Les députés Ecologistes soutiennent cet amendement. L’autorité européenne de sécurité des aliments a mis en question l’innocuité de ce produit. Ça pose la question du principe de précaution. Il faut affiner ces données et protéger la population. Détruire la santé publique ça coûte très cher", réagit Eliane Romani, co-présidente du groupe Les Ecologistes à la région Grand Est.
L'hexane est interdit en Bio
Dans la ferme, François et Etienne Guillaume ont des vaches. Les tourteaux de graines, encore riches en huiles végétales vont nourrir leurs animaux. Pour eux il n'y a pas d'intérêt de vouloir extraire davantage.
"Nous Agriculteurs Bio, on va extraire 70 à 80% d’huile, on va vraiment chercher à extraire la fleur de l’huile, la meilleure qualité qui va sortir naturellement", ajoute Etienne Guillaume.
Certes plus chères, ces huiles végétales bio gardent toutes leurs qualités gustatives et nutritionnelles. Bonnes pour la santé, elles nous évitent de consommer des résidus pétrochimiques.
Quant aux huiles végétales industrielles, sans incitation des pouvoirs publics il est possible que les procédés ne changent pas. L'utilisation de l'hexane est la solution la plus rentable.
Actuellement ce solvant ne figure pas sur les étiquettes et il est difficile de mesurer son taux de résidus dans les aliments. La seule possibilité pour le consommateur est d’agir lui-même et de choisir des huiles produites dans le respect de la santé de l’homme et l’environnement.