Pour Amar Lasfar, recteur de la mosquée de Lille-Sud, la Une de Charlie Hebdo, sorti ce mercredi est "offensante" mais il appelle les musulmans à garder leur sang-froid.
Président des organisations islamiques de France, recteur de la mosquée de Lille-Sud, Amar Lasfar, invité d'Europe 1, a réagi à la "Une" choisie par la rédaction de Charlie Hebdo, pour son premier numéro post-attentat croquant en Une Mahomet la larme à l'oeil et cette phrase "Tout est pardonné". Il n'a pas caché son trouble devant ce qu'il considère comme une nouvelle provocation.
"Elle va être mal vécue par les musulmans. Les musulmans ont défilé en hommage aux victimes de Charlie Hebdo, a affirmé Amar Lasfar. Ils sont pour la liberté d'expression, ils l'ont prouvé en descendant dans la rue. Malheureusement, on ressort encore une fois des caricatures. (...) J'espère que tout sera pardonné. Mais j’aurais bien aimé qu’on agisse autrement, que l’on fasse passer la pédagogie autrement, le respect avant. Mais bon, bien sûr, je vais appeler les musulmans à garder leur sang-froid, à ne pas répondre à la provocation."
Après cet appel au calme, Amar Lasfar a ajouté : "Mais ça reste toujours quelque chose d'offensant pour tous les musulmans de France."
Cette position rejoint celle de nombreuses voix musulmanes dans le monde entier. L'Union mondiale des oulémas musulmans, dirigée par le prédicateur Youssef al-Qaradaoui, a estimé qu'il n'était "pas sage" de publier de nouveaux dessins du prophète Mahomet, comme le font mercredi de nombreux journaux dans le monde, par solidarité avec Charlie Hebdo. "Il n'est ni raisonnable ni logique, ni sage de publier les dessins et les films offensant le prophète ou attaquant l'islam", écrit dans un long communiqué cet organisme, basé au Qatar et présidé par le prédicateur qatari d'origine égyptienne, Youssef al-Qaradaoui, considéré comme l'éminence grise des Frères musulmans.
Provocation ?
Al-Azhar, la principale autorité de l'islam sunnite basée en Egypte, a estimé que la Une de Charlie Hebdo allait "attiser la haine". Aux Etats-Unis, pays qui a inscrit la liberté d'expression dans sa Constitution mais où la satire religieuse est taboue, la plupart des journaux nationaux ont reproduit le dessin du prophète Mahomet, sauf le New York Times, qui publie un article intitulé: "Toujours en deuil, mais avec une nouvelle provocation: Mahometà la Une", sans montrer la caricature.
Dans la plupart des pays d'Europe, les journaux ou sites web reproduisent cette Une. En Grande-Bretagne cependant, The Independent est le seul des grands journaux à la publier dans sa version papier.