Les vignerons inquiets à l'approche de Noël : "Quand les gens n'ont pas le moral, ils ne boivent pas de champagne"

Avec le deuxième confinement, les petits producteurs de champagne vivent une fin d'année difficile. Entre démarchages, livraisons et vente en ligne, ils s'organisent pour "limiter la casse".

Le champagne trouvera-t-il sa place sur la table du réveillon ? A quelques semaines de Noël, les producteurs de champagne sont inquiets. Le deuxième confinement tombe au pire moment pour les vignerons qui font environ la moitié de leur chiffre d'affaires sur les trois derniers mois de l'année.

Pour certains, la période est encore plus cruciale. "Les mois de novembre et décembre représentent d'habitude 75 % de notre chiffre d'affaires, car nous vendons beaucoup sur les marchés de Noël, mais cette année, ils sont pour la plupart annulés, regrette Lucie Virey, qui s'occupe avec ses parents d'une exploitation familiale à Balnot-sur-Laignes, sur la Côte des Bar.
 

Livraisons et démarchage

Pour rattraper le manque à gagner, ces viticulteurs de l'Aube enchaînent les livraisons, un peu partout en France. "On est allé livrer dans le Sud la semaine dernière. D'habitude, le camion est chargé à bloc, mais là il n'était rempli qu'à un tiers." Lucie Virey tente malgré tout de garder le moral : "Au moins pendant ce deuxième confinement, on peut continuer à travailler, ce qui n'était pas le cas lors du premier, où l'on avait vendu zéro bouteille".

En cette fin d'année, les vignerons ne chôment pas, même si leur travail a évolué. "Je passe énormément de temps devant mon ordinateur à démarcher mes clients, à envoyer des mails, pour sauver les meubles", explique Stéphane Vignon, viticulteur à Verzenay, dans la montagne de Reims. La fermeture des restaurants et bars à vins a fait chuter les ventes de champagne de cet exploitant marnais.

A l'export aussi, le marché est morose. "L'an dernier, j'ai expédié 1.200 bouteilles aux Etats-Unis, là je n'en suis qu'à 350 cette année." Seules les ventes vers l'Asie ont bien repris.
 
 

Les Belges toujours fidèles

Heureusement Stéphane Vignon peut compter sur sa clientèle de particuliers, française, mais aussi belge. "Grands amateurs de vins, les Belges adorent en temps normal se déplacer et rencontrer le vigneron, là comme ils ne peuvent pas venir, nous venons jusqu'à eux, à la frontière belge."

A l'approche des festivités de fin d'année, le carnet de commandes se remplit doucement. "Personne ne sait comment va se passer le mois de décembre, répète le vigneron marnais. Si le confinement se prolonge, les gens n'auront peut-être pas envie de boire du champagne à deux. Quand les gens n'ont pas le moral, ils ne boivent pas de champagne."

"La situation n'est pas simple, résume Yves Couvreur, le président des Vignerons Indépendants de Champagne, il y a à la fois du pessimisme, mais aussi des lueurs d'espoir. Le reconfinement bloque un peu tout : salons, bars, restaurants, discothèques, duty-free... Mais par rapport au premier confinement très strict, on s'est adapté. Avec une débauche d'énergies, on a mis en place un système pour être au plus proche des clients avec des livraisons, des drives, de la vente en ligne... Il a fallu se renouveler."
 

"D'habitude, les clients viennent à nous, mais là il faut qu'on aille à eux"

La situation n'est pas la même d'un vigneron à l'autre. Ceux qui travaillent davantage avec des particuliers sont moins touchés par le reconfinement. "Ce qui nous sauve, ce sont les petits clients, on leur offre la livraison dès 18 bouteilles vendues. On vend en ligne, mais beaucoup par mail ou par téléphone, explique Aurélien Joly, qui travaille sur l'exploitation familiale à Troissy, dans la Vallée de la Marne.

En ce moment, son père, son frère et lui sont sur les routes tous les jours. "D'habitude, on fait les salons, les clients viennent à nous, mais là il faut qu'on aille à eux, observe le vigneron. On livre dans le Val-d'Oise cette semaine, puis vendredi, on part dans la région lyonnaise, on n'arrête pas."
 

 

Vente en ligne

A Vert-Toulon, sur les Coteaux sézannais, la famille Prat estime aussi avoir été "moins touchée que d'autres collègues". "Notre force, c'est d'avoir mis en place un site internet de vente en ligne depuis 2004, souligne Aurélia Prat qui travaille avec son frère et ses parents. Le site est aujourd'hui bien référencé et même si les commandes ne sont que de 6 ou 12 bouteilles en moyenne, ça nous a permis d'avoir un vrai plus."

De quoi tenir le coup en espérant une embellie des ventes avec la fin du confinement et la reprise de l'oenotourisme. "On espère surtout que l'épidémie ne va pas trop se prolonger. On peut passer une mauvaise année, mais deux ou trois, ce sera vraiment compliqué."
 
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