Lors du troisième jour du procès de Jonathan Maréchal, accusé d'avoir tué un enfant de 9 ans au Hérie-la-Viéville dans l'Aisne en 2018, la famille de la victime s'est exprimée. Mais l'accusé, lui, reste impassible, et continue de dire qu'il est innocent. Notre journaliste Rémi Vivenot y a assisté.
"Ma vie s'est brisée à jamais", a déclaré la mère de Tom devant la cour d'assises de Laon en ce troisième jour de procès. Elle s'adresse directement à l'accusé : "Sais-tu ce que c'est que de vivre avec l'envie de mourir ? Tu n'as pas réfléchi un instant à ce que tu as fait. (...) Nous, on a pris perpétuité."
Les larmes s'entendent dans sa voix, mais la mère endeuillée reste digne. Il y a trois ans, son fils a été retrouvé mort sur un terrain vague près de son domicile, et des lésions sur le corps laissent penser à un viol post-mortem. Face à elle, Jonathan Maréchal demeure impassible. Comme chaque jour depuis le début du procès, l'accusé n'a qu'une chose à dire : "je n'ai rien fait".
L'ADN de l'accusé retrouvé sur l'enfant
Plusieurs éléments sont pourtant contre lui. Quand la disparition de l'enfant de 9 ans est signalée le 28 mai 2018, il est le dernier à avoir vu Tom, ça, il ne le nie pas. Ils étaient partis cueillir des cerises ensemble.
Un expert en hématologie explique à la barre que son ADN a été retrouvé sur les lieux du crime. Il est également présent sur les vêtements de l'enfant, ainsi que sur le parpaing qui a potentiellement servi d'arme du crime : l'enfant est mort à la suite d'un coup à la tête.
Mais cet argument, Jonathan Maréchal l'a balayé depuis longtemps. Pendant sa garde à vue, le lendemain du meurtre, avant même que les gendarmes ne lui posent la question, il avait prévenu : son ADN sera probablement retrouvé partout, il va souvent dans cet endroit. Quant aux vêtements du petit garçon ? Il a passé du temps avec lui pour cueillir les cerises, l'a porté pour l'aider à passer par-dessus le portail. Il ne voit rien d'anormal au fait que son ADN soit présent.
"Tout va contre lui, même sa manière de se défendre"
Lors de cette garde à vue, il avait également évoqué "des flashs" qui lui revenaient, dans lesquels il se voyait frapper l'enfantn mais s'était ensuite rétracté. Aujourd'hui encore, il maintient qu'il n'en est rien. Il dit que les gendarmes l'avaient influencé et qu'il avait une migraine, qu'il ne se sentait pas bien. Son avocat rappelle qu'il a tenu ces propos en toute fin de garde à vue.
L'avocat général le mitraille de questions sur son emploi du temps, essaie de le bousculer un peu. Mais l'accusé garde la même attitude que depuis le premier jour du procès : impassible, imperturbable. Il reste cohérent sur sa version et ne fait aucun faux pas : il répète inlassablement qu'il n'a rien fait. Qu'il n'est pas attiré par les enfants, qu'il n'avait pas de désir pour Tom.
La présidente du tribunal tente de le faire parler, de lui faire exprimer des émotions. "Vous vous limitez à des descriptions mécaniques", déplore-t-elle. "J'ai du mal à parler de mes sentiments", dit-il simplement. Rien ne le fait dévier de sa position.
"C'est assez bluffant, mais assez peu surprenant, a commenté l'avocat des parties civiles Maître Delarue au micro de nos journalistes, et ça s'explique très probablement par la personnalité très complexe de cet homme, qui est visiblement dénué de tout sentiment d'humanité, qui n'arrive pas à faire un pas vers ses juges, ni un pas vers les victimes. Oui la justice doit passer, mais au-delà de la vérité judiciaire qu'on aura vendredi soir, les proches de Tom attendaient que cet homme s'exprime. (...) Tout va contre lui, même sa manière de se défendre."
Dans la salle d'audience, l'incompréhension règne. Jonathan Maréchal a des souvenirs précis sur ce qui s'est passé avant la sortie cueillette, et sur la suite de sa soirée. Mais n'a pas grand chose à dire sur ce qui s'est passé entre les deux, le moment passé avec l'enfant. "Je ne me souviens plus", "je ne peux pas me souvenir de tout".
"Ce dossier cache peut-être d'autres mystères"
Même son avocat s'agace : "Vous êtes sûr que vous dites la vérité ? Moi je n'ai pas ce sentiment-là, comme la majorité des gens ici, lui lâche-t-il. Vous êtes sûr que vous nous racontez pas des carabistouilles ?"
A l'interruption de séance, maître Bouchaillou explique à nos journalistes que ces propos avaient pour but de le pousser à parler. "Il a une mémoire sélective, lorsqu'il est entendu sur les faits, il a des choses qu'il dit avec précision et d'autres qui semblent le gêner, et c'est aussi pour cette raison qu'on essaie de le pousser dans ses retranchements, pour qu'il puisse s'exprimer sur ces choses-là."
Et d'ajouter : "Ce dossier cache peut-être d'autres mystères et en particulier la participation d'autres intervenants qui ne sont pas dans le box des accusés. On a besoin de savoir ce qui s'est réellement passé, et si c'est lui, qui aurait pu l'aider, notamment à faire disparaître les effets personnels."
Ce jeudi, quatrième journée du procès, deux expertises psychiatriques doivent être exposées à la cour d'assises. Elles apporteront peut-être de nouveaux éléments de réponse sur la personnalité de l'accusé, qui aurait été victime d'abus sexuels de la part de son frère entre ses 12 et ses 21 ans.