Ces entreprises font face au labyrinthe administratif des contrats d'assurance, bataillant pour obtenir un remboursement ou une compensation des dégâts matériels et économiques causés par les inondations. Une nouvelle charge psychologique qui inquiète les plus hautes sphères de la CCI.
"Personne n'a encore mis la clé sous la porte mais l'inquiétude des entreprises est bien là." Plus d'une semaine après les nouvelles inondations qui ont marqué le Nord et le Pas-de-Calais, le ras-le-bol des habitants se fait d'autant plus sentir parmi les chefs et les salariés d'entreprises. Car les crues n'ont pas épargné le secteur commercial et industriel, mettant un grand coup d'arrêt dans l'économie de plusieurs enseignes.
Plus précisément, ce sont "400 entreprises qui ont été touchées directement" par les inondations dans la région selon la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Hauts-de-France. Au risque de souligner d'autant plus le drame de la situation, Philippe Hourdain, président de l'organisme, ajoute que 400 autres entreprises ont également été impactées par les inondations, mais "indirectement". Portant le bilan à plus de 800 entreprises, principalement situées entre Saint-Omer et le Dunkerquois.
Des remboursements difficiles à percevoir
Les 400 enseignes atteintes indirectement n'ont pas été inondées à proprement parler. Mais leur fréquentation et leur économie ont été lourdement éprouvées par les crues. "Par exemple, l'accès à certains lieux est devenu impossible, les clients et le personnel ne peuvent donc pas venir, obligeant l'entreprise à se mettre à l'arrêt, sans pour autant avoir connu de dégradations matérielles", explique Philippe Hourdain.
L'accès à certains lieux est devenu impossible, les clients et le personnel ne peuvent donc pas venir, obligeant l'entreprise à se mettre à l'arrêt, sans pour autant avoir connu de dégradations matérielles.
Philippe Hourdain, président de la CCI des Hauts-de-France
Comme l'indique également le président de la CCI des Hauts-de-France, ces entreprises vont avoir plus de mal à faire jouer leur assurance pour que leurs préjudices soient couverts. "Des clauses sont prévues dans les contrats d'assurance pour gérer ce type de catastrophe et permettent de bien rembourser les dégâts. Mais c'est un coût en plus pour les entreprises, qui ne peuvent pas toujours se le permettre ou qui ne pensaient simplement pas être touchées un jour pas des inondations."
Qui plus est, même si ces clauses existent, elles ne sont pas automatiques et peuvent être refusées par les assurances, notamment selon la localisation des entreprises. "Selon que l'on se trouve à Lille ou sur les bords de l'Aa, ça peut faire la différence, car le risque de crue est plus présent dans le deuxième cas." Pour aider les entreprises dans leurs démarches administratives, la CCI a mis en place un guichet unique joignable au 03 20 63 79 00 entre 9h et 17h.
Épuisement moral
Autre difficulté pour les entreprises : après un premier sinistre couvert par l'assurance, il se peut que celle-ci ne renouvelle pas le contrat l'année suivante, car le client est devenu trop cher. "C'est un autre poids psychologique qui commence alors pour les entreprises, déjà éprouvées par les catastrophes. Elles doivent renégocier leurs primes et trouver de nouveaux contrats qui les assurent", déplore Philippe Hourdain, pour qui l'impact psychologique des inondations représente l'un des combats les plus alarmants pour la CCI.
Les entrepreneurs ne parlent pas souvent de leurs problèmes, ce qui crée une souffrance importante. C'est vraiment cet aspect psychologique qui m'inquiète le plus.
Philippe Hourdain
"Les entreprises n'ont pas eu le temps de se remettre des premières inondations de novembre. La sensation d'être toujours dans la crise, toujours dans les soucis et les tracas est persistante", confirme-t-il. "La plupart des entreprises touchées deux fois par les inondations craignent une troisième catastrophe." Alors certains entrepreneurs envisagent leur déménagement, mais sont bien vite rattrapés par les difficultés administratives que représente un tel changement. "Les entrepreneurs ne parlent pas souvent de leurs problèmes, ce qui crée une souffrance importante. C'est vraiment cet aspect psychologique qui m'inquiète le plus."