Ungersheim : les coiffeurs tombent la blouse et tout le reste "Quitte à être mis à poil, autant le faire nous-mêmes"

Jessica et Olivier Perret sont coiffeurs barbiers à Ungersheim. Les poils ils connaissent, c'est leur métier. Se mettre à poil un peu moins. Pourtant, ils ont décidé de tomber la blouse sur les réseaux sociaux. Histoire d'alerter l'opinion sur leur situation financière de plus en plus précaire.

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Deux silhouettes à contre-jour qu'on devine intégralement nues brandissent farouchement ciseaux et sèche-cheveux. Elle, cambrée, queue de cheval au cordeau (normal elle est coiffeuse) semble se tirer à bout portant dans la poitrine. Un souffle brûlant et fatal. Lui, à genoux, la menace d'une paire de ciseaux à effiler.

Un tableau digne de Basic Instinct mâtiné du Mari de la coiffeuse. C'est dans l'Hair du temps. C'est le ralliement de toute une profession mise à poil par ce deuxième confinement sous le #moncoiffeurapoil.
 


Une situation indémêlable


Dans la vraie vie, Jessica et Olivier Perret ont un visage. Souriant. Ça fait aussi partie du job. Mais depuis quelques mois, les sourires ont du mal à percer sous l'inquiétude et oui bien entendu les masques. Le premier confinement a mis leur salon l'Hair Stylé à Ungersheim un genou à terre. Ils ont peur de ne pas se relever du second. 
 

"On est sortis juste juste du premier confinement. Nous avons réussi à nous en sortir sans avoir recours à un prêt. On ne voulait pas, on n'en a un déjà sur le dos depuis deux ans pour l'achat de notre salon. Là, il a fallu s'y résoudre. Nous avons emprunté 20 000 euros grâce au PGE. Prêt Garanti par l'Etat. 20.000 euros pour simplement payer nos charges fixes et éviter la fermeture. Juste essayer de retomber à une trésorerie à 0 et de réinvestir dans du matériel à la reprise" explique Olivier, le patron.
 

Que voulez-vous qu'on fasse avec une aide de 1500 euros ?

Olivier Perret, coiffeur



"Tous nos salariés sont au chômage mais malgré cela avec le loyer et les charges, nous devons sortir 3000 euros par mois. Que voulez-vous qu'on fasse avec une aide de 1500 euros ?"
 

Sans compter qu'en mai, le salon de coiffure a dû se mettre aux nouvelles normes sanitaires. "On a investi dans des plexiglass, des masques, du gel hydroalcoolique : tout cela a un coût. On a tout fait dans les règles. Tout ça pour nous dire bon maintenant vous fermez. Nous ce qu'on veut c'est la réiouverture de nos salons." Les poils se hérissent. Ça s'entend.

"Non mais c'est vrai, on voit toutes ces grandes surfaces où les gens vont et viennent librement, regardez aussi les écoles. Ok cette maladie tue, ok on doit faire attention. Mais nous, nous avons les moyens de protéger nos clients. Un client par poste, masque ... non là franchement je ne comprends pas" s'énerve Jessica.

Colère, incompréhension : il n'en fallait pas plus à ce couple pour franchir le cap. Se mettre tout nu. "Tout nu tout nu" précise la jeune femme.
 

A poil 


C'est Jean-Charles, un coiffeur du Havre qui a lancé l'initiative il y a dix jours sur les réseaux sociaux. Jolis tatouages, mine grave, un flingue-sèche-cheveux sous le menton. Un bad boy en mauvaise posture. Cette photo, qui ne manque pas de toupet malgré une calvitie manifeste, a été virale. Le mouvement #moncoiffeurapoil était né.

Ps : Il faut rendre à César ce qui est à César, ce sont les dentistes, oui les dentistes, qui avaient, les premiers, lancé la mode du nu lors du premier confinement pour dénoncer le manque de masques chirurgicaux. #dentistapoil. 
 
"Quand on a vu ça, on s'est dit il faut absolument le faire. Mais nous, nous avons choisi de nous mettre intégralement nus, sans pancarte, sans lavabo devant, sans rien cacher. Bon, au début, ça n'a pas été simple, vous comprenez vis à vis de nos clients c'est quand même un peu gênant. Mais c'est pour la bonne cause." 
 
Le couple fait appel à un ami photographe qui met scrupuleusement en scène ce jeu d'ombres et de lumières dans le salon. Le salon de la maison. "Non là vraiment on ne voulait pas faire ça au salon de coiffure, tout le monde nous aurait vus." A un ami photographe et à ... Photoshop.

"Oui, nous nous sommes aperçus que malgré l'ombre, il y avait de détails qui dépassaient. On a gommé les tétons et heu les parties intimes de monsieur qui étaient trop visibles."
De l'érotisme au manifeste il n'y a qu'un passage de gomme. "Ma belle-mère qui n'est pas disons de ce genre-là a trouvé ça très bien. Nous étions rassurés." 


Coup de ciseaux et coup de pub


Depuis qu'elle a été postée sur FB, leur photo a déjà été vue par 20 000 personnes, partagée par 115 sans parler tous les commentaires de soutien. "Ça nous a fait chaud au coeur. On se sent épaulés et compris. Les messages sont en grande majorité bienveillants. Et puis ça permet de faire parler de nous alors que nous sommes enfermés à la maison."

Être soutenus mais surtout être entendus. "Certains trouvent notre photo violente. Agressive. Mais ce qu'on subit c'est violent. C'est nos métiers de coiffeurs et même tout l'artisanat qui est menacé. C'est ça la vraie violence. Se retrouver sans rien." 
 

Certains trouvent notre photo violente. Agressive. Mais ce qu'on subit c'est violent.

Jessica, coiffeuse



Depuis le lancement du hastag le 5 novembre dernier, #moncoiffeurapoil compte plus de 450 occurrences sur Instagram. Des photos de coiffeurs, postés de toute la France, des nus plus ou moins artistiques, mais des nus culottés et revendicateurs. Unis face au dépoilement de la crise.
 
La France compte 85 192 salons qui embauchent 200 000 travailleurs déclarés pour un chiffre d'affaires de 6 milliards d'euros. La coiffure est le deuxième secteur de l'artisanat. Ca vaut bien une petite danse de salon. 
 

 
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