Trois jours d'opérations à Craonne pour rechercher des soldats allemands ensevelis depuis la guerre

Une importante opération a débuté à Craonne dans l'Aisne pour rechercher les dépouilles de centaines de soldats allemands qui seraient ensevelis depuis la Première Guerre mondiale. Une opération faisant suite à une polémique sur le contexte de cette découverte. 

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Depuis ce matin, les chemins d'accès à tout un secteur du plateau de Californie à Craonne sont bouclés, un périmètre d'une centenaire de mètres a été mis en place en ce haut lieu des combats la Première Guerre mondiale et du tristement célèbre Chemin des Dames. Une opération de recherches devant durer 3 jours est lancée et mobilise un nombre important de services français et aussi allemands, en particulier le service de déminage, les sapeurs-pompiers de l'Aisne et notamment le GRIMP, unité spécialisée dans les recherches en milieu périlleux.

À ce stade, la préfecture de l'Aisne se limite à un communiqué diffusé lundi soir, d'après lui des militaires du 3ème Régiment du Génie de Charleville-Mézières et de la Bundewehr (l'armée allemande) participent également aux opérations. Elles se déroulent également en présence de représentants du Volksbund, service allemand des sépultures de guerre. 

Pour le reste, de nombreux acteurs du dossier ont reçu pour consigne de ne pas commenter l'opération auprès de la presse. D'après la préfecture, il s'agit de mener des "opérations de sondage sur le site dit du "Tunnel de Winterberg". Elles visent à rechercher en particulier la présence de dépouilles de soldats allemands qui seraient ensevelies dans cet abri depuis les combats de mai 1917. Selon les estimations, entre 150 et 250 d'entre eux reposeraient à cet endroit et n'auraient jamais été exhumés.

Les opérations "doivent permettre de mieux étudier les caractéristiques du site avant d’éventuelles opérations de fouilles archéologiques à mener en concertation avec les représentants du territoire. Cette nouvelle étape constitue un point fort dans la coopération engagée depuis de nombreux mois entre les autorités françaises et allemandes", poursuit le communiqué de la Préfecture. Une opération délicate pour des raisons non seulement morales mais aussi techniques compte-tenu de la nature du sol et surtout de la présence potentielle de munitions non explosées. De quoi justifier l'important dispositif déployé.

Un contexte polémique

Si l'opération s'entoure d'un grand silence c'est aussi parce qu'elle fait suite à une polémique née en fin d'année dernière autour de cette présence de soldats sans sépulture. En novembre, deux frères Pierre et Eric Malinowski (que nous n'avons pu joindre ce jour), reprenant le travail de leur père Alain, maire de la commune proche d'Orainville, dans l'Aisne, ont révélé avoir réalisé des fouilles avec une équipe sur le site et revendiqué dans de nombreux de reportages être à l'origine de la localisation du fameux tunnel de Winterberg. Une initiative dénoncée publiquement par les autorités françaises et allemandes. "Les démarches illégales pouvant être conduites par ailleurs, et qui ne contribuent pas utilement au travail déjà mené, ont été unanimement condamnées et feront l’objet, chaque fois que nécessaire, de signalements en vue de sanctions", soulignait alors un communiqué de la Préfecture de l'Aisne.

De son côté, dans un communiqué de presse du 2 décembre, Daniela Schily, Secrétaire générale du Volksbund indiquait : "L'effort de recherche des morts est honorable, mais mener l'action - sans la participation et l'approbation des autorités responsables - est inapproprié, voire contre-productif. Même si ceux qui s'intéressent à l'histoire pensent qu'ils doivent prendre des mesures pour sauver les morts, dans le pire des cas, ils peuvent provoquer l'effet inverse, à savoir le pillage des tombes", affirmait la responsable.

Le parquet de Laon a d'ailleurs confirmé aujourd'hui qu'une enquête préliminaire est toujours en cours suite au signalement de ces fouilles effectué par la DRAC.

La démarche avait également suscité la réprobation d'historiens locaux et de défenseurs de la mémoire du Chemin des dames. Ils déplorent notamment une appropriation d'un sujet connu de longue date mais pour lequelle personne n'avait agit. Plusieurs d'entre eux contactés aujourd'hui assurent suivre attentivement le dossier, mais n'ont pas souhaité réagir publiquement. 

Un risque de pillage

L'opération en cours fait suite à une réunion des différents acteurs du dossier en préfecture le 15 février. La médiatisation de l'affaire aurait pu pousser les autorités à accélérer leur intervention compte tenu également du risque plus grand désormais de voir le site pillé (selon certaines sources, de nouvelles fouilles clandestines se seraient déroulées sur place depuis, malgré la présence de caméras).

Au terme de cette étape de reconnaissance, les autorités devront décider des suites à donner. Là encore, la question ne fait pas l'unanimité entre les partisans du statu quo souhaitant préserver les lieux en l'état, tels "une nécropole" et ceux qui souhaitent l'exhumation des corps, opération qui risque de prendre une ampleur considérable. 

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