Farid E., Nordiste condamné pour "agressions sexuelles" et "viol", pourrait être innocenté vingt ans plus tard

Jeudi 8 décembre, la cour de révision va examiner la demande de réhabilitation de Farid E., condamné en 2003 par la cour d’assises des mineurs pour "agressions sexuelles" et "viol". La plaignante, âgée de 15 ans à l'époque, avait finalement reconnu, en 2017, avoir menti, comme le raconte un récit publié dans Le Monde.

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La justice française est-elle sur le point de reconnaitre une nouvelle erreur judiciaire, la douzième de son histoire depuis 1945 ?

Jeudi 8 décembre, une audience historique se tiendra au palais de justice de Paris, concernant le cas de Farid E., condamné pour "agressions sexuelles" et de "viol" sur mineur de 15 ans, en 2003.

La cour de révision - juridiction chargée de réviser des décisions pénales définitives - va examiner la demande de réhabilitation de Farid E. Plus de vingt ans plus tard, ce Nordiste, fils d'ouvrier marocain, pourrait se retrouver innocenté dans cette affaire.

En effet, la plaignante, une certaine Julie D., adolescente de 15 ans à l'époque, avait finalement avoué avoir menti sur ses accusations. Farid E. lui, passé par la prison entre temps, a toujours plaidé non coupable. En vain.

1998 : Julie D. adolescente de 15 ans témoigne contre Farid E.

Cette histoire, racontée en détail dans les colonnes du journal Le Monde, s'est déroulée dans un petit village du Nord, dont on ne connait pas le nom. C'est le 15 décembre 1998 qu'une certaine Julie D. vivant dans la même commune que Farid E., avait porté ses premières accusations contre le jeune homme qui avait alors 17 ans au moment des faits reprochés.

Ce jour là, devant la gendarmerie, saisie par le procureur de la République, la jeune fille raconte sa version des faits après s'être confié à quelques uns de ses proches. Elle revient sur deux épisodes, dont le premier se serait déroulé après une soirée au cinéma.

La plaignante reconnaît "formellement" son agresseur

"J’étais allée voir le film Titanic, précise Julie D. a l'enquêtrice, dans un procès verbal cité par Le Monde. J’ai descendu l’avenue et [...] j’ai rencontré trois ou quatre Arabes. Parmi eux, un dénommé Farid, que je connaissais de vue." Elle raconte alors une scène d'agression, dit qu'on lui a touché "la poitrine" tout en lui tenant "les bras" et "les jambes". "Il n’a pas touché mon sexe", ajoute-t-elle.

Elle poursuit sur le second épisode qui aurait eu lieu 4 ou 5 mois plus tard. Julie D. dit se rendre chez sa tante, un soir de juillet, quand elle est "appelée par Farid et un autre" dans la rue, avant d'être emmené près de la piscine. Elle évoque une discussion qui dérape. "Ils m’ont poussée à terre, Farid a relevé ma robe et a enlevé ma culotte, détaille-t-elle. Il a commencé à me caresser le sexe [...] Quelques minutes après, il a baissé son pantalon [...] Il a introduit son sexe dans mon vagin." Elle précise : "J'étais vierge."

Quatre jours après cette entretien à la gendarmerie, le 19 décembre 1998, Julie D. reconnaît "formellement" Farid E. comme son "violeur" sur un album photo que lui présentent les enquêteurs. Elle confirme ses dires deux mois après lorsque ce dernier apparait derrière une vitre sans tain. "Je n’ai aucun doute. Je maintiens mes déclarations", assure la jeune fille.

Farid E, fils d'ouvrier marocain à Dunkerque, nie les accusations

Farid E. est le dernier d'une fratrie de trois garçons. Son père, marocain, est ouvrier depuis quarante ans dans une usine de Dunkerque, indique Le Monde. Sa mère, française, est employée d’école et de garderie. Le jeune homme a déjà à maille à partir avec la justice, pour des histoires de violences et de racket.

Lors de sa garde à vue, Farid E. rejette toutes les accusations portées contre lui. "C'est n'est pas moi !", clame-t-il. "Je n’ai jamais eu de rapport sexuel !". Qu'importe. Le 5 février 1999, le jeune Nordiste est présenté à un juge d’instruction et incarcéré au quartier des mineurs de la maison d’arrêt de Loos.

Ses amis sont placés également placés en garde à vue. Une confrontation sera faite entre ces derniers, Farid E. et la plaignante. Elle confirme les faits d'agressions, lui continu de les nier.

2003, Farid E. est condamné à 5 ans de prison

Le 19 janvier 2001, la chambre d’accusation de la cour d’appel de Douai ordonne le renvoi de Farid E. devant la cour d’assises des mineurs du Nord. Son procès s’ouvre le 19 décembre 2003. À l’audience, Julie D. renouvelle ses accusations. Farid D. est déclaré coupable d’"agressions sexuelles" et de "viol sur mineur de 15 ans", et condamné à cinq ans d’emprisonnement, dont quatre ans et deux mois avec sursis. Puisqu'il il a déjà fait de la détention provisoire, il ressort libre. Ses parents sont condamnés à verser 17.000 euros de dommages et intérêts à la victime.

2017, Julie D. avoue son mensonge

Quatorze ans plus tard, un rebondissement vient relancer l'affaire. Le 23 octobre 2017, Julie D décide d'écrire au procureur de la République de Douai pour avouer son mensonge. "Après un long travail sur moi-même en psychothérapie, je vous envoie ce courrier pour vous informer de ma responsabilité dans les faits suivants", présente-t-elle dans sa lettre.

Dans cette dernière elle accuse finalement son grand frère "d'incestes répétés" entre l'âge de "8 et 12 ans". "Je n’ai pas réussi à rétablir la vérité auprès de mes parents, les gendarmes et la justice à l’époque, étant enfermée dans mon propre mensonge", explique Julie D. Je me sens honteuse et coupable vis-à-vis de Farid E."

Pourtant, la justice ne réagit, rien n'est fait. Julie D. envoie alors une nouvelle lettre et finit par être convoquée au commissariat pour être entendue.

Farid E. sera présent à l'audience

De son côté, Farid E. tente de refaire sa vie malgré les accusations qui le poursuivent. Il est marié, père de deux enfants, travaille dans le commerce. Inscrit au fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles et violentes (Fijais), il doit pointer au commissariat tous les ans.

C'est seulement en juillet 2022 que Farid E. va apprendre que son accusatrice a avoué son mensonge. Il est alors convoqué au commissariat. On lui apprend alors la nouvelle. Il reste dubitatif. Peine à y croire. Il attend encore l’examen de la cour de révision à l’audience du 8 décembre à laquelle il assistera.

Avec cette audience, Farid E. pourrait, malgré lui, entrer dans l'histoire en intégrant la liste des grandes erreurs judiciaires françaises, après celles, entre autres, de Patrick Dils, Loïc Secher ou encore Monique Case.

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