Grosse déception pour Elouan Laporte. À une semaine de la compétition, le jeune rameur de 14 ans apprend qu'il ne pourra pas défendre son titre, sa catégorie handi-valide des 14 et 16 ans ayant été supprimée. Il avait terminé premier avec son binôme au championnat national jeune et handi-valide jeune d'aviron en 2022.
Gérer la déception, un défi pour Elouan Laporte, bientôt 14 ans, qui souffre d'autisme. Il devait concourir au championnat national d'aviron jeune et handi-valide jeune à Libourne les 6 et 7 juillet prochains, mais à une semaine de l'épreuve, sa famille découvre que ce n'est plus possible. La catégorie PR3D a été supprimée.
"En langage 'avironesque' cela concerne les jeunes de 14 à 16 ans, atteints d'autisme ou de tout trouble neurologique ou mental", précise Pauline Gillet, maman d'Elouan. L'année dernière, le jeune saint-quentinois était arrivé premier de l'épreuve dans sa catégorie, mêlant handicapé et valide.
"C'était une expérience exceptionnelle, se souvient la maman. Participer à un championnat de France, c'est quelque chose dans une vie. Cette mixité apportait un vrai plus aussi bien pour la personne handicapée, parce que ça lui permettait de gagner en compétences et en bien-être, et pour la personne valide, qui découvrait le quotidien de son binôme, et qui apprenait aussi à prendre soin de l’autre."
On l'a su une semaine avant le départ. Tout enfant serait frustré, malheureusement avec l'autisme, la frustration est décuplée.
Pauline Gillet, maman d'Elouan.
Les règles complexes régissant les compétitions entre handicapés et valides auraient évolué cet hiver. Or, depuis un an, Elouan n'a pas manqué un entraînement à l'Aviron Saint-Quentinois pour être au top de sa forme. Il avait même déjà participé à deux étapes comptant pour le critérium. Une situation qui suscite l'incompréhension de son entraîneur Etienne Deleau : "on se retrouve dans un fatras administratif qui fait que chaque personne doit à tout prix tenir dans une case. Et ce qui est dommage, c’est que ce critérium national, dont Elouan est le tenant du titre, avait ouvert de très belles portes parce que c’était les personnes en situation de handicap ou avec des particularités. Il n’y avait pas de barrières. Chaque personne pouvait ramer avec une personne valide et ça ouvrait de grandes portes."
"On est dans une bonne dynamique, il ne faut pas la briser"
Si la maman d'Elouan comprend que la problématique ne concerne que quelques familles en France, elle déplore une perte pour l'intégration des personnes handicapées : "on est dans une bonne dynamique, il ne faut pas la briser. On travaille pour de l'inclusion, pour du vivre ensemble. Ce n'est pas le moment de lâcher et les enfants handicapés, on n'a pas à les cacher. Ils ont leur place en totale inclusion dans le monde actuel."
Chaque jour, on doit se battre pour que des personnes se sentent concernées par la problématique. On doit garder les acquis et peut-être les faire évoluer. Et quand quelque chose fonctionne, il est dommage de l’enlever.
Pauline Gillet, maman d'Elouan.
Des règles spécifiques pour les compétitions
Si les clubs d'aviron accueillent des personnes en situation de handicap depuis plusieurs années, l'organisation des compétitions doit répondre à des règles spécifiques. "Une fédération, pour délivrer un titre de champion de France, il faut qu'elle ait une délégation et celle-ci, pour ces publics, est attribuée à la fédération française du sport adapté. La fédération française d'aviron s'est donc rapprochée de la fédération française du sport adapté, elles ont signé ensemble une convention qui permet d'organiser des épreuves de championnat de France et de permettre à ces sportifs d'avoir accès au titre de champion de France", explique Hélène Gigleux, directrice du pôle club et territoires à la fédération française d'aviron.
Dans le cas d'Elouan, "comme l'offre officielle du championnat 14-18 ans existe au niveau sport adapté, le championnat officiel, pour eux, devient celui-là, indique Hélène Gigleux. Les règlements sont publiés en septembre, c'était bien spécifié dans les changements de l'année qu'il y avait cette migration des épreuves au niveau de la fédération du sport adapté."
En revanche, si les sportifs ont besoin de très peu d'adaptation, ils peuvent toujours courir dans leur catégorie d'âge sur le championnat de France d'aviron traditionnel. "Tout dépend des besoins du jeune, s'il se retrouve plus dans les compétitions du sport adapté, il va y avoir un accompagnement spécifique des courses ou alors s'il n'y a pas besoin d'adaptation cela relèvera de nos compétitions traditionnelles d'aviron", conclut-elle.
Avec Rémi Vivenot / FTV