Les différents acteurs campent sur leurs positions. Statu Quo pour l'instant, malgré l'émergence de nouvelles idées.
La situation de la compagnie de ferries SeaFrance semble plus enlisée que jamais cet après-midi, à l'issue de la réunion qui devait réunir les principaux acteurs du dossier, côté gouvernement et côté SCOP. Chacun a semble-t-il campé sur ses positions, les porteurs du projet de SCOP estimant qu'il faut "arrêter de délirer dans tous les sens", tandis que la ministre de l'Ecologie et des Transports Nathalie Kosciusko-Morizet dit toujours attendre un "business plan" qui permettrait de valider le projet de Société coopérative ouvrière.
"Nous attendons le business plan de l'équipe qui doit porter la coopérative ouvrière",
a-t-elle déclaré à l'issue de l'entrevue qui a réuni, autour de la table, tous les acteurs du dossier (Etat, SNCF, représentants de la Scop). Elle a précisé qu'elle attendait le document pour vendredi soir.
Mais il y a un hic, et de taille, toujours le même : il manque quelque 50 millions d'euros pour le projet de Scop, et la rencontre n'a pas permis de faire avancer le dossier, selon les représentants des salariés, qui en ont une nouvelle fois appelé au président Sarkozy.
A l'annonce du report d'audience décidé par le Tribunal de Commerce mardi, les salariés avaient demandé, par la voix de Didier Cappelle, leader de la CFDT Maritime, à ce que cette fois ci "on fasse une vraie réunion de travail, une réunion où on voit ce qu'on peut faire et on n'en sort pas tant qu'il n'y a pas la fumée blanche".
"Nous allons refaire d'ici demain soir un appel au président. Ils veulent liquider l'entreprise, démolir l'entreprise, et il faudrait la rebâtir", a-t-il déclaré cet après-midi.
Ce à quoi le ministre des Transports Thierry Mariani a rétorqué que l'Etat avait joué le jeu pour offrir aux salariés l'opportunité de sauver leur entreprise et de déposer un dossier fort, en réinjectant notamment les indemnités de licenciement majorées qui auraient pu être versées par la SNCF à ses 880 salariés l'issue d'un plan social. Cette proposition ayant été refusée par les salariés, "on est maintenant en droit de se poser la question de savoir si la volonté de sauver les emplois est réelle des deux côtés", a conclu M. Mariani.
Les porteurs du projet de SCOP souhaitent désormais que les juges prononcent la cession de SeaFrance à leur SCOP, et non sa liquidation définitive, solution prônée par
Nicolas Sarkozy pour permettre aux salariés qui le souhaitent de réinjecter leurs fonds propres dans le projet coopératif. Les salriés et la CFDT réclament désormais la création d'une Société d'Economie Mixte par l'Etat et les Collectivités locales, pour soutenir la SCOP. Une fois que le tribunal aura cédé les actifs de SeaFrance (c'est à dire les navires, le nom commercial et le fonds de commerce, les fichiers clientèle ou encore la filiale
en Grande-Bretagne essentielle pour attirer les passagers britanniques) à la SCOP, celle-ci céderait les navires aux pouvoirs publics via cette SEM. En retour, l'argent récolté - la valeur des 3 navires (le 4e est en location), soit un peu plus de 150 millions d'euros - permettrait alors de financer le projet et "d'assurer la pérennité de la Scop", a estimé Me Philippe Brun, avocat de la CFDT maritime Nord. En clair, les salariés demandent à l'Etat de leur céder les bateaux, via une décision de justice, puis de les leur racheter pour une petite fortune, via la fameuse SEM.
Problème : quand bien même l'Etat serait d'accord, la mise en place de cette structure pourrait prendre six mois. "Or, l'exploitation doit reprendre le plus rapidement possible, ça fait déjà près de deux mois que les bateaux sont bloqués à quai" (sur décision de la direction), a souligné Me Brun. D'ici là, "les pouvoirs publics peuvent garantir un prêt d'un établissement financier pour au moins la moitié des 50 millions d'euros nécessaires pour faire fonctionner la Scop la première année", a-t-il plaidé.
Jeudi matin, le ministre de l'Industrie Eric Besson a déclaré que le gouvernement
croyait encore au salut de SeaFrance. Ira-t-il dans le sens de la proposition des salariés et des porteurs du projet SCOP ? Le dossier de cette dernière doit être rendu vendredi soir au tribunal de commerce de Paris, avant une audience lundi, à 10H. Ce projet est la seule offre de reprise pour la société, qui emploie 880 salariés en CDI, puisque les propositions de l'armateur Louis Dreyfus et de LD Lines avaient été rejetées d'office par les salariés et la CFDT.
De son côté, si toutes ces nouvelles hypothèses tombaient à l'eau, le président de la SNCF Guillaume Pepy s'est engagé à proposer un reclassement dans l'entreprise à "l'ensemble des salariés" de SeaFrance. Mais seul un petit nombre d'entre eux pourrait retrouver un emploi sur place, qui plus est dans la branche maritime.
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