«C’est la plus dure des campagnes que j’ai jamais faites», a reconnu Xavier Bertrand. Et l’entre-deux tours s’annonce pire: c’est à lui qu’a échu la responsabilité de faire barrage à la vague FN en Nord-Pas-de-Calais-Picardie. La digue sera-t-elle assez haute ?
Il a dégainé tout de suite : peu après 20h, dimanche 6 décembre, Xavier Bertrand a pris la parole depuis Tourcoing dans le Nord…Et tout de suite, alors que le retrait de la liste PS était encore en discussion rue de Solférino à Paris, le candidat Les Républicains s’est posé en rassembleur, brandissant bien haut la figure du Général de Gaulle, né dans le Nord, et les valeurs gaullistes qui ont fait les beaux jours du RPR en son temps. « En nous plaçant en seconde position, les habitants de la région font de la liste de la droite et du centre la seule alternative possible contre l’extrême droite », a-t-il déclaré…
Voilà…C’était fait. En quelques mots, il avait nié jusqu’à l’existence même de son adversaire socialiste…
Il faut dire que Xavier Bertrand n’a jamais vraiment douté que le 1er tour des Régionales en Nord-Pas-de-Calais-Picardie prendrait cette tournure…Il s’y était préparé…Et de conclure : « Je serai le candidat du rassemblement, nous ferons rempart. Le visage de la région ne sera pas celui de Mme Le Pen. »
C’est désormais lui contre Marine Le Pen...
Certains lui ont opposé le total des reports de voix des autres listes de gauche sur celle du PS supérieure à son score…Xavier Bertrand répond avec les mêmes arguments, les chiffres : «Tous les sondages l’ont montré, si la gauche est en duel face au FN, elle ne peut pas gagner » explique-t-il…Pierre de Saintignon (18% environ) a retiré sa liste (mais sans appeler explicitement à voter Bertrand), Sandrine Rousseau (EELV) et Fabien Roussel (PCF), qui affichent à eux 2 près de 10% des suffrages, ont également appelé à tout faire pour battre Marine Le Pen. En théorie, la réserve de voix est donc importante : 18 + 10…Xavier Bertrand a de quoi remonter son handicap de 15 points.
Mais la tâche va quand même être ardue…Car pour faire barrage à Marine Le Pen, Xavier Bertrand a 2 réserves de voix : les abstentionnistes et les électeurs de gauche…
Il y a bien ceux qui ont voté FN au 1er tour mais « qui ne veulent pas que Marine Le Pen devienne présidente de la région ». …Avouons-le : c'est une espèce en voie de disparition dans notre région…
Même liste, même projet
Alors si les abstentionnistes seront probablement les plus faciles à convaincre, rien n’est moins sûr avec les électeurs de gauche… Selon Xavier Bertrand, les résultats du 1er tour montrent que 6 électeurs sur 10 n’ont pas choisi Marine Le Pen… Réunir les électeurs de droite et de gauche sous son nom n’est pas un pari gagné d’avance pour le candidat LR…Même si le dernier sondage d’avant 1er tour le donne gagnant dans son duel face à Marine Le Pen : 50,5% contre 49,5%...
Allez convaincre un communiste de voter pour tout ce qu’il rejette, même si c’est pour sauver la République…L’argument du front républicain ne fonctionnera pas avec tout le monde…D’autant que la gauche n’aura aucun élu au prochain Conseil Régional…Certains pourront dans ces circonstances se dire « à quoi bon ? »
D’autant que pour le 2nd tour, la tête de liste régionale LR a déposé la « même liste » avec « le même projet »….Xavier Bertrand a délibérément choisi de ne rien changer pour ne pas prêter le flanc à l’argumentaire vedette du Front National : « les magouilles politiciennes » pour empêcher Marine Le Pen d’accéder à la tête de la Région…
S’il va battre le terrain pour convaincre les abstentionnistes de se rendre aux urnes pour voter pour lui, Xavier Bertrand a en plus avoué : « La gauche peut se retirer ; la question sera ce que feront ses électeurs… »
Il laisse ainsi les électeurs de gauche seuls face à leur responsabilité de suivre ou non les consignes de vote du parti…Travaillant déjà à son argumentaire s’il perd contre Marine Le Pen : ça n’aura pas été sa faute….