Une victime de féminicide identifiée trois ans plus tard grâce à la mobilisation du parquet de Dunkerque

En 2019, le corps d'une femme dénudée et tuée d'une balle dans la tête était retrouvé à la frontière entre les Pays-Bas et la Belgique. Longtemps restée anonyme, la victime a été identifiée grâce à une collaboration entre le parquet de Dunkerque et celui de Breda.

C'est une coopération internationale qui rend enfin son identité à une victime longtemps restée anonyme. Les efforts du parquet de Dunkerque, couplé à ceux du parquet néerlandais de Breda, ont permis de reconstituer le scénario qui a mené à la mort de Jocelyne Decroix - mariée sous le nom d'Hamilière - "malgré une action publique éteinte" dénonce assez inhabituellement le parquet de Dunkerque. 

Une victime aux Pays-Bas, une disparue en France

Tout commence le 22 juin 2019, lorsqu'un corps de femme est retrouvé dans un champ de la commune de Westdorpe, aux Pays-Bas, une commune frontalière de la Belgique. "La victime est nue, allongée dans l'herbe, les genoux meurtris, tuée par arme à feu d'une balle à l'arrière de la tête." La Justice néerlandaise diffuse très largement un appel à témoins, sans succès. Le parquet de Breda ouvre alors une information judiciaire et lance des demandes d'entraide Européenne auprès de la Belgique, de l'Allemagne et de la France. En décembre 2019, la victime encore inconnue est enterrée à Westdorpe.

L'enquête est relancée en juillet 2020, lorsque la brigade de gendarmerie de Hoymille se rend au domicile de Michel Hamilière, récemment décédé. Questionnée sur l'absence de l'épouse, la famille du septuagénaire "évoque un départ spontané de celle-ci après qu’elle a découvert l'infidélité de son époux et l'existence d'un enfant illégitime. Depuis, personne n'a tenté de prendre attache avec [Jocelyne] et chacun s'est persuadé de son départ volontaire." Les militaires recherchent l'épouse disparue, qui reste introuvable. Aucune administration française ne lui recense de nouvelle adresse. En revanche, sa pension est toujours versée sur le compte joint du couple.

A ces détails déjà troublants s'ajoutent de nouveaux éléments de preuve, comme le précise le procureur de Dunkerque, Sébastien Piève. "Les militaires de la gendarmerie persistent dans leur enquête, perquisitionnent le domicile du couple, ne trouvent aucun effet personnel de Madame à l’exception de ses documents d'identité, éléments venant contrecarrer l'hypothèse d'un départ spontané. (...) Deux cartouches du fusil présent au domicile manquent." La brigade de recherche de Dunkerque-Hoymille continue de fouiller dans la vie de Michel Hamilière. Depuis juin 2019, le retraité s'est construit une double vie, mentant à son entourage sur son endettement. Il semble se rétablir en juillet, après avoir revendu des biens communs au couple mais aussi des biens de Jocelyne Decroix, de qui il se dit pourtant séparé. 

Un meurtre mis au jour par une coopération internationale

Il ne reste plus qu'à établir des correspondances ADN. Mais, comme Jocelyne Decroix est portée disparu, une barrière légale empêche son ADN d'être entrée dans la base du fichier national des empreintes génétiques. Un message est alors lancé sur une plateforme regroupant Interpol, Schengen et Europol (SCOPol) et, en août 2021, une correspondance est enfin obtenue. "C’est bien le corps de Jocelyne Decroix, épouse Hamilière qui a été retrouvé dans ce champ des Pays-Bas, à 1h30 de trajet du domicile conjugal. L’exploitation de la vidéosurveillance permettra d’établir que le véhicule de Michel Hamilière était stationné sur les lieux dans les heures précédant la découverte du corps."

L'entraide continue entre les parquets de Dunkerque et de Breda, elle permet la poursuite de l'enquête. En octobre 2021, une réunion commune avec toutes les forces ayant eu attache au dossier permet de répondre aux dernières questions en suspens. Ces travaux permettent notamment de déterminer que "la balle ayant servi au meurtre était d'un calibre identique au fusil retrouvé au domicile du couple et que l'ADN masculin retrouvé sur la corde et les chevilles de la victime est celui de Michel Hamilière. (...) L'absence de traces de sang sur les lieux de découverte du corps laisse à penser que la victime a été déposée dans le champ après avoir été tuée. L'examen du corps révèle des traces de pression, rendant plausible l'hypothèse d'un meurtre commis sur une victime à genoux."

Trois ans après son décès, et après la mort de son meurtrier, la Justice a donc permis de rendre la vérité à la famille de Jocelyne Decroix, non pas disparue mais bel et bien victime d'un féminicide dans un contexte de séparation. "La gendarmerie nationale française partait d'une enquête "décès" pour découvrir la disparition de l'épouse du défunt ; les services de police néerlandais retrouvant quant à eux un corps exécuté, non identifié, sans que personne ne le réclame. La coopération judiciaire internationale entre les parquets de Dunkerque et de Breda a permis de faire le lien entre ces deux enquêtes."

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