La coordination des précaires de Picardie-Oise prévoit un nouveau rassemblement ce dimanche 11 avril. Des personnes d'horizons très divers porteront un même message contre la réforme de l'assurance chômage et pour la prolongation et l'élargissement de l'année blanche accordée aux intermittents.
Des chaises, décorées si possible, pour manifester la frustration du spectateur empêché et symboliser son droit au spectacle. Voici ce que prévoit la Coordination des intermittents et précaires (CIP) de Picardie ce dimanche, à Montataire, dans l'Oise.
Le mouvement entamé le 4 mars, qui se traduit également par des occupations de théâtres et de lieux culturels, ne faiblit pas. En occupant la rue tout en respectant les codes de distances sanitaires avec ces chaises, les manifestants entendent interpeller les pouvoirs publics sur la gravité de leurs situations et sur la nécessité d'améliorer les droits des intermittents et précaires touchés par la crise sanitaire.
"C'est un milieu très hétéroclite", explique Philippe, intermittent dans l'Oise et membre de la CIP. Lui n'apprécie pas que les médias mettent en avant des histoires singulières. "Elles le sont toutes", mais ce que l'on doit retenir, selon ce musicien, ce sont les revendications communes. Car l'idée est bien de parler d'une même voix.
Deux revendications principales
Ce mouvement est avant tout une mobilisation contre la réforme de l'assurance chômage. "Elle va compliquer la vie à des dizaines de milliers de travailleurs, estime Philippe, qui espère voir le mouvement prendre de l'ampleur. Il va falloir faire plus d'heures pour toucher moins de chômage." Et d'ajouter : "C'est une attaque contre tous les travailleurs et tout le monde risque d'être menacé un jour par le chômage". Pour Philippe, ce combat n'est pas que celui des précaires. C'est pourquoi il espère voir des chômeurs et même des travailleurs les rejoindre.
"C'est une aberration de rendre les pauvres encore plus pauvres et les précaires encore plus précaires."
À 19 ans, Charly Henonin a décidé qu'il participerait à la manifestation de ce dimanche, à Montataire. Lui effectue actuellement un service civique dans une école. Avec le confinement, il ne travaille pas, mais continue à être payé. "C'est assez précaire quand même", explique-t-il. Je ne trouvais pas de travail. J'avais besoin d'argent pour payer mon loyer." Charly n'est pas directement concerné par la réforme de l'assurance chômage, mais il se sent le devoir de militer.
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C'est ce même sentiment qui a poussé Jean-Baptiste Rondreux, à se rapprocher de la CIP de la Somme. Quand il a appris l'occupation du cirque Jules Verne, à Amiens, ce guide conférencier s'est rendu sur place pour discuter avec les membres du collectif. "Ça fait du bien de se retrouver avec des gens avec lesquels on peut échanger sur des problèmes similaires", confie-t-il.
Cet ancien scénariste a choisi, à l'approche de la trentaine, de se reconvertir et de devenir guide conférencier. Depuis novembre 2020, il peut officiellement guider des visiteurs dans des musées par exemple. Mais le jeune homme a vu tous ses projets tomber à l'eau les uns après les autres. "Je ne m'estime pas le plus à plaindre car je lance une entreprise, je n'ai pas à maintenir une entreprise à flots, estime-t-il. J'ai plus de temps pour développer mes idées, des visites ludiques et immersives par exemple. Mais là, ça commence à devenir long. C'est épuisant de se préparer pour quelque chose alors qu'on ne sait pas si cela va arriver ni comment."
Alors lui aussi a décidé de rejoindre le mouvement. Il n'a pas encore côtisé pour le chômage, mais il estime que plusieurs de ses collègues vont être impactés par la réforme. Même s'il n'est pas intermittent, il espère également que le gouvernement acceptera la prolongation de l'année blanche.
"Finalement, on est un peu tous dans le même bateau"
La prolongation de l'année blanche pour les intermittents et son élargissement à tous les travailleurs précaires est la deuxième revendication mise en avant par la CIP Picardie. "Nos droits chômage ont été prolongés jusqu'en août, explique Philippe, membre de la CIP de l'Oise. Après ça, on ne sait pas."
En 2020, le président de la République avait en effet décidé d'accorder une année blanche aux intermittents. Les 507 heures sur 12 mois qu'ils n'avaient pu effectuer en raison de la fermeture des lieux culturels n'étaient plus requises pour toucher des indemnités. Mais alors que l'échéance approche, les incertitudes demeurent. "Il y a des pans entiers du secteur culturel comme le spectacle vivant qui n'ont pas repris et il va y avoir des embouteillages quand cela va reprendre", s'inquiète une membre du collectif de la Somme.
À Amiens, le discours est le même que dans l'Oise : "on a choisi de ne pas parler de nos situations personnelles. Nous avons tous un objectif commun : obtenir l'annulation du décret sur l'assurance chômage et la reconduction de l'année blanche."