Cité internationale de la langue française : retour sur ce chantier hors normes de la restauration du château de Villers-Cotterêts

Trois ans de travaux, plus de 200 millions d'euros investis, des mauvaises surprises et des fouilles archéologiques : le chantier de la Cité internationale de la langue française, inaugurée lundi 30 octobre, n'a pas été de tout repos pour le Conservatoire des monuments nationaux. Mais le château Renaissance de Villers-Cotterêts est aujourd'hui rutilant et fin prêt à accueillir son public.

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600 compagnons, plus de 200 entreprises, 20 000 mètres carrés de travaux : la restauration du château de Villers-Cotterêts, désormais Cité internationale de la langue française, a été le chantier de nombreux superlatifs. 

Initialement estimé à 110 millions d'euros, il aura finalement fallu 211 millions, financés dans leur quasi-totalité par l'État, pour faire revivre cette demeure royale emblématique du règne de François Iᵉʳ. Retardé par la crise sanitaire, le chantier s'est finalement achevé à temps pour que le public soit accueilli sur place à partir du 1ᵉʳ novembre. 

"Il était dans un état vraiment lamentable"

L'État acquiert le château de Villers-Cotterêt pour un euro symbolique en 2018, puis confie le chantier au Conservatoire des monuments nationaux (CMN). Les bâtiments, qui ont été transformés en caserne, en hospice, puis en maison de retraite au fil des siècles, étaient totalement fermés depuis 2014

"J'avais le souvenir d'un bâtiment assez délaissé, quand je l'ai revu 30 ans après, j'ai trouvé qu'il était vraiment dans un état lamentable, relate Olivier Weets, architecte en chef des monuments historiques. La DRAC avait fait quelques travaux de mise en sécurité, très légers... Mais ça a été un choc !"

Alain Arnaud, président de la société historique de Villers-Cotterêts, se souvient avoir été consterné par cet état délabré lors de la première venue sur le site d'Emmanuel Macron, alors candidat à l'élection présidentielle, en 2017.

"Quand il vient à Villers-Cotterêts, c'est la pagaille, le château est fermé, vidé, il y a de la végétation qui "coule" de partout, des carreaux cassés, des toiles d'araignées, se remémore Alain Arnaud. Partout, il y avait des risques de dégradation, de ruptures, des planches crevées, des escaliers qui ne tenaient pas. Je me disais "il va se passer quelque chose". Mais comment sauver un château pareil, qui fait quand même 20 000 mètres carrés ? Il n'y avait pas d'espoir.

Quand l'histoire se révèle 

Avant que François Iᵉʳ n'érige l'actuel logis royal au XVIᵉ siècle, un édifice médiéval existait sur place depuis le XIIᵉ siècle. Entre 2020 et 2023, l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), fouille différentes parties du château. Les fondations d'une tour carrée de cette époque, dont l'existence était totalement inconnue, sont ainsi mises à jour, ainsi que les fondations d'un bâtiment rectangulaire dont l'usage reste à ce jour un mystère. 

Des vestiges d'un château médiéval des XIVe et XVe siècles apparaissent aussi pendant la campagne de fouilles, avec des systèmes de canalisation et des dallages représentant des scènes de chasse. Car la raison de la présence de la noblesse à Villers-Cotterêts, c'est la chasse dans la forêt de Retz qui était la plus vaste de France à l'époque de François Iᵉʳ. La base d'une colonne gothique de cette époque et un sceau représentant saint Georges terrassant un dragon ont été retrouvés pendant ces fouilles. 

Il a également fallu détruire des cloisons et aménagements réalisés au XIXᵉ siècle, où toute une partie des bâtiments était occupée par d'immenses dortoirs. La façade en revanche n'a été que très peu modifiée après le XVIIIᵉ siècle. 

"On avait une enveloppe XVIᵉ, complètement remodelée avec une esthétique classique du XVIIIᵉ. Toutes les façades ont été reprises sur le jardin et sur le parc, sauf une" résume Olivier Weets. L'objectif d'alors était de remodeler les fioritures de la renaissance jugées ringardes. Quelques-unes de ces salamandres si chères à François Iᵉʳ ont heureusement survécu, il est possible de les apercevoir derrière l'arche du balcon. 

"À un moment, il faut lever le rideau

En l'espace de trois ans, 10 000 mètres carrés d'enduit ont été posés sur les murs, 15 000 carreaux habillent la cour du jeu de paume, 280 fenêtres sont restaurées. Une verrière de 60 tonnes recouvre maintenant la cour du bâtiment, surplombant le "ciel de mots" qui accueillera les futurs visiteurs.

En octobre 2023, l'heure est aux finitions. Des ouvriers perchés sur des nacelles dépoussièrent patiemment les mots accrochés, les dernières signalétiques sont posées, les livres s'installent dans les rayonnages et pour les équipes de direction, la tension est à son comble. 

"Il y a un peu de pression, mais c'est normal, il y en aurait quoi qu'il arrive, c'est une ouverture, constate Emilie Bechepois, libraire de la Cité internationale de la langue française. On a envie que ça fonctionne !"

Même stress du grand jour pour Paul Rondin, le directeur de la Cité internationale de la langue française : "Il y a une surexcitation. C'est comme au spectacle, à un moment donné, il faut lever le rideau, le public est dans la salle... Donc, on lève le rideau, on a le trac et c'est un bon trac.

Après l'inauguration de ce lundi 30 octobre, la Cité internationale de la langue française espère accueillir 200 000 visiteurs par an. La vieille pierre, elle, a retrouvé son éclat d'antan. 

Avec Rémi Vivenot et Eric Henry / FTV 

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